crédit photo: Rose Cormier
Philippe Brach

Francos de Montréal 2024 – Jour 5 | Farouchement Brach et intensément P’tit Belliveau

Soirée écrasante mais musicalement prometteuse mercredi aux Francos de Montréal, alors que Philippe Brach prenait les commandes de la Place des Festivals, et que P’tit Belliveau nous offrait un show surprise, annoncé la veille, au Pub Brasseur de Montréal. Le seul problème, c’est que les deux spectacles se chevauchaient. Pépin typique de festival. Alors on a pris un peu des deux.

« Il fait 42 degrés de ressenti, et vous vous êtes dit : on va aller au pire îlot de chaleur sur toute l’île de Montréal! Belle gang de joyeux débiles! », nous lançait Philippe Brach, visiblement content de voir pas mal de monde réunis sur la Place des Festivals pour le voir et l’entendre. Pas une aussi grosse foule que vendredi et dimanche dernier, mais pour un mercredi soir de canicule record, c’était plus que convenable.

À pareille date l’an dernier, Brach donnait un spectacle surprise dehors à 23h sur une petite scène. Le dernier show des Francos 2023,  mais un premier show depuis presque 5 ans pour Brach. Une parfaite réintroduction, à la hauteur de ce que l’artiste souhaitait, sans doute. Il venait tout juste de lancer, sans crier gare, son nouvel album Les gens qu’on aime. C’était l’année des surprises, et de l’évitement volontaire des grandes attentes.

Il allait de soi qu’en 2024, les Francos allaient lui offrir la grosse scène sur la Place des Festivals, lui qui multiplie les spectacles un peu partout au Québec depuis des mois.

Mais c’était loin d’être évident qu’il allait accepter, lui qui ne semble plus vouloir faire de compromis, faire les gros moves de carrière, accepter les conditions qui ne font pas son affaire. Après être disparu de la mappe pendant presque 5 ans, ça semble de plus en plus évident que Philippe Brach souhaite faire ce métier seulement dans les circonstances qui lui permettront de préserver sa santé mentale et physique, de faire les choses à sa manière.  Pas certain que ce soit tout à fait possible de faire totalement « à sa manière » sur une Place des Festivals…

Qu’à cela ne tienne, on avait droit à un Brach en forme, et il s’était mis à son aise en portant sa plus belle robe de chambre avec des oursons dessus. Par-dessus des bermudas. En pieds de bas. Avec son chapeau garni de taches blanches sur la tête.

Bref, il a accepté de se prêter au jeu des grands événements — rappelons qu’il animera aussi le grand spectacle de la Fête nationale à Laval, dimanche soir, une autre affectation un peu surprenante — , et on était des milliers à apprécier de le voir dans un tel contexte, même s’il répétait fréquemment que tout cela ressemblait davantage à « un gros show de tévé ».

Décidément, il faut en profiter pendant que ça passe, surtout quand on l’entend dire, à la blague mais avec un fond de vérité certain : « C’est trop gros pour moi, ça! C’est la première et dernière fois que je vais jouer sur le gros stage… »  Pas étonnant venant d’un artiste né pour être sauvage, qui admet candidement des choses comme « J’aime les gens, mais pas longtemps… » (dans la chanson Tic Tac).

Évidemment, il a tout à fait le matériel pour le faire. Et le band aussi. Entouré de Gabriel Desjardins aux claviers, de Marie-Anne Tessier à la batterie, Simon Trottier et Guillaume Bourque aux guitares, Lisandre Bourdages aux percussions et Étienne Dupré à la basse, c’est certain que ça peut le faire sur les plus grosses scènes.

Les interprétations de Crystel, Né pour être sauvage et Tic tac justement nous rappellent que peu importe le contexte, Philippe Brach brille sur une scène. Et quand Simon Trottier décide d’électrifier les arrangements de La fin du monde, l’aspect musical accote le format plus grand que nature d’un spectacle à grand déploiement comme celui-là.

Côté mise en scène, la direction artistique était assurée par Laurence « Baz » Morais, qui a fait sa réputation avec des vidéoclips et des productions télé éclatées, justement. Il sait laisser briller les talents, et jouer avec leurs envies de malaises contrôlés, comme il nous en avait fait la preuve lors du brillantissime spectacle virtuel Vivre de Klô Pelgag. Cette fois-ci, l’artiste se mettait lui-même en scène avant l’arrivée de chacun de ses artistes invités en empruntant un ton de présentateur télé qui reprend volontairement sa présentation à plusieurs reprises pour créer un effet comique et déjanté.

Il faut dire que quand l’invité, c’est le tonitruant groupe rock-prog-psychédélique Population II, le contraste entre la présentation à la manière d’un show de variété et l’interprétation furieuse de leur titre C.T.Q.S. crée un effet certain, qui a d’ailleurs laissé la foule médusée.  On se demandait bien ce qui allait survenir comme deuxième invité… et c’était Lisa Leblanc pour Gossip. Un ton un peu plus au diapason de sa présentation variété. Mais on apprécie toujours de la voir sur une scène, évidemment.

Puis, au moment d’interpréter une « une vieille chanson » (« j’espère que vous aimez les ventes de garage parce que j’ai du vieux stock pour vous autres! »), en l’occurence C’est tout oublié tirée de son premier album de 2014, il était environ 22h05 et il était temps d’aller voir ce qui se tramait du côté du Pub Brasseur de Montréal…

P’tit Belliveau en mode broil

Changement total de registre en arrivant à L’Esplanade tranquille. P’tit Belliveau jouait dans les circonstances que Brach aurait sans doute préférées : dans une ambiance de taverne à ciel ouvert, avec une grosse foule compacte et très très très enthousiaste.

À notre arrivée, l’artiste néo-écossais interprétait Mon drapeau Acadjonne vient d’Taiwan et il y avait au parterre devant la scène un mélange de moshpit et de set carré. Avec toute la sueur et la chaleur que vous pouvez imaginer.

P’tit Belliveau et ses musiciens étaient comme des poissons dans l’eau, disposant d’une toute petite heure pour mettre le party dans la place, ce qu’ils ont continué à faire avec une version pratiquement punk des Bateaux dans la Baie avant que Jonah (de son vrai nom) se lance dans la foule en un seul petit pas pour aller thraser avec tout le monde!

Fouki était là, sur le côté de la scène, appréciant visiblement le set de son bon ami. Sans surprise, Comfy allait suivre, avant d’enchaîner avec le nouveau classique bien-aimé des fans de l’artiste, Gros truck, et son fameux alliage de country-folk, d’hyperpop et de nu metal.

Et tant qu’à être dans le nu metal, pourquoi pas y aller avec une petite reprise de Chop Suey! de System of a Down.  Le show venait de prendre un tournant métal.

On comprend tout à fait pourquoi les Francos ont gardé le show de P’tit Belliveau secret : l’artiste, qui se produit désormais en toute indépendance, a annoncé récemment qu’il allait se produire au MTELUS le vendredi 22 novembre. Un jalon important pour un artiste en plein ascension. Mais il ne faut pas se tirer dans le pied avec un show gratuit dans la même ville. « On va remplir le MTELUS de goblins, et on va le faire 100% indépendants, juste nous autres pis vous autres! », lançait-il fièrement. On ne doute pas une seconde que ce sera plein.

Après avoir incité la foule à se rebeller (« Buvez trop de bières! Cassez la loi! Frappez des trous dans des drywalls! »), l’artiste a retraité à l’arrière-scène avant le rappel, au cours duquel ses musiciens ont ramené l’ambiance taverne avec L’arbre est dans ses feuilles, avant de conclure avec les incontournables Income tax et J’aimerais d’avoir un John Deere.

La soirée n’était pas finie pour P’tit Belliveau, qui devait donner un DJ set au Central, juste en face, et qui y a été glorieusement transporté en voiturette de golf, avec un arbuste en plastique et un sac à déchet à ses côtés, comme un héros col bleu.

Après une telle prestation, parions que le bouche à oreille suffira à remplir son MTELUS… et que ça ne sera qu’une première fois!

Photos en vrac

Philippe Brach

P’tit Belliveau

Grille de chansons (Philippe Brach)

La peur est avalanche

Last call

Crystel

Nos bleus désirs

Né pour être sauvage

Tic tac

Le bonheur tousse moins qu’avant

CTQS (Population II)

Soleils d’automne

Alice

Héroïne

La fin du monde

Gossip (Lisa LeBlanc)

C’est tout oublié

Mes mains blanches

Ôk Canada

Révolution

Dans ma tête

Un peu de magie

Bonne journée

 

Sébastien Pedneault – éclairages
Marc St-Laurent – sonorisation

BAZ : directeur artistique

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