Arno

Arno à Montréal et Québec: Entrevue avec l’artiste

Non, je ne veux pas travailler…

Arno vient terminer sa tournée Brussld au Québec avec 2 concerts: un premier ce soir (jeudi 10 novembre) à l’Astral, à Montréal, dans le cadre de Coup de coeur francophone, puis demain (11 novembre) au Théâtre Petit Champlain, à Québec. Sors-tu.ca a profité de la visite de l’irréductible rockeur belge pour le rencontrer et mesurer toute la fougue et la folie qui l’animent encore à 62 ans!

Photo par Marc-André Mongrain

On le compare souvent à Tom Waits ou Jacques Higelin ou Tom Zé, mais en réalité, Arno n’a que quelques traits de surface en commun avec ses contemporains: une voix rauque, une sale gueule et un esprit libre qui donne lieu à de la musique déglinguée, sauvage, imprévisible.

Ça et quelques influences communes: Captain Beefhart, Howlin’ Wolf, Lightnin’ Hopkins, le delta blues. « La première fois que j’ai écouté Howlin’ Wolf, j’avais 15 ans et je me suis dit: ‘Je veux être musicien et je veux ne pas travailler’, lance-t-il en riant. Et c’est grâce à eux que je n’ai jamais travaillé de ma vie ».

Si Arno admet candidement avoir été musicien toute sa vie pour éviter d’occuper un vrai boulot, ça ne veut pas dire qu’il chôme pour autant. Brussld, qui est paru au printemps 2010, est son 18e album et le vieux rocker ne démontre aucun signe de baisse de créativité.

Lorsqu’on lui demande ce qu’il fera à son retour à Bruxelles après ce point final à sa plus récent tournée, il répond du tac au tac: « Je suis en train de faire des nouvelles chansons ». Des détails? Là, ce serait trop demander. « J’aime pas parler de ça, j’aime le faire », lance-t-il en soulignant qu’il allait « travailler avec d’autres musiciens ». Notez le choix de verbe…

« Je n’aime pas le passé »

S’il n’aime pas parler des nouvelles chansons qui verront le jour prochainement, c’est dans cet esprit très axé sur le présent qu’on lui connait. Arno se revendique anti-nostalgique . « J’utilise le passé, mais je n’aime pas le passé. Ni le future, non plus. C’est aujourd’hui, rien d’autre », affirme-t-il, sourire aux lèvres.

Qu’il le veule ou non, son passé le rattrape de toute façon, ne serait-ce que par le biais d’artistes actuels qui reprennent ses chansons. Ils sont nombreux à le faire: Stromae s’amusait avec Putain Putain récemment pour en faire une version dance, alors que Philippe Katerine reprennait d’étrange façon Dans les yeux de ma mère sur son plus récent album de reprises. Que ce soit dans leur langue originale ou traduites en diverses langues, ses chansons inspirent des artistes des générations avant la sienne. « C’est bizarre. Ça me flatte mais c’est surréaliste. Je ne dis pas que c’est mauvais, je n’arrive juste pas à comprendre ».

Aussi moderniste se proclame-t-il, Arno ne puise pas chez les jeunes artistes pour créer, il estime même que peu d’entre eux font preuve d’originalité. Parmi ces rares perles, on retrouve un petit groupe de par chez nous. « Je ne suis pas influencé par ce groupe du tout, mais j’adore Arcade Fire, depuis Funeral. Ce n’est pas rétro, il font leur propre mélange et c’est bien. Plein de groupes font comme dans les années 1980, ou comme les années 1960 ou les seventies. Moi, ça ne m’intéresse pas. Je cherche des trucs différents, comme Holy Fuck, tu connais? », interroge-t-il au sujet de la formation torontoise. Il cite également Animal Collective parmi les artistes qui innovent, à son avis.

 

Bruxelles, Beyrouth, Montréal

À défaut de s’inspirer de ce qui se fait en musique, Arno puise son inspiration chez les gens et les lieux. À ce sujet, Arno énumère 3 villes qui le branchent plus que tout au monde: Beyrouth, Montréal et sa ville, Bruxelles.

On devine d’ailleurs que c’est de sa ville qu’Arno est allé chercher le titre de son plus récent album, Brussld. La chanson (presque) titre, Brussels, parle d’ailleurs de ce lieu en évoquant une fête nocturne dansante. La chanson est presque une ode à la variété dans un heureux mélange d’anglais, de français et de sonorités arabes. « J’ai voulu intégrer ce que je retrouve à Bruxelles. J’habite là-bas, et quand on dort avec un chien, on attrape ses puces ».

Au fond, Arno puise dans tout, s’inspire de ce qui le secoue, et sa capacité d’émerveillement n’a rien de celle du sexagénaire moyen. « Ma vie, c’est d’être étonné par un truc. Par exemple, quand je vois une demoiselle avec des fesses d’extra-terrestre, je suis heureux. Tu vois le bazar? ».

Les trois endroits fétiches d’Arno ne sont peut-être pas voisins, mais ils partagent une hétérogénéité qui plait au rockeur belge, qui passe de l’anglais au français dans la vie comme en musique. « Chez nous, on parle 4 langues: français, flamand, anglais et arabe. Moi ça me plait. C’est comme aller sur les plages de Beyrouth: on peut voir une dame en burqa juste à côté d’une autre en monokini, tu vois le bazar? ».

« À Montréal, vous avez le français et l’anglais et toutes ces communautés. Et puis vous avez le cul entre 2 chaises: l’Amérique et l’Europe. Vous en avez de la chance! ».

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