crédit photo: Pierre Langlois
Mon Doux Saigneur

Mon Doux Saigneur au Quai des brumes | « Ça commence à chanter »

Mon Doux Saigneur, projet de Emerik St-Cyr Labbé, se produisait à deux reprises au Quai des brumes, ce jeudi 21 décembre. Les guitares percussives et les textes incisifs des artistes ont eu le mérite de transporter la salle comble dans les routes les plus désertes de nos voisins du sud.

Vers 21h30, la formation débute les festivités avec Hook II et Horizon, tirés de son deuxième album. Sur scène, Mon Doux Saigneur accueille une invitée, une petite nouvelle : Rose Perron, du duo Rau_Ze. Autre enfant des Francouvertes, la chanteuse était ressortie victorieuse du concours-vitrine à sa 26e édition.

L’entrée en matière est solide, et pose les bases pour le reste du spectacle : du rock gras, mélangé à du country, du blues et de la folk, rappelant les groupes du sud dans les années 70.

Du haut de ses 33 000 auditeurs mensuels sur Spotify, Emerik St-Cyr Labbé et sa bande auraient certainement pu s’offrir un Club Soda, mais décident de se tourner vers une disposition plus intime, au grand bonheur du public qui répond rapidement présent.

La magie propre à ces endroits, qui demande un certain courage de la part des artistes, de se mettre autant à nu.

Du courage, mais également de la générosité : voyant la demande, le groupe répond avec une offre conséquente, proposant une supplémentaire la même journée quelques heures avant le spectacle du soir, dans une formule 5 à 7.

 

Le groove dans la peau

Ayant lancé trois parutions de 2017 à 2022, Mon Doux Saigneur pioche autant dans son album homonyme que dans son opus pandémique, ainsi que dans son projet le plus récent, Fleur de l’âge. L’ensemble est homogène, et dévoile un goût assez prononcé de St-Cyr Labbé pour un certain courant.

Et pourtant, un point faible ressort de la performance, d’un point de vue personnel : l’ensemble est peut-être trop homogène. Les compositions sont bien ficelées et les musiciens sont excellents, rien à pointer de côté-là, mais dans un endroit comme le Quai des brumes, sans possibilité de quelconque scénographie, il faut compenser avec des anecdotes croustillantes, des blagues, des histoires, etc.

Homme de peu de mots, l’artiste derrière Mon Doux Saigneur enchaîne avec le reste des musiciens son catalogue d’une manière un peu trop conventionnelle, sans aucune interaction durant la majorité du spectacle. Enfin, pas aucune, une scène comique survient vers le milieu de la soirée : avant d’interpréter Rodéo, les musiciens demandent de l’alcool au bar du Quai des brumes, et pendant que les employés se faufilent du fond jusqu’à la scène dans le public, Mon Doux Saigneur et Rose Perron se permettent une version improvisée de Jingle Bell Rock. Un « santé » général, des shots avalés devant quelques dizaines de yeux amusés, avant de repartir pour un tour de manège.

L’apport de Rose Perron, sans que ce soit aucunement de sa faute, n’est malheureusement pas considérable durant la soirée. Pour la première moitié du spectacle, un sentiment d’effacement vient à l’esprit quand on la regarde chanter au côté d’Emerik St-Cyr Labbé. L’impression viendra être confirmée sur Pas la peine, morceau de Rau_Ze paru le mois dernier.

Les musiciens interprètent le titre pour mettre en valeur la chanteuse de plus belle, alors encore enterrée par les instruments. Un grand dommage quand on connaît le talent du duo, ou simplement de cette moitié du duo, qui aurait pu (dû!) être davantage présenté avec un meilleur mixage. Le petit échantillon donne tout de même hâte au premier projet à paraître du tandem, et également à son lancement aux Foufounes Électriques en avril prochain. Un diamant brut à suivre très attentivement, du R&B québécois, ça ne court pas les rues.

Mon Doux Saigneur enchaîne avec Shoegaze, Aywaille et Aller, ponctués d’excellentissimes solos rock, psychédélique et blues, avant de revenir en rappel sur Chu tanné d’attendre. Les morceaux ont su faire leur effet, celui de réchauffer le Quai des brumes d’un hiver qui ne veut pas pleinement pointer le bout de son nez, alors que Emerik St-Cyr Labbé avoue être très touché par la connaissance des textes de ses chansons par son public.

Il est vrai que le sentiment doit être particulier pour un artiste. Des mots sortis de ses doigts, sur un téléphone ou une feuille blanche, chantés de la bouche de dizaines de personnes. Dans un Quai des brumes comme au Centre Bell, le constat revient à sa simple expression : des mélomanes prennent le temps d’écouter la musique d’un artiste donné. Rectifions : des mélomanes prennent tellement de temps à écouter la musique d’un artiste donné qu’ils finissent par apprendre les paroles par cœur, et à les scander avec d’autres admirateurs d’un musicien.

Et ça, pour Mon Doux Saigneur comme pour un autre, il n’y a pas de meilleur cadeau.

 

Grille de chansons

  1. Hook II
  2. Horizon
  3. M​é​lodie
  4. Flou
  5. Vieux garçons
  6. Patience
  7. L’Eau
  8. Art vivant
  9. Jojo
  10. Maudit
  11. Tempérance
  12. Se baigner
  13. Son Mad
  14. Pas la peine
  15. Rodeo
  16. Marcher dans le noir
  17. Shoegaze
  18. Aywaille
  19. Aller

Rappel

  1. Chu tanné d’attendre

 

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