Francouvertes

Francouvertes 2020 – Soir 5 | Le folk et La fièvre

Mon doux Jésus-Marie-Joseph qu’il s’en est fallu de peu pour que les Francouvertes survivent à la deuxième vague. Si bien que quelques heures à peine avant le soir numéro cinq des préliminaires, on ne savait pas encore exactement quel sort serait réservé à nos Francous chéries.

Mais voilà : en début de soirée, le gouvernement provincial annonçait que l’état d’urgence ne serait déclenché qu’après la dernière soirée de préliminaires mercredi. Les Francouvertes pourront donc bel et bien avoir lieu devant un public réduit dans un sprint de trois soirées de spectacle consécutives.

Ce sont peut-être les règles de distanciation, mais le public semblait un peu moins délirant que lors des autres soirées, où la danse et le joyeux chaos étaient parfois au rendez-vous. Qu’à cela ne tienne, les trois artistes présents – Jeremy Lachance, Désarroi et La fièvre – ont tous eu droit à une grande dose d’amour et d’applaudissements.

Jeremy Lachance

* Photo par Frédérique Ménard-Aubin.

Exceptionnellement, la série J’aime mes ex n’ouvrira pas les trois dernières soirées de préliminaires. Jeremy Lachance doit donc entrer sur scène devant un public qui n’est pas encore tout à fait réchauffé, et on le sent un peu hésitant en entrée de jeu. Vêtu d’un veston et d’absolument aucun soulier, l’auteur-compositeur-interprète prend lentement, mais sûrement ses aises au fil de la performance.

Lui-même avoue ne pas vouloir faire de musique engagée, et son folk-pop-rock dégage une belle insouciance. Sa musique donne de légères influences des années 60 et est particulièrement efficace lorsque Jeremy prend le temps d’y coller de belles mélodies travaillées. Le résultat est une ambiance idéale pour regarder longuement quelqu’un dans les yeux, les joues rougies par le vin semi-buvable du dépanneur.

En toute fin de parcours toutefois, Jeremy Lachance balance la pièce La maison peu commune, qui se démarque du lot. Plus musclée et recherchée dans ses arrangements, elle montre une direction inspirante qu’on espère voir prendre Jeremy. On espère aussi qu’il gardera cette choriste dont nous n’avons pu bien entendre le nom, qui ajoute beaucoup de valeur à ce projet.

 

Désarroi

* Photo par Frédérique Ménard-Aubin.

D’un artiste de folk rock un peu planant, on passe à un autre artiste de folk rock, mais un peu plus planant. Désarroi, c’est le bébé de Marc-Antoine Gagnon et, jusqu’aux Francouvertes, il était seul dans son bateau. Ce n’est que peu de temps après sa sélection qu’il a pris le temps de se former un groupe, et on sent qu’il n’a peut-être pas eu tout à fait le temps d’explorer toutes les options que cette configuration lui apportait.

Marc-Antoine a une sacrée belle voix, ça, c’est certain. Mais il joue dans un créneau très exploité au Québec, avec ses ambiances et envolées qui rappellent souvent Harmonium. Et comme c’est trop souvent le cas avec ce genre d’artistes, il manque une réelle prise de risque dans le projet. Les arrangements ont clairement besoin de plus de muscle, de dynamisme, de variété. Au final, Désarroi semble être encore un peu embryonnaire : le potentiel est là, le talent aussi, mais l’expérience manque peut-être un peu.

La fièvre

* Photo par Frédérique Ménard-Aubin.

« On s’appelle La fièvre, la prochaine chanson s’appelle Maladie. »
« Et on l’assume! »

Pas de panique, il n’est pas question ici d’effectuer des jeux de mots douteux avec le nom d’artiste le plus tragique de cette édition COVID-19 des Francouvertes. Surtout qu’il y a tellement de pertinent à dire sur ce duo. Déjà, il n’aura fallu que quelques secondes pour comprendre la cassure complète entre le folk rock et La fièvre.

La fièvre, c’est d’abord un show de boucane. Littéralement. À chaque chanson, Ma-Au Leclerc active d’une pédale le canon à fumée pour remplir la scène. C’est la même fumée blanche qu’on retrouve dans beaucoup de concerts, mais ici on pourrait presque imaginer que c’est de l’encens. Ou un brouillard par une froide nuit d’octobre.

Une fois la fumée dissipée toutefois, on retrouve un duo en pleine possession de ses moyens. Après deux chanteurs un peu statiques, c’est toute une claque de voir Zéa Beaulieu-April occuper l’ensemble de l’espace de son charisme. Elle chante, elle rappe, elle scande, elle jouit. Parfois, tout ça se retrouve dans la même chanson. On y sent une tendance entre The Knife, Peaches, le mouvement punk féministe Riot Grrrl des années 90 et la réincarnation de toutes les femmes qui ont été accusées d’être des sorcières à une certaine époque. Le groupe a collaboré avec Backxwash cet été pour la pièce Goddess et le mélange est absolument naturel.

Cela dit, si on regarde la scène musicale actuelle au Québec, il y a énormément de place pour La fièvre. Il s’agit d’un groupe mature, à la vocation claire et aux revendications limpides. Bref, le seul groupe qui puisse faire une chanson semi-érotique qui se nomme Écoféministe et en faire un des meilleurs moments des Francouvertes.

 

Palmarès

Sachant qu’au moins une certaine partie des billets ont été achetés par le public de Jeremy Lachance et Désarroi, on se demandait bien comment La fièvre et sa proposition plus champ gauche allait s’en tirer. Avec seulement deux soirs à faire, le duo se retrouve en excellente position pour faire les demi-finales en se classant cinquième. Quant à lui, Désarroi arrache tout juste la neuvième et dernière place.

Des artistes qui sont passés cet hiver, Ariane Roy, Vendou et Jessy Benjamin sont maintenant assurés de passer au prochain tour, alors que Guillaume Bordel et Petite papa doivent renoncer à leurs espoirs de poursuivre l’aventure.

  1. Ariane Roy
  2. Vendou
  3. Jessy Benjamin
  4. Narcisse
  5. La fièvre
  6. La faune
  7. Embo/phlébite
  8. Aramis
  9. Désarroi

Les Francouvertes recommenceront dès ce soir avec Kanen, Thaïs et Valence.

Événements à venir

Vos commentaires