Rosalie Vaillancourt

Rosalie Vaillancourt à la salle Albert-Rousseau | La tournée MILF qui s’achève dans l’amour, les rires et l’authenticité

La boucle est presque bouclée. Après plus d’un an à remplir les salles du Québec, Rosalie Vaillancourt foulait une dernière fois, le 17 octobre, la scène de la Salle Albert-Rousseau, la même où son spectacle MILF avait pris son envol en avril 2024. Entre-temps, la jeune humoriste est passée du statut de révélation à celui d’incontournable. MILF a récolté les honneurs, décroché le trophée du Spectacle d’humour de l’année au Gala Les Olivier, et fait rire, aux larmes, des dizaines de milliers de spectateurs. Plus qu’un succès, c’est un phénomène.

Et pour cette dernière à Québec, tout y était : la fébrilité d’une fin de parcours, la chaleur d’une salle comble et cette tendresse particulière qui s’installe quand un artiste, au sommet de sa tournée, ose encore se montrer aussi vrai, aussi humain.

Rire de soi pour mieux se comprendre

Sur scène, Rosalie Vaillancourt n’a jamais été aussi libre. Dans MILF, elle parle d’elle, de ses maladresses, de sa dyslexie, de sa jalousie envers sa sœur, de son couple, de la maternité, de son corps, de son notaire, et même de son amour pour IKEA. Rien n’échappe à son regard, ni ses complexes ou ses contradictions. Ce qu’elle offre, c’est une forme d’humour sans filtre, où la vulnérabilité devient une force, où le rire devient un outil de guérison collective.

Dès son entrée, la salle se lève. Ovation spontanée avant même qu’un mot soit prononcé. Parce qu’au-delà du personnage public, c’est la femme que le public applaudit. Celle qu’il a vue grandir, douter, se relever, s’assumer. Celle qui transforme les petits drames du quotidien en éclats de rire contagieux.

Rosalie se présente comme elle est : une mère, une amoureuse, une fille, une artiste imparfaite qui apprend encore à jongler avec tout ça. Elle parle de son accouchement avec une exagération délicieusement assumée, transformant la douleur en rire et l’expérience en un moment d’anthologie, confie qu’elle a tout aimé de la maternité, nous montre une grande affiche d’elle, seins énormes, gorgés de lait, dans une image à la fois drôle, percutante et terriblement humaine, tout ce qu’elle est, en fait. Dans la salle, ça rit, mais ça émeut aussi. Parce qu’au fond, c’est ça, Rosalie : une façon unique de faire cohabiter la douceur et la folie, la pudeur et l’audace, l’amour et l’autodérision.

Entre sincérité et irrévérence

Le ton est cru, mais jamais gratuit. Elle parle de son père, juge de profession, qu’elle traitait plus jeune de « SPM, syndrome du pénis mou ». Elle évoque sa mère, ses sœurs, les contradictions d’une vie qu’elle apprivoise toujours à travers la scène. Elle tourne en dérision son TDAH, qu’elle renomme « trouble du déficit de l’attention hypersexualisé », imite un lave-vaisselle, raconte la garderie de sa fille, où « les enfants apprennent l’anglais et l’espagnol parce que les éducatrices ne savent pas parler français ». Et, chaque fois, le rire fuse, mais jamais sans fond.

Car derrière la blague se cache un regard lucide sur le monde, sur la charge mentale, sur le jugement, sur la performance, sur la façon dont les femmes se redéfinissent à travers leurs multiples rôles. Rosalie en parle sans se prendre au sérieux, mais avec la clarté de celle qui a appris à s’aimer telle qu’elle est.

Il y a dans MILF une authenticité rare, cette impression d’assister à quelque chose d’intime, presque familial. Quand elle demande au public d’où il vient, quand elle taquine une spectatrice de Sillery, quand elle rit de ses propres lapsus, elle ne joue pas : elle partage. Et c’est cette proximité, cette chaleur spontanée, qui rend le spectacle si précieux.

Une salle comble, un amour réciproque

Neuf représentations à guichets fermés à la salle Albert-Rousseau. Des foules debout, des éclats de rire à répétition, des applaudissements qui durent plus longtemps que certains numéros. Hier soir, l’humoriste l’a dit elle-même : c’est sa salle préférée. Et ça se sent.

MILF, c’est plus qu’un spectacle d’humour. C’est un moment de communion, une conversation sans filtre entre une artiste et son public. Rosalie s’y livre sans armure, parle d’amour, de désir, de maternité, de corps qui change, de cette tête qui déborde, et de ce cœur qui n’a jamais cessé de vouloir faire rire. Elle confie vouloir avoir un autre enfant après sa tournée, puis, dans un éclat de lucidité et d’humour, ajoute que c’est elle qui a demandé son chum en mariage.

Et quand vient le moment de la conclusion, elle remercie le public d’avoir suivi cette aventure. Puis, avec ce clin d’œil qu’on lui connait, elle lance : « si vous avez pas aimé ça, dites juste que vous êtes allés voir Kat Levac et que c’était pas bon. » Toute la salle éclate de rire. C’est ça, Rosalie : une parfaite maîtrise du ton, de l’autodérision et de la tendresse.

Une artiste au sommet de son art

Au fil de cette tournée, Rosalie Vaillancourt a prouvé qu’elle n’était plus seulement « prometteuse ». Elle est devenue une voix majeure de l’humour québécois. Avec MILF, elle a vendu plus de 95 000 billets, raflé les honneurs et trouvé un juste équilibre entre humour populaire et propos personnel.

Ce spectacle, c’est un manifeste de sincérité et d’audace. Une déclaration d’amour à la vie, dans tout ce qu’elle a de chaotique et de magnifique. Une œuvre où l’humour devient une arme douce, un baume sur les blessures ordinaires, une célébration du fait d’être, tout simplement, humaine.

Rosalie Vaillancourt n’a plus rien à prouver, mais elle continue de tout donner. Sur scène, elle respire la gratitude, l’énergie et la liberté. Et c’est sans doute pour ça qu’on l’aime autant : parce qu’elle n’essaie jamais d’être parfaite, juste vraie.

La première partie : Simon Boisvert, l’audace désinvolte

Avant que Rosalie n’entre en scène, c’est Simon Boisvert qui a chauffé la salle. Et il le fit avec un aplomb irrésistible. « Applaudissez si vous ne me connaissez pas », lance-t-il d’entrée de jeu. Toute la salle applaudit, évidemment. Le ton est donné.

Fils de riche autoproclamé, il joue avec les malaises, bouscule les codes, se moque des « pauvres », ceux qui ont des piscines hors terre, parle des nouveaux Froot Loops « couleurs CHSLD », mime une drague au revolver et raconte ses anecdotes de tournée, comme le public féminin de Beauce qui montre ses seins. C’est cru, assumé, parfois grinçant, mais toujours efficace.

Son humour, volontairement provocateur, trouve sa place en contraste avec celui de Rosalie : là où elle touche par sa candeur, lui fait rire par son cynisme. Ensemble, ils forment un duo de tournée improbable et parfaitement complémentaire. Simon Boisvert, dans ce rôle de premier acte, incarne une nouvelle génération d’humoristes qui n’a pas peur du ridicule ni du risque, et qui réussit, par son impertinence, à mettre le public dans un état d’ouverture totale avant le grand numéro.

Une tournée qui s’achève, mais qui laisse sa trace

Il reste encore quelques représentations avant le fin de MILF:

• 18 octobre 2025 — Brossard, Théâtre Manuvie

•22 octobre 2025 — Joliette, Centre culturel Desjardins

•30 octobre 2025 — Saint-Eustache, Zénith Promutuel Assurance

Trois dernières dates pour clore un chapitre éclatant de la carrière de Rosalie Vaillancourt. Trois soirs pour dire merci, rire encore, et saluer une artiste qui, sans jamais tricher, aura su redéfinir ce  que peut être un spectacle d’humour : un espace de vérité, de folie et d’amour.

Quand les lumières se rallument, que les applaudissements s’étirent et que la scène se vide, il reste ce sentiment d’avoir assisté à quelque chose d’authentique. Pas seulement à un show, mais à une rencontre. Une preuve qu’on peut presque tout dire, tout oser, tout rire, tant qu’on le fait avec cœur.

Et dans ce cœur-là, celui de Rosalie Vaillancourt, il y a désormais un peu de tous ceux qui l’on applaudie.

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