Critique | Klô Pelgag en ouverture de Coup de coeur francophone
Décors obliques, ornements tortueux, chapeaux haut-de-forme, bananier qui descend du plafond… Décidément, Klô Pelgag s’en est donné à cœur joie dans la mise en scène jeudi soir, à l’occasion du spectacle d’envoi de Coup de cœur francophone au Club Soda. Retour sur une grande épopée.
Le Club Soda tire vers le sold-out ce soir. La file à l’extérieur pourrait toucher la Belle Province si les feux de circulation n’avaient pas été ce qu’ils sont.
C’est donc avec un peu de retard que le toupet légendaire de Catherine Pogonat s’amène sur scène pour nous présenter l’inclassable Klô Pelgag qui, entre ses tournées françaises à n’en plus finir, a trouvé le moyen de venir nous rendre visite pour ouvrir le Coup de cœur francophone.
Avant, par contre : la douce folie passagère de son frère Mathieu Pelgag qui, avec la main forte de Sylvain Gabatine, nous présente le projet Glenda Gould, une relecture fantaisiste néo-ambiante des œuvres considérables de Bach, Ravel, Stravinsky, entre autres.
Flanqués d’un couvre-chef de loup et de souris, les deux pitonneux livrent une performance agréable pour ceux qui aiment la cacophonie synthétique outrancière, alors que le Serge bedonnant des Hôtesses d’Hilaire se joint au duo pour manger du spaghetti en les fixant à répétition. Grandiose.
«J’ai hâte que ça finisse», clame un spectateur pas très patient qui, au lieu de se sentir investi d’une émotion digne de ce mélange musical rocambolesque, préfère parler à ses CONvives.
Salut Bonjour et c’est parti…
Le rideau s’ouvre : le généreux house band de sept musiciens se dévoile sous les douces notes d’une version psychédélique du thème de Salut Bonjour. Gino Chouinard aurait apprécié, sans doute.
D’emblée, le décor impressionne dans sa tenue dépareillée, inclinée sur les bords, penchée dans tous les sens, constituée de tôles, de fils pendants et de beaucoup d’autres excès. L’inspiration de la soirée : le film expressionniste allemand Le Cabinet du Dr Caligari, une oeuvre sombre et avant-gardiste des années 1920 qui a notamment inspiré l’entière existence de Tim Burton.
Dans cet univers singulier, disparate, Klô éclot avec son chapeau haute forme et son manteau bourgogne. Une pièce inconnue du grand public pour débuter, Incendie, histoire de mettre le feu aux planches. «Wow, merci d’être là», s’exclame-t-elle, après coup, abasourdie par la généreuse ovation. «On va poursuivre en chanson avec cette chanson-là !»
Cette «chanson-là», c’est Les Corbeaux, magnifique résonance enivrante aux violons ressentis. Posée dans son interprétation, Klô laisse tout doucement entrevoir son impétuosité en fin de chanson, et c’est à ce moment bien précis qu’un bananier descend d’un fil accroché au plafond.
Belle incongruité.
Puis, Klô se confie :«J’ai jamais le plus beau costume du party ! C’est très décevant parce que ça me fait douter de mon imagination.»
«Mais bon, c’est pas grave… Appréciez la peau des gens autour de vous», conclue-t-elle, avant d’enchaîner avec Le Dermatologue et son gracieux hautbois au mystère ténébreux. Dans un élan de distraction, on se rend alors compte que le contrebassiste est en boxer ou, pire, en mini-culottes de lycra pour vélo.
Après Le Tunnel et Rayon X, dédié à Pierre et Marie Curie, le frère de Klô reçoit des éloges saisissants de la part de sa sœur. «Mon frère s’amusait à me lancer dans un chariot. Il m’a fracassé la tête plusieurs fois. Plusieurs femmes l’adorent», avance la chanteuse, amorçant la céleste ballade à la guitare Le soleil incontinent.
Tour de magie, acrobaties, entracte, costumier, Gerry Boulet
Pendant Le Trône, on a droit à tout un tour de magie digne de Messmer : Klô entre dans une boîte noire que son contrebassiste scie avec justesse au milieu.
Puis, un remix électro funky de Taxidermiste, ponctuée d’une bataille entre un bubblehead géant de Michael Jordan et Beethoven (ou Bill Clinton mélangé avec Guy Lapointe).
Après autant de stepettes et d’acrobaties contrôlées, l’entracte sera bien méritée. La deuxième partie s’amorce avec La neige tombe sans se faire mal et Pegase, une réinterprétation de Thomas Fersen. Un bébé plante arrive sur scène, et Klô donne des bouchées de banane à ses musiciens. «On n’est pas sûr du décor. C’est un ‘’work in progress’’ comme ils disent en Angeleterre», souligne-t-elle, justement.
Dans un moment de monologue théâtral exploratoire, le contrebassiste en lycra traduit dans un français aux effluves espagnols approximatifs les interventions de Pelgag. «J’aime le badminton. Je suis très intéressée par les insectes. Une fois, j’ai gagné un tournoi de ping-pong. Mon grand-père était soudeur», scande-t-il, avec candeur.
Tout ça pour dire que le dernier droit est entamé : la poignante Nicaragua, l’émouvante Le Silence épouvantail et, bien sûr, Comme des rames, «une chanson d’amour pour tous les amoureux» même si on en doute.
Une main d’applaudissement bien soutenue pour le costumier de Radio-Canada, qui a prêté les princiers costumes, puis La fièvre des fleurs, chantée à l’unisson. En guise de remerciements, Klô s’attèle à la confection d’un jus maison en malaxant des céleris et des carottes. Un goût exquis.
Comme si ce n’était pas assez, le rappel nous ramène le Serge des Hôtesses d’Hilaire, sans spaghat cette fois, le temps d’une jouissive version des Yeux du cœur. Serge en profite pour péter une bouteille sur la tête à Klô, qui semble mièvrement abasourdie.
Quelques séquelles plus tard, la révélation 2014 du Gala de l’ADISQ nous quitte avec Tremblements, une vieille pièce triste qu’on découvre non sans émotions.
Bref, fallait y être.
- Artiste(s)
- Klô Pelgag
- Ville(s)
- Montréal
- Salle(s)
- Club Soda
- Catégorie(s)
- Chanson, Pop,
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