crédit photo: Pierre Langlois
Feist

Feist au MTelus | L’intimité rock

Vendredi soir se tenait un party de gang, une fête qui réunissait des personnes qui ne s’étaient pas vues depuis un bout, mais qui avaient bien hâte de jaser. Cette sacrée belle soirée, tranquille et décontractée, puis festive et définitivement enlevante, était orchestrée en paroles et en chansons par nulle autre que Feist. La chanteuse canadienne, de passage au MTelus dans le cadre de sa tournée Multitudes avait envie de partager sur tout, sur rien, de prendre des nouvelles de son public montréalais, et de lui montrer que l’émotion qu’elle transmet est toujours la plus transcendante.

À 20 h pile, une silhouette s’avance au travers de l’audience pour prendre place au centre de la fosse. Feist a demandé à fermer le balcon pour inciter les gens à venir autour d’elle. Armée de son humour, de sa collection de guitares et de sa voix cosmique, elle a décidé de se livrer à un exercice plus intime. Ce qui est magnifique, c’est de voir qu’elle prend autant de plaisir que nous dans cette proximité inattendue. Bien des artistes se sont essayés à créer une ambiance chill, mais rares sont ceux ou celles qui ont réussi à le faire avec autant de naturel et d’aisance que la chanteuse, qui en quelques minutes seulement, échangeait des blagues avec l’auditoire, comme le feraient de vieux chums.

Et c’est bien là le message qu’elle a véhiculé subtilement pendant toute la durée du spectacle : elle sort d’une période particulière – la naissance de sa fille et la perte de son père – et a envie d’être avec des proches et de savoir qu’au-delà des difficultés, un lien demeure. Alors que sa tournée porte le nom de son album Multitudes paru en 2021, Feist nous a emporté·e·s avec elle dans une nostalgie bienfaisante, en interprétant – certes des nouveautés extraites de cet album – mais surtout des classiques qui nous rappellent pourquoi sa musique nous fait autant de bien. Entre discussions impromptues et solos minimalistes, elle a ainsi mis l’accent sur des morceaux tranquilles, notamment avec A Man Is Not His Song, The Bad In Each Other, Century, The Redwing, et une chanson dédiée à sa fille.

Histoire de nous montrer une autre facette de son énergie, Feist a ensuite traversé la foule au rythme de I Took All of My Rings Off tout en délicatesse pour rejoindre le stage. Un grand rideau est tombé pour laisser place à son band, et à un registre résolument plus rock, dans lequel on s’est rappelé que cette femme à la voix si caressante peut aussi être une bête de scène, capable d’offrir des rifts de guitare bien sentis. My Moon my man a lancé cette deuxième partie plus classique en matière de performance, avec des éclairages rythmés et entourant d’un charisme hallucinant la silhouette de la chanteuse.

Parmi les passages forts, I Feel It All, 1234 dans une reprise plus sombre et How Come You Never Go There marquent particulièrement.

Côté scénographie, on retient ce téléphone embarqué qui a filmé le spectacle à la manière d’un clip, dont l’esthétisme rappelle celui utilisé pour son dernier album. Profondeurs de champ, incrustations ou simples échanges avec la foule, ce montage faussement désinvolte a ainsi mis en évidence – entre autres – des photos personnelles du public lors des moments plus recueillis, pour ensuite capter l’aura de la chanteuse, avant de revenir prendre le pouls de la salle.

Afin de boucler la boucle et de finir ses retrouvailles en douceur et en communion, Feist est redescendue dans la fosse pour interpréter Of Womankind, dissimulée sous un drap vert pour poursuivre le jeu d’effets visuels avec la caméra.

Impossible de ne pas parler de ce cahier, négligemment apporté par son acolyte caméraman en milieu de show. Prétextant être tombé dessus presque par hasard, il le donnera à la chanteuse, qui n’arrivera pas à trouver l’inspiration pour écrire un mot à son ou à sa propriétaire, non identifié·e à ce moment. Coup monté bien sûr, car c’est sur le magnifique texte de Love Who We Are Meant To, que le caméraman finira par tourner les pages du dit cahier, et par nous dévoiler les paroles de cette chanson, comme conclusion un événement vraiment particulier

Feist a donc réussi a évolué dans un univers intime et personnel, mais aussi spectaculaire, nous emportant toujours avec elle et son aura, définitivement unique, à l’image de sa prestation et l’expérience vécue par une grande majorité ce soir-là : « Un, deux, trois, quatre. Dis-moi que tu m’aimes encore plus ». Sans aucun doute Leslie.

 

Photos en vrac

Vos commentaires