crédit photo: Normand Trudel
Louis-Jean Cormier

Louis-Jean Cormier en toute intimité au Théâtre Petit Champlain | Quand la musique devient refuge

Il y a des soirs où les silences disent tout. Des soirs où une voix, une guitare et quelques confidences suffisent à faire vibrer chaque fibre d’un théâtre.  Mardi soir, dans un Théâtre Petit Champlain qui affichait complet, c’était l’un de ceux-là. Louis-Jean Cormier, seul sur scène dans le cadre de sa tournée Les Entretoits, a livré un spectacle intime et vibrant, entrecoupé de souvenirs, de chansons chéries et de réflexions habitées. Un tête-à-tête avec le public, délicat et généreux, où la musique servait de fil conducteur à une conversation sensible avec la vie.

Dans ce nouveau spectacle solo, l’auteur-compositeur-interprète laisse momentanément de côté ses propres compositions pour visiter celles des autres, des artistes qui ont jalonné son parcours, marqué ses amitiés ou provoqué des révolutions intérieures. Porté par une mise en scène épurée et un éclairage doux qui épouse les silences comme les refrains, l’artiste propose une sorte de pèlerinage musical, à mi-chemin entre la confidence et l’hommage. Le spectateur, convié comme à une veillée au chalet, entre dans son univers par la petite porte du coeur.

La sélection des pièces témoigne d’un amour sincère pour la chanson québécoise et francophone. On y croise notamment Richard Desjardins, Serge Fiori, Martine St-Clair, Malajube, Martin Léon, mais aussi quelques clins d’oeil aux grands disparus, comme Barbara, Félix Leclerc ou Jean-Pierre Ferland. Les chansons sont précédées d’un préambule, parfois drôle, parfois grave, toujours touchant. Car Louis-Jean ne se contente pas d’interpréter; il raconte. L’origine de sa fascination pour une voix, l’importance d’un texte reçu à un moment charnière, les soirées arrosées avec ses comparses musiciens. On sent que chaque reprise est un choix du coeur, un fragment de mémoire partagé avec humilité.

Sa voix, toujours aussi souple et habitée, se fait tantôt caresse, tantôt feu. Sans artifice, il joue avec les silences, étire les notes, ose les respirations longues. Accompagné de sa seule guitare, il explore de nouvelles textures dans ces chansons familières, les habille de sa sensibilité propre sans jamais trahir leur essence. Certaines interprétations touchent droit au ventre, nous offrant une tendresse retenue.

Mais ce spectacle, ce n’est pas qu’une série de reprises habillement ficelées. C’est une conversation à double sens, entre les chansons et les récits, entre l’artiste et le public, entre la mémoire collective et intime. L’humour, subtil et fin, agit comme un baume entre deux élans de nostalgie. Louis-Jean partage avec philosophie le temps qui passe, l’importance d’écouter les autres, la beauté des petites choses qui échappe à ceux qui courent trop vite. Il se moque de lui-même avec une auto-dérision qui le rend immédiatement attachant. Ce n’est pas un show, c’est une bribe de vie partagée.

Le Théâtre Petit Champlain, avec son ambiance feutrée et son acoustique enveloppante, était le lieu idéal pour cette rencontre toute en douceur. Il y avait dans la salle une écoute rare, une attention palpable, comme si le public retenait son souffle pour ne pas perdre une miette. Les applaudissements, sincères et chaleureux, venaient saluer non seulement l’interprète, mais l’homme derrière la guitare.

À deux reprises il a glissé une de ses propres chansons, comme pour rappeler que lui-aussi a écrit des mots qui restent, des mélodies qui accompagnent. Mais loin de chercher à briller, il s’intègre dans une filiation plus large, celle des artisans de la chanson, ceux qui racontent le monde avec une plume fine et une guitare bien accordée.

Ce nouveau spectacle de Louis-Jean Cormier n’est ni un tour de chant classique ni une thérapie déguisée. C’est un geste d’amour. Un hommage à ceux qui l’ont précédé, un cadeau à ceux qui l’écoutent, un pont entre les générations de créateurs. Il y a, dans chaque silence qu’il laisse trainer, dans chaque anecdote qu’il livre à demi-mot, une invitation à ralentir, à se souvenir, à écouter autrement.

À l’heure où beaucoup de spectacles misent sur l’excès et le tape-à-l’oeil, celui-ci rappelle que la beauté peut se tenir dans un soupir, une corde pincée, un regard complice. Et dans une salle suspendue à sa voix, hier soir, il y avait quelque chose de plus grand que soi. Un moment rare, fragile, précieux. À ne pas manquer…

Pour ceux et celles n’ayant pu se procurer des places à son spectacle affichant complet, d’autres représentations sont prévues à travers la province. Les dates et lieux sont présentés sur le site officiel de l’artiste.

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