SXSW 2014 – Jour 3 | Soundgarden joue Superunknown et le Québec montre ses couleurs

Il y a 20 ans déjà, Soundgarden marquait un grand coup dans la courte (mais percutante) histoire du grunge en lançant Superunknown, quatrième album du groupe, qui allait trouver son chemin au fil des ans dans la discothèque de près de 10 millions de personnes. Jeudi soir, au iTunes Festival présenté dans le cadre de SXSW, Chris Cornell et sa bande de Seattle interprétaient le mythique album du début à la fin pour la toute première fois en carrière, au ACL Theater.

« J’ai peine à croire que ça fait déjà 20 ans », admettait Cornell d’entrée de jeu. On a peine à y croire aussi. « Je préfère vous avertir : nos guitares sont accordées de façon différente pour chacune des chansons, alors on va changer de guitare entre chaque chanson. On n’avait jamais prévu, lorsqu’on a enregistré l’album, qu’un jour, on le jouerait tel quel, dans l’ordre ».

Et c’est parti : le guitariste Kim Thayil entonne le fameux riff badass de Let Me Drown, et 3500 chanceux – quelques centaines de fans frustrés n’ont pas pu y accéder – laissaient entendre leur satisfaction par une belle chorégraphie d’air guitar. Comme en ’93, mais avec moins de chemises de flanelle.

Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, Chris Cornell possède tout un organe vocal, et Superunknown en tirait profit. La plupart du temps, jeudi soir, il parvenait à atteindre les notes aiguës et élancées des petits défis vocaux qu’il s’était accidentellement laissés vingt ans plus tôt. Quelques écarts ici et là, mais dans l’ensemble, le quasi-cinquantenaire faisait honneur à sa performance de la fin-vingtaine.

Tout comme lors du concert auquel nous avions assisté au Bluesfest d’Ottawa en 2011, les musiciens semblaient un peu statiques, par contre, comme si le coeur n’y est pas totalement. On imagine que le cachet y était, par contre. Et à défaut de ressentir la fougue et l’excitation du groupe (plutôt placide de nature), les phalanges, eux, y étaient, et Thayil brille comme toujours lors de ses fameux solos wah-wahisés qui sonnent comme du Hendrix dans le broyeur.

Évidemment, la foule a entonné le refrain de Black Hole Sun, hit improbable au vidéoclip mémorable, et Spoonman, hit encore plus improbable (et, soyons franc, un peu ridicule). Pas de solo de cuillère, par contre. Aaaaaah…..

Mais c’était également l’occasion de réentendre les petits bijoux stoner rock cachés entre les hits : les Mailman, Limo Wreck et 4th of July. Personne n’était là pour entendre que des hits. C’est Superunknown : un album que plusieurs milliers de personnes ont écouté en boucle, en cassette ou en CD, du début à la fin.

Comme dans le bon vieux temps.

 

Le Québec affiche ses couleurs

Jeudi était également une grosse journée pour les fiers représentants du Québec, à SXSW.

Ça se passait d’abord au Maggie Mae’s, où Envol et Macadam et Pop Montréal présentaient quelques artistes en après-midi, dont l’excellent Alden Penner, la folle gang d’Alaclair Ensemble, la très belle découverte Seoul, les séduisants sons de Thus:Owls, l’excentrique Jef Barbara et Leif Vollebekk, en remplacement de Chevalier Avant Garde, dont le vol aurait apparemment été annulé à Montréal en raison de la tempête.

Tempête, vous dites ? Par ici, on connait pas.

Sur l’heure du souper, la gang de M pour Montréal prenait le relais et attirait les festivaliers non seulement par l’ouïe, mais également par la panse avec un Poutine Party. Frites, fromage, sauce brune. Selon notre sondage maison auprès des Québécois (minoritaires, cela dit) présents, ça méritait un bon 7 sur 10, note fort respectable quand on considère qu’il est impossible de trouver du fromage en grain au Texas. Ça manquait de scoui-scoui, mais bon, dans les circonstances, pas mal du tout.

Cela dit, Black Atlass aussi brillait par son absence pour cause de tempête, mais Foxtrott, Alaclair Ensemble, Random Recipe, Tommy Kruise et Lunice ont pris le relais pour une soirée toute québécoise, présentée par le regroupement Planète Québec.

Du côté du Bethell Hall de l’Église St. David, Opak et Secret City Records présentaient aussi une programmation toute montréalaise avec notamment Maica Mia (qui contient des membres de Godspeed You! Black Emperor), Thus:Owls, Timber Timbre,  et les Barr Brothers en toute fin de soirée.

Au moment de notre arrivée (après Soundgarden), il ne restait plus que ces derniers au menu, et il fallait attendre avant d’entrer dans la salle, puisque le groupe et ses spectateurs observaient une minute de silence pour les victimes de l’accident de la veille (si vous l’ignoriez encore, un chauffard a fauché 25 festivaliers dans la rue fermée à la circulation, causant 2 morts et 23 blessés graves).

Le silence étant une denrée rare à SXSW, on peut déjà parler d’une petite réussite en soi.

Dans la jolie petite salle boisée qui inspire au recueillement, les Barr Brothers ont séduit le public attentif, en dépit de quelques petits pépins techniques. Éclairages tamisés à la bonne franquette et sono minimale, les conditions étaient réunies pour que le charme de la bande opère. Les Barr ont même invité quelques artistes qui s’étaient produit plus tôt dans la soirée à les rejoindre devant pour improviser durant une nouvelle chanson. Une belle démonstration de l’esprit de famille et d’inclusion de la scène montréalaise.

* Merci à LOJIQ pour avoir permis la réalisation de ce reportage.

Photos en vrac
par Marc-André Mongrain

 

L’ACL Theater, où se déroulait le concert de Soundgarden

 

Alden Penner au Maggy Mae’s

 

La devanture du Maggy Mae’s, où Planète Qc présentait ses concerts

 

Leif Vollebekk en remplacement de Chevalier Avant Garde

 

Maica Mia à l’Église St. David