crédit photo: Frédérique Ménard-Aubin
Natalia Lafourcade

Festival de jazz de Montréal 2023 | La maison symphonique a dansé au rythme de la fiesta mexicaine de Natalia Lafourcade

C’est une foule composés d’«aficionados » comme on dit dans la langue de Don Quichotte qui s’est entassée dans la Maison Symphonique pour assister au spectacle de Natalia Lafourcade laquelle a fait son apparition arborant dramatiquement une grande robe noire. Sur la traîne interminable de cet imposant accoutrement, on a placé ses instruments à corde. Cette portion de spectacle qui enchaînait les pièces de son plus récent album, De Todas las Flores,  allait verser dans le pathos, qu’on se le tienne pour dit.

Natalia a fait les cinq premières pièces de l’album en disant à peine bonsoir au public. La voix très amplifiée par les micros m’a partiellement choqué en début de course.  En effet, c’est comme si l’équipe de son n’avait pas saisi que la Maison Symphonique est, en  elle-même, un instrument et que cette caisse de résonnance bien remplie de tous ces humains que nous sommes ne nécessite pas les mêmes ajustement que lors de leur tests de son d’après-midi, si j’ose dire. Bref, ça a pris au moins 6 chansons avant qu’on arrête d’être agacé par ce débalancement. Nous n’étions pas dans un aréna, fallait-il préciser!

* Photo par Frédérique Ménard-Aubin.

Je me suis gardée une petite gène car il faut dire que Natalia Lafourcade elle-même et ses 4 musiciens donnaient une superbe prestation. Le doux rythme de bossa de la pièce titre de l’album a tout de suite conquis la foule. S’en est suivi une interprétation bien sentie de Pasan los días.  Malgré l’immensité de la salle, la délicatesse des éclairages maintenait l’ambiance feutrée qu’impose cette pièce très épurée sur l’album mais dont les arrangements avec piano sur scène étaient enchanteurs.

La quatrième pièce fut introduite par un passage au piano qui semble être une variation sur le thème du clair de lune de Debussy.  Ce magnifique interlude (plus long que sur la version disque) soulevait les coeurs. Puis les percussions ont fait souffler le vent de Llévame viento.  L’ambiance s’est réchauffée à partir du moment où Natalia a évoqué son «patelin», Veracruz, dans la chanson El lugar correcto dont le thème semblait joindre plusieurs personnes du public.

Il faut dire, toujours assise avec son énorme robe, le spectacle avait jusqu’ici quelque chose d’un peu statique. C’est avec la pièce Pajarito colibrí qu’est apparu un certain dynamisme alors que Natalia a demandé au public de participer à la manière de cigales pour cette chanson. C’est à ce moment là que l’artiste a semblé saisir quel type d’instrument formidable elle avait entre les mains avec la caisse de résonnance formidable que constitue la Maison Symphonique.

* Photo par Frédérique Ménard-Aubin.

Le «groove» de la pièce María la Curandera a ensuite pris d’assaut la salle, une cumbia pesante dont la cadence en a fait trémousser plus d’un. Ne pas être entrainé et battre le rythme de ses mains relevait de l’exploit olympique.  Puis s’est enchaîné la samba de Mi Manera de querer qui, à mon avis sur l’album n’est pas remarquable mais en version live prend vraiment du galon. C’est dans cette pièce que Natalia s’est adonnée à des prouesses vocales au grand plaisir de l’auditoire. Cette portion du spectacle s’est conclue dans la grande théatralité avec Natalia qui s’enroule en boule dans sa robe noire en disant Adieu sur la pièce Muerte.  Fin de la portion Pathos. Je pensais honnêtement que le spectacle tirait à sa fin… mais je me trompais.

 

L’Amérique latine à l’honneur

En effet, après une intermède instrumentale de ses musiciens et un changement de costume, Natalia et réapparue toute vêtue de blanc dans un habit qui évoque les traditions de son pays natal, le Mexique. Sur cette seconde partie sans entracte,  ce sont des chansons issus du folklore d’Amérique latine et du Sud qui ont été mises à l’honneur telles que présentées dans son précédent album, Musas.

Elle a commencé avec panache avec Tonada de Luna Llena, véritable hymne qu’elle a pu offrir en duo avec son guitariste duo. La foule fut subjuguée par sa voix crystalline. Un des moments forts fut son interprétation de La Llorona, donnant la réplique à la contrebasse le public entonnait en choeur volontier le refrain remuant ça et là un drapeau du mexique.

La foule s’est définitivement levée pour les dernières pièces Mi tierra Veracruzana et Tú Sí Quererme.  J’ai rarement vu la Maison Symphonique aussi enthousiaste.  Grâce au Festival de Jazz, on a pu assister à la première prestation depuis cinq ans de cette artiste internationale dont la musique saura enchanter une seconde fois une salle comble jeudi soir.

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