Arcade Fire

Critique | Arcade Fire, Céline Dion et plus au Métropolis pour un spectacle-bénéfice

Lundi 1er octobre 2012 – Métropolis (Montréal)

Surréelle que cette idée de voir Céline Dion, Arcade Fire, Patrick Watson, Ben Harper et une demi-douzaine d’autres artistes québécois réunis dans une seule et même soirée. Les gens de l’ADISQ n’oseraient même pas en rêver; même les Grammys peineraient à rassembler tout ce beau monde. C’est pourtant le spectacle-bénéfice à la mémoire de Denis Blanchette – technicien tristement décédé lors des incidents survenus pendant la soirée des élections au Métropolis – qui a pris la forme de cette grande communion musicale anglo-franco extraordinaire et unique…

Mais aussi « extraordinaire » (au sens propre) soit-elle, cette soirée acoustique se déroulait également sous le signe de la sobriété. Pas trop de discours, ni d’émotions appuyés. Pas de décor non plus, ni de montage photo larmoyant (n’eut été d’une vidéo hors-ton avec Sir Pathétik). Principalement de la musique. Belle et épurée. De la musique de coeur.

Louis-Jean Cormier et Win Butler ont chacun souligné avec justesse l’importance d’une soirée visant à se « réapproprier un lieu tristement lié à une tragédie ». L’air était donc à l’appréciation de la musique dans sa forme la plus simple.

 

Céline unplugged

Photo de courtoisie par Victor Diaz-Lamich

Ça commençait en grand avec la présence de Céline Dion, grande dame du showbiz plus grand que nature, cette fois sans artifice. Après une minute de silence pour le défunt, son pianiste Claude Lemay s’est pointé sur scène afin de démarrer la soirée avec une mélodie plutôt familière. Sous un tonnerre d’applaudissements, la chanteuse québécoise la plus populaire au monde a entonné L’Amour existe encore. Un grand moment, qui s’est déroulé dans un silence des plus respectueux.

Sans tambour ni trompette, les artistes se sont succédés, de Ben Harper (qui venait proposer une petite visite éclair, tout juste avant son spectacle complet à la Maison Symphonique) à Coeur de Pirate, en passant par Louis-Jean Cormier et Patrick Watson. Ce dernier a d’ailleurs pris le temps d’écrire une berceuse – en français de surcroît – pour la fille de Denis Blanchette.

Marc Hervieux et Éric Lapointe. Photo de courtoisie par Victor Diaz-Lamich.

Chacun y allait de sa spécialité: Dumas tentait de soulever la foule avec entrain, alors que Martha Wainwright et sa tante Anna McGarrigle ont offert leur contribution musicale avec une douce humilité, tout comme Coeur de Pirate (qui effectuait une première prestation publique depuis son accouchement).

Ian Kelly a rendu hommage à ces techniciens et « gars de sécurité » qui proviennent d’un monde qu’il connait bien, ayant été lui-même technicien de scène au Métropolis et au Spectrum.

La famille et les proches de la victime – qui occupaient les loges VIP en haut aux bords de la scène – ont semblé soulevés par la présence surprise d’Éric Lapointe et Marc Hervieux, qui ont interprété Mon Ange en duo, avec Rick Hugues au piano.  Ça et le succès fédérateur de Vincent Vallières, On va s’aimer encore.

 

Finale avec Arcade Fire

Win Butler, d’Arcade Fire. Photo de courtoisie par Victor Diaz-Lamich.

La cerise sur le gâteau: 3 chansons de la formation Arcade Fire, tous de noir vêtus, à la manière « MTV Unplugged ». Chics et minutieux, les 8 complices ont revisité My Body Is A Cage (avec une imposante finale à 6 voix), Empty Room (avec accordéon) et Wake Up de nouvelles façons.

Pour cette dernière, les artistes encore présents ont rejoint Arcade Fire sur scène pour une finale digne d’une St-Jean de rêve. Voir Éric Lapointe et Patrick Watson chanter ensemble la finale de Wake Up avec Arcade Fire aux devants de la scène? Qui l’eût cru!

Belle façon de « tourner la page » que cette soirée en privé, qui s’est déroulée dans le respect et la simplicité. Un beau petit happening qui fait du bien.

 

 

Déroulement de la soirée

19h20: La file d’attente s’étire jusqu’au coin Ste-Catherine et Sanguinet. Le bruit court que Céline Dion OUVRIRAIT la soirée. Dans 10 minutes. Ça rentre au compte-goutte. Un certain stress s’installe dans la file d’attente…

19h50: Le spectacle, prévu pour 19h30, n’est toujours pas commencé. Ça se remplit. Sur scène: un piano et quelques micros. C’est tout. Et Dieu sait qu’il en passera, des gros noms, sur cette scène pour l’instant presque déserte.

20h: Le vice-président et directeur général du Métropolis André Ménard arrive sur scène afin de présenter (dans les deux langues concernées) la soirée, qu’il veut « calme et apaisée ». Il lit ensuite un message adressé à la foule par nul autre que Leonard Cohen (qui est présentement en Europe). Belle pensée.

Une minute de silence pour le défunt.

20h05: La soirée commence en grand. Céline Dion arrive sur la scène du Métropolis. (On n’aurait jamais cru écrire cette phrase). Elle interprète L’amour existe encore, accompagnée d’un pianiste (Claude Lemay), alors qu’un silence religieux règne toujours dans la salle. Force est d’admettre qu’une chanteuse d’une telle stature dans une soirée aussi sobre, ça donne lieu à un moment inoubliable.

Évidemment, la foule lui réserve une ovation bien sentie. Céline n’interprètera qu’une seule chanson.

20h12: Au suivant: Ben Harper est au Métropolis… moins d’une heure avant son show à la Maison Symphonique! Il interprète une pièce instrumentale de 5 minutes, puis une jolie version solo de Pleasure and Pain.

20h27: Au tour de Louis-Jean Cormier, avec Un refrain trop long, puis Tout le monde en même temps, avec sa choriste Adèle Trottier-Rivard et son guitariste Simon Pednault.

20h39: Louis-Jean présente ensuite son bon ami Patrick Watson. Autour d’un micro, le Patrick Watson Band et Louis-Jean Cormier interprètent Into Giants.

Watson se dirige ensuite au piano, alors que ses collègues retraitent au vestiaire. « Je ne savais pas quelle chanson chanter alors j’ai écrit une berceuse pour la petite fille de Denis (Blanchette) ». Il entonne une jolie berceuse inédite en français, lui au piano avec Robbie Kuster à la scie musicale.

20h49: Au tour de Dumas. « Une chanson pour Montréal »: J’erre avec Jocelyn Tellier à la guitare électrique. S’ensuit Le Bonheur (Rien ne nous areêtera).

21h: Martha Wainwright nous fait ensuite l’honneur de sa présence. Elle introduit une vidéo de son frérot Rufus, qui chante Hallelujah. vidéo d’archive tirée du Fetival de Jazz. Drôle d’idée. La foule du Métropolis chante en choeur le refrain. Rufus se trompe dans ses paroles, comme toujours. Même le monteur de la vidéo n’en a pas fait un cas apparemment.

21h05: Martha à nouveau, pour une chanson avec sa tante Anna McGarrigle. Un titre des Soeurs McGarrigle: Dans le silence.

21h09: Un message vidéo de Sir Pathétik. On le retrouve en studio; il a enregistré une chanson pour Denis Blanchette, avec les proches du regretté pour choeur.

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21h35: Retour de l’entracte. Coeur de Pirate effectue sa première présence sur scène depuis son accouchement. Pas rouillée du tout, la nouvelle maman.

« Bébéatrice » interprète ses deux titres les plus connus, Place de la République et Comme des enfants, avec une humeur resplendissante dans la voix.

21h45: Ian Kelly se pointe sur scène et explique qu’il fut jadis technicien au Métropolis et au Spectrum, en franglais, et prend soin de remercier un à un tous les techniciens de l’établissement.

Il empoigne ensuite une guitare afin de jouer la bien-nommée We Will Meet Again, accompagné de Sandy Belfort au piano, avant d’enchainer avec Take Me Home, complètement débranché. Chaude ovation.

21h55: Surprise: Eric Lapointe et Marc Hervieux viennent chanter Mon Ange !  On dira ce qu’on voudra, ces deux voix résonnent jusque dans les tripes.

22h05: Vincent Vallières et son guitariste André Papanicolaou interprètent Le monde tourne fort et Laura. Et On va s’aimer encore. Trois chansons pour Vincent Vallières. Tiens donc. Ça augure bien pour la finale…

22h20: La cerise sur le gâteau. Arcade Fire. Tous les huit, tous de noir vêtus. My Body Is A Cage. Empty Room. Wake Up. De la contrebasse, des violons, de l’accordéon, des guitares acoustiques. Régine au piano. Win à la 12-cordes. Des harmonies à 6 voix. L’envie d’en prendre encore deux heures…

À la fin de Wake Up, les artistes encore présents viennent rejoindre notre groupe-joyau sur scène. Louis-Jean Cormier et André Papanicolaou semblent être en train de réaliser un rêve.   N’était-ce pas ce même Louis-Jean qui chantait, sur son nouvel album, ne pas aimer les « happy ends » ?

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