Festival International de la Littérature 2017 | Suivez le FIL !
Qui aurait cru que la littérature pouvait se donner en spectacle, que le travail reclus des écrivains soit célébré sur une scène, et que leurs livres viennent interpeler le lecteur en direct, jusqu’à prendre la forme d’un festival annuel faisant courir les foules? C’est pourtant là le défi audacieux que relève le FIL ces jours-ci, sous la direction avisée de Michelle Corbeil, pour la 23e édition de l’événement qui se tient dans une vingtaine de lieux culturels à Montréal du 22 septembre au 1er octobre 2017.
La grand-messe du livre s’est ouverte vendredi dernier au Théâtre Outremont avec l’écrivaine Delphine de Vigan en tandem avec l’auteure compositrice interprète La Grande Sophie, venues présenter une lecture musicale intitulée L’Une & l’Autre où de toute évidence la chimie fonctionne entre les deux artistes françaises.
Leur première rencontre remonte à 2014 dans le cadre d’un autre festival littéraire, celui de Tandem de Nevers. Désireuses de poursuivre l’expérience, les deux femmes ont fait appel au metteur en scène, scénographe et concepteur de lumières Éric Soyer, lequel a souvent travaillé aux spectacles de Joël Pommerat.
Les textes de Delphine de Vigan, qui gagnent à être mieux connus ici, sont extraits de sept romans publiés chez JC Lattès, dont les récents Rien ne s’oppose à la nuit et D’après une histoire vraie. Une réelle osmose artistique se crée sous nos yeux avec les musiques et les chansons de La Grande Sophie qui, par moments, rappellent avantageusement la tessiture de voix de la chanteuse Barbara. En constante interaction, la guitare, le chant et le design sonore de La Grande Sophie nous révèlent les thèmes chers à l’écrivaine que sont l’enfance, la perte de l’innocence, la solitude et le désespoir amoureux.
Le lendemain, au Petit Outremont cette fois, c’était au tour de la comédienne Sylvie Drapeau de se mesurer à l’exploit de lire en entier, pendant trois heures, ses deux courts romans autobiographiques, Le fleuve et Le ciel, publiés récemment chez Leméac Éditeur.
Dans le premier, l’auteure-comédienne qui a incarné une cinquantaine de rôles au théâtre en 25 ans de carrière, raconte la tragédie intime de la noyade de son grand frère adoré dans le fleuve alors qu’elle avait 5 ans. Dans le deuxième roman, comme faisant suite à l’autre, la divine Drapeau s’adresse à son père peintre et à sa mère courageuse en tête de famille qu’elle appelle la meute de petits loups, rejetant en bloc le dogme catho et introduisant l’éveil amoureux. Ses mots coulent, perlent, s’animent par petites touches finement poétiques, et on assiste avec bonheur à la révélation d’une écrivaine vraie qui affirme : « Nous ne sommes que de la vie ».
Lundi soir, à la petite Salle Claude-Léveillée de la Place des Arts, c’était au tour du jeune poète Dany Boudreault de fusionner avec le comédien et musicien Emmanuel Schwartz pour un happening littéraire éclaté qu’ils ont intitulé La fin du monde est une fausse piste. L’écriture de Dany Boudreault puise à tout venant, avec des tournures langagières comme « Veux-moi! » qui étonnent de par leur urbanité très moderne et leurs sonorités protéiformes que la metteure en scène Alice Ronfard a su porter à un paroxysme tout à fait jouissif.
Rempli de promesses
Le FIL, qui se poursuit jusqu’au 1er octobre, regorge de promesses qui s’annoncent comme tenues. À preuve, Larguer les amours qui rassemblera au Cabaret du Lion d’Or mercredi soir un collectif de dix auteures, parmi lesquelles Louise Dupré, Marie-Sissi Labrèche et Nadine Bismuth, comme autant de versions au féminin de la rupture amoureuse. Marie-Thérèse Fortin, Gabrielle Lessard et Marika Lhoumeau liront, sur les musiques de Salomé Leclerc.
Mercredi également, 10 ans après la parution de Aimititau! Parlons-nous! par la poète Laure Morali, un livre événement réunissant pour la première fois la correspondance étalée sur neuf mois entre une trentaine d’auteurs québécois et des Premières Nations, avec une volonté nouvelle de réconciliation, on retrouvera à la Salle Claude-Léveillée quatre duos des auteurs d’alors, parmi lesquels Joséphine Bacon et Jean Sioui.
Jeudi, au Théâtre Outremont, le comédien Alexis Martin mettra en lecture son adaptation de Salut Galarneau!, 50 ans après la parution en pleine Révolution tranquille du célèbre roman de Jacques Godbout. Deux générations de comédiens, Pierre Curzi et Benoit Drouin-Germain, ramèneront le vieil autobus converti en stand à hot dogs et à patates frites graisseuses par le personnage typé de François Galarneau qui finira par vouloir construire un mur autour de sa maison pour se couper du monde, et écrire.
Au nouveau Livart, rue Saint-Denis, pendant tout le festival, cinq comédiens dont Benoît McGinnis, et Paul Savoie qui en a eu l’idée originale, mêlent leurs voix sous la direction de Catherine Vidal pour démêler justement l’énigme du grand écrivain portugais Fernando Pessoa ayant écrit sous quatre noms différents (mais est-ce bien le cas?) dans la Lisbonne des années 30.
Samedi, 30 septembre, à la Cinquième salle de la Place des Arts, la création de Et si notre vie était une fête?, d’après une idée originale de Michelle Corbeil, Arthur H et le poète haïtien James Noël qui en signe la mise en scène, se voulant un spectacle littéraire autour de Montréal, Paris et Port-au-Prince, réunira sur la même piste 11 écrivains de ces trois pays aux réalités différentes. Le nouvel « immortel » Dany Laferrière sera du nombre, de même que Monique Proulx, Michel Vézina et quelques invités surprises ayant tous en partage leur amour de la langue française.
Panoplie d’activités
Avec le menu copieux de tous ses spectacles et concerts littéraires, ses partys de poésie, ses expositions et ses installations littéraires, ses rencontres avec les écrivains, sa bibliothèque et ses escouades littéraires aux Jardins Gamelin, ses quartiers littéraires dont un déambulatoire par une dizaine d’écrivains et d’artistes, comme Jean-Paul Daoust, Debbie Lynch-White et Pascale Montpetit qui investiront des lieux publics et des commerces de la rue Wellington à Verdun, ou encore un match d’improvisation littéraire au parc Bonheur d’occasion à Saint-Henri, et des prescriptions littéraires au Marché Atwater avec la participation des comédiennes Angèle Coutu, Marie Eykel, Ève Landry et Catherine Trudeau.
Et ce, sans oublier les événements spéciaux du FIL, comme le Café philosophique pour souligner les 40 ans de la fondation de l’UNEQ, ou le Souper littéraire dégusté à l’aveugle au restaurant O’Noir sur la rue Prince-Arthur Est en compagnie des mots de huit écrivains interprétés par des noms aussi inattendus que la comédienne Béatrice Picard.
Plus que jamais cette année, on peut vraiment dire que le Festival international de la littérature a le grand vent du large dans ses voiles.
Le FIL se tient du 22 septembre au 1er octobre 2017. Détails par ici.
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