Katherine Levac : L’homme de ma vie à la Salle Albert-Rousseau pour une ultime représentation
Il y a des soirs où l’humour devient plus qu’un simple divertissement. Des soirs où une salle comble cherche à se reconnaitre dans les fragilités d’une autre, là, sous les projecteurs. Hier, pour la dernière représentation de L’homme de ma vie à la Salle Albert-Rousseau, Katherine Levac a offert bien plus qu’un spectacle: elle a offert un moment unique, un bref refuge éclairé par un grand arche bleu, un passage de franges qui s’ouvre comme une porte vers quelque chose de vrai, de tendre, d’aérien, de profondément terre à terre.
Katherine Levac est entrée de derrière les franges, souriante, rayonnante, vêtue d’un haut coloré et d’un pantalon noir. Ses yeux riaient déjà. Son énergie remplissait la salle avant que ses mots n’y parviennent. Québec est sa place, dit-elle, parce qu’on y trouve « sa sorte de lesbiennes préférée de plein-air ». Le ton était donné: irrévérencieux, léger, caressant, avec cette petite pointe d’autodérision qui fait mouche.
Elle se dit ravie d’être là, ravie parce qu’elle fuit ses responsabilités familiales, et personne n’est dupe dans la salle: c’est une blague, lancée avec ce sourire qui trahit tout. Elle bouge où elle veut, quand elle veut. Rien n’est chorégraphie, tout est organique. On a l’impression d’être invité dans la cuisine d’une amie brillante qui raconte sa vie en versant du vin et en riant trop fort. Elle évoque ses enfants, dont le premier mot fut « papa », ce qui déclenche une vague d’éclats de rire dans la salle. Elle parle du corps post accouchement, du poids perdu « parce que ça fait ça après huit mois de gastro », du Botox injecté dans son front.
Quand elle demande si quelqu’un dans la salle en a déjà reçu, le peu de réponse la fait sourire: « Albert-Rousseau, t’es pas honnête honnête. » Les rires explosent. Elle se moque de Julie Snyder la reine québécoise de la chirurgie, raconte ses propres complexes, évoque la petite fille qu’elle était, celle qui voulait plaire aux garçons, celle qu’elle compare avec tendresse à « madame patate ».
Elle aborde aussi la sexualité lesbienne avec une délicieuse autodérision: c’est long, ça prend de la technique, du temps, des ajustements. Elle parle de Chloé, son amoureuse, avec une affection qui flotte entre les blagues. Elle revient à sa ferme familiale, à ses frères musiciens, et chaque fois qu’elle dit « Albert-Rousseau » pour s’adresser à la salle au complet, on sent une affection particulière, presque un clin d’oeil.
Le spectacle devait être de 90 minutes. Il aura duré presque deux heures. Pas parce qu’elle s’étire, mais parce qu’elle respire. Parce qu’elle improvise, s’écoute, s’abandonne. Il n’y a jamais de temps mort. Juste une parole qui coule, vivante, fluide, habitée.
Le public rit souvent, fort, longtemps. Ça fait du bien d’entendre des rires qui résonnent comme une vague. À la fin, elle mentionne simplement que c’était sa dernière à la Salle Albert-Rousseau. Pas d’annonce, pas de promesse, pas d’après. Juste ce soir, celui qui se termine. Ce soir où tout le monde a respiré un peu plus grand. Un spectacle qui ressemble à la vie: lumineux, tendre, et surtout, profondément vrai.
Anne-Sarah Charbonneau en première partie
Avant elle, Anne-Sarah Charbonneau avait préparé le terrain avec son humour brut, décomplexé, et cette façon de dire la peur, la vraie, la simple, la quotidienne, comme on avoue une vérité trop longtemps retenue. Elle a parlé de thérapie, de sa peur de la mort, de baiser, de trop ressembler à Jay du Temple, de ses seins trop gros, de son école de filles qui était faite aux yeux des autres pour la lesbienne qu’elle était. Une entrée en matière honnête, vive, sans détours, qui a doucement déposé le public au seuil d’une soirée où les confidences seraient reines.
- Artiste(s)
- Katherine Levac
- Ville(s)
- Québec
- Salle(s)
- Salle Albert-Rousseau
- Catégorie(s)
- Humour,
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