À la douleur que j’ai de Virginie Brunelle | Le verre à moitié vide ou à moitié plein?

On dit de Virginie Brunelle qu’elle est l’emblème de la jeune création en danse. Elle n’avait cependant rien offert de significatif après Foutrement en 2012, qui l’avait avantagée auprès des amateurs de la planète danse. Voilà qu’elle s’amène à l’Usine C, en co-présentation avec l’Agora de la danse, avec un sextuor de quatre danseuses et de deux danseurs pour le spectacle qu’elle a intitulé À la douleur que j’ai. Mais quelle douleur?

Les six danseurs évoluent dans une grande aire ouverte, avec le mur de brique original de l’ancienne manufacture de biscuits comme fond de scène. Pour tout décor, une chaise noire de taverne placée au centre. Une chaise qui à certains moments deviendra comme un septième danseur, tant elle sera déplacée et fera corps avec eux sur ce plateau autrement nu.

« Qu’est-ce que le spasme de vivre, à la douleur que j’ai, que j’ai ?», du poème Soir d’hiver d’Émile Nelligan, dont elle s’est inspirée jusqu’à l’utiliser dans le titre de sa chorégraphie, Virginie Brunelle nous place devant le nœud gordien du verre à moitié vide ou à moitié plein. Car si l’on retirait l’immobilité, le statisme et les longs silences, son spectacle durerait 30 minutes plutôt qu’une heure.

L’expression de la douleur passera brièvement par les pleurs d’une des danseuses, et le cri muet d’une autre. Il faudrait davantage parler de mal de vivre, de mélancolie, de nostalgie ou de tristesse, choses de la condition humaine que nous ressentons tous.

Même les costumes sombres et amples des danseurs ne parviennent pas à nous toucher, dépourvus qu’ils sont de toute forme de sensualité.

Le langage chorégraphique de Virginie Brunelle, bien qu’original, est souvent répétitif, inégal, comme en manque d’inspiration. Cette densité du vide minimaliste, alors que les danseurs sont statufiés la moitié du temps, ou bien fréquentant le tapis, n’apporte pas la charge d’émotions qu’elle le pourrait. Exaspérés par l’inaction, les silences à répétition et la lenteur ambiante, certains spectateurs quittent avant la fin du spectacle.

La chorégraphe, qui est également musicienne depuis son enfance, trouve son point fort dans le choix des musiques. Du Satie, des airs d’opéras, la Callas et autres, tous issus du répertoire classique, et qui ne lui font pas peur. Au contraire, l’apport salvateur de la musique dans À la douleur que j’ai est du côté moitié plein.

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