Saison 2018-2019 de La Licorne | La dernière dirigée par Denis Bernard sous le signe « RIEN DE FAKE »!

La nouvelle a causé la surprise générale. Après avoir présenté aux médias le contenu prometteur de la 38e saison de La Licorne, le directeur artistique Denis Bernard a dévoilé que ce serait sa dernière. Dans l’air du temps, son ultime programmation a été communiquée comme n’ayant « Rien de fake », dans les deux salles de La Licorne qui offriront pas moins de 15 spectacles de théâtre.

« Ça va me faire 10 ans à ce poste-là, confiait ensuite Denis Bernard, et j’ai toujours pensé qu’après 10 ans d’une même direction artistique, le théâtre devait suivre le courant avec des idées neuves. Les compagnies sont en continuelle mouvance, ça bouge tout le temps. J’ai fait ce que je voulais faire, le feu est encore là mais je suis rendu ailleurs. »

Il faut dire que c’est lui et Jean-Denis Leduc, son prédécesseur, qui ont construit le théâtre actuel sur l’avenue Papineau, avec la noble mission de faire découvrir la parole de nouveaux auteurs. « J’ai voulu faire de La Licorne un endroit citoyen, une place publique où les gens se reconnaissent, avec une circulation réelle et palpable entre les artistes et le public », a continué Denis Bernard en ajoutant avoir le sentiment d’y être arrivé.

On a mis plusieurs auteurs au monde, en prenant des risques. Je pense à un artiste comme Fabien Cloutier qui est arrivé ici, on ne le connaissait pas, mais maintenant au bout de cinq projets, il est devenu ce qu’il est. Et je suis particulièrement fier aussi d’avoir créé une équipe d’auteurs dramatiques en résidence à La Licorne.

Fabien Cloutier présentera d’ailleurs en octobre sa pièce la plus récente, Bonne retraite, Jocelyne, qu’il mettra en scène en dirigeant Josée Deschênes et Brigitte Poupart, entre autres. On assistera à la dérive d’une rencontre familiale se transformant en tribunal populaire avec un humour qui s’annonce cinglant. Fabien Cloutier en a parlé comme d’un univers « hyper individualiste où les personnages vont se briser, et où les couteaux volent haut autant que bas. » Une production de La Manufacture, la compagnie fondatrice de La Licorne qui s’adjoindra le Théâtre du Trident à Québec et le Théâtre français du CNA à Ottawa.

Les deux autres productions pour la 43e saison de La Manufacture, seront La Queens’, une histoire de chicane autour de l’héritage familial d’un hôtel-motel imaginée par Jean Marc Dalpé, un habitué des lieux en tandem gagnant dans le passé avec le metteur en scène Fernand Rainville qui dirigera entre autres David Boutin, Marie-Thérèse Fortin et Dominique Quesnel.

L’autre production maison sera Des promesses, des promesses, un solo de l’auteur écossais Douglas Maxwell traduit par Maryse Warda. Il s’agit d’une reprise à La Petite Licorne mise en scène par Denis Bernard, avec Micheline Bernard, lauréate en interprétation aux Prix de la critique. La comédienne aimée du public sera à nouveau Miss Brodie, une enseignante qui raconte sa relation trouble avec une jeune Somalienne refusant de parler.

 

Collaborations

Autre raison d’être de La Licorne, les codiffusions dans ses deux salles avec de petites compagnies sans domicile fixe, comme Nuages en pantalon, Urbi et Orbi, Pas de panique, Théâtre de la Marée Haute, Tôtoutard, Le projet Bocal, Théâtre Bistouri, ou encore Théâtre Hareng rouge.

Même Spectra Musique, avec L’origine de mes espèces, viendra produire une création, texte et chanson, de Michel Rivard qui sera dirigée par Claude Poissant. C’est un retour au théâtre pour Rivard qui a commencé sa carrière sur les planches dans les années 1970 avec son collectif La Quenouille bleue. Sa dernière incursion remonte à une quinzaine d’années avec Les variations énigmatiques d’Éric-Emmanuel Schmitt au TNM avec Guy Nadon.

« C’est moi qui ai provoqué cette occasion de revenir squatter le monde du théâtre, confie Michel Rivard. J’ai senti le désir d’écrire un spectacle de parole pure et de disséminer quelques chansons à l’intérieur.

« Je suis très préoccupé par le sujet de mes origines, de la rencontre de mes parents jusqu’à moi, poursuit-il. Dans ce spectacle, mon humour est là quelque part, mais ça ne se veut pas comique. Avec une touche d’absurde, je traite d’une matière brute qui est très personnelle et importante pour moi. C’est une réflexion comme en clin d’œil à Darwin : au lieu de la théorie de l’évolution, c’est la théorie de mon évolution », conclue le fils du grand comédien Robert Rivard qui, comme Gaëtan Labrèche ou Jean-Louis Millette, nous ont quittés bien trop jeunes.

Le nom de Mathieu Quesnel, auteur, metteur en scène et comédien, revient à quatre reprises dans la programmation annoncée. À commencer par Je suis mixte, une création qu’il assumera à lui seul à La Petite Licorne avec Yves Jacques, Benoît Mauffette et Navet Confit dans la distribution. « C’est un peu gênant, dira Mathieu Quesnel, mais je suis beaucoup dans la création, et je reste associé aux deux auteures Nathalie Doummar et Amélie Dallaire. J’ai déjà écrit une douzaine de courtes pièces dans le passé, mais c’est la première fois que l’une sera jouée. J’en ai deux autres que j’aime particulièrement et que je voudrais bien voir présentées un jour… »

Il ne faudra pas manquer en début de cette saison le tandem Émilie Bibeau avec un premier texte et Sophie Cadieux à la mise en scène pour Chroniques d’un coeur vintage (Les mots des autres). Ni ensuite Perplex(e) montée par Patricia Nolin. Ni Cr#%# d’oiseau cave, une déconstruction en règle de La Mouette de Tchékhov sur une musique de Mara Tremblay. Ni encore La maison aux 67 langues, un texte intrigant du Canadien Jonathan Garfinkel traduit par François Archambault et qui propose sur un ton singulier une nouvelle perspective au conflit Israël-Palestine.

Enfin, au détour du temps des Fêtes, La Licorne ramènera la formule d’appropriation d’un de ses quartiers avec Foirée montréalaise. Après les arrondissements de Saint-Laurent, du Sud-Ouest et de Montréal-Nord, ce sera au tour du Plateau Mont-Royal d’être livré en pâture par neuf auteurs aguerris sous la direction de Martin Desgagné, pour en arriver joyeusement à transformer cette matière tangible en la magnifiant par le théâtre.

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