Compagnie Virginie Brunelle

Les corps avalés de Virginie Brunelle au Théâtre Maisonneuve | Avaler la danse et la musique

La compagnie Virginie Brunelle présentait Les corps avalés au Théâtre Maisonneuve dans le cadre de Danse Danse à la Place des Arts. « Virginie Brunelle est une chorégraphe alchimiste qui se plaît à fusionner symboles, théâtre, narration, mouvements et musique. (…) En empruntant à la danse classique des gestuelles qu’elle s’amuse à salir et à détourner, Virginie Brunelle entraîne le spectateur dans une expérience puissante, immersive et troublante », peut-on lire dans la présentation de son dernier opus. « Salir », vraiment?

*Photo par Llamaryon.

Le mot est mal choisi. Surtout que la chorégraphe tire avantage de la musique sublime du Quatuor Molinari présent sur scène, en retrait des danseurs qui l’ignorent totalement. « Une expérience puissante, immersive et troublante »? Pas tant que ça non plus. Les corps avalés est une courte chorégraphie de 65 minutes, tout juste correcte, mais nous laissant sur notre faim. Il eut mieux valu la raccourcir encore un peu, et ajouter une deuxième pièce, pour que le spectacle soit complet.

Un peuple à fleur de peau?

Dans son mot de la chorégraphe, Virginie Brunelle écrit : « Dans cette œuvre, j’ai voulu mettre en scène les tiraillements d’un peuple à fleur de peau. (…) Cette pièce est le fruit de mes observations d’une société doutant, s’interrogeant, s’extasiant et se désespérant ». Là encore, on ne trouve pas dans ce spectacle une dimension sociétale en perdition, ce qui de toute manière peut difficilement se traduire par la danse.

Les sept interprètes, quatre filles et trois garçons, n’en sont pas moins intéressants sur le plan formel et sa résultante. Ils y mettent tout leur talent pour que la thématique proposée advienne, mais les enchaînements ne coulent pas de source. La gestuelle dans son ensemble se bute à des passages faibles. Comment « s’extasier » en effet, en voyant l’un des danseurs dérouler longuement en fond de scène ce qui ressemble à des pans de gazon synthétique?  Aucun rapport.

*Photo par Vanessa Fortin.

Que des mots…

Surtout que le programme parle de « maelström socio-politique », de « désarroi et de chaos sur fond de résilience et d’espoir ». Que des mots pouvant servir à définir un peu n’importe quoi. Il est d’autant plus navrant de lire dans une entrevue récente à Sors-tu.ca que ce spectacle est le « projet le plus ambitieux » de Virginie Brunelle à ce jour.

La chorégraphe n’en jouit pas moins d’une solide réputation internationale depuis qu’elle a tourné le dos au violon dans son enfance pour s’orienter vers la danse contemporaine et fonder sa compagnie éponyme en 2009. Virginie Brunelle n’est pas Marie Chouinard, ni Édouard Lock, ni Ginette Laurin, ni Jean-Pierre Perreault, mais elle s’est fait remarquer rapidement avec des spectacles forts comme PLOMB en 2014 et À la douleur que j’ai deux ans plus tard.

En 2018, elle a même été invitée à créer un spectacle pour la réputée compagnie Gauthier Dance de Stuttgart. L’œuvre, qui s’est appelée Beating, a été présentée avec succès en Allemagne, puis au Canada.

De chair et d’os

À voir dans Les corps avalés ses danseurs qui s’attirent, s’évitent, se repoussent en se frappant la poitrine et poussant des cris bien sentis, ou fusionnent comme s’ils copulaient sous un éclairage cru, on se sent interpellés, mais pas suffisamment pour que l’œuvre prenne son envol et qu’elle nous atteigne dans un bouleversement émotif par ces corps qui paraissent manquer de chair et d’os.

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