crédit photo: Jesse Di Meo
RAYE

RAYE au MTELUS | Époustouflante, selon ses termes

Cela fait quelque temps que je suis la carrière de RAYE. Depuis 2015, elle a livré des chefs-d’œuvre sur la scène dance pop avec des sons comme Tequila, Decline, Bed, You Don’t Know Me, et j’en passe… D’ailleurs, lorsque je dis à mes proches que je vais voir RAYE et ne savent pas de qui je parle, ils restent toujours surpris de savoir que la même personne qui est à l’origine des succès TikTok comme Escapism et Prada chantait aussi avec Charli XCX en 2017 sur Dreamer, pour ne nommer que celle-ci.

L’histoire de RAYE est particulièrement empreinte de résilience et le spectacle qu’elle rend est tout à fait à propos. Une histoire qu’on commence à malheureusement entendre de plus en plus souvent. Une histoire à la Jojo, à la Kesha, dans laquelle les artistes – émergents ou non – font face à une géante maison de disque qui a plein contrôle sur leur carrière. Ces artistes qui sont coincé·es dans des contrats qui les rendent à la merci de directeurs exécutifs refusant de publier leurs albums qui sont, à leur humble avis, commercialement voués à l’échec. Après 7 ans à pondre des singles à succès qui s’éloignent de l’art qu’elle souhaitait produire sans avoir l’approbation de sortir un album, RAYE a choisi de se lancer dans le vide et lancer un premier opus de façon indépendante. Elle l’a fait sans l’appui d’une maison qui aurait pu, tel qu’initialement promis, le propulser au sommet des palmarès. Au pied du mur, elle a suivi son rêve et a réussi son pari, avec l’appui de ses fans. Son premier album, My 21st Century Blues, fait un carton dans tous les pays anglophones et RAYE peut maintenant partir en tournée en jouant la musique qui lui ressemble, devant ses fans qui l’ont vu se battre durant tant d’années.

 

De sœur en sœur

RAYE était accompagnée de sa petite sœur qui assurait la première partie, performant sous le nom de scène Absolutely : elle a démontré que le talent coule à flots dans cette famille. Son énergie timide mais contagieuse était à craquer, le tout en combinaison avec son timbre de voix si clair, doux et juste qui rend son personnage de scène adorable et impressionnant.

La grande sœur, plus dégourdie pour sa part, s’est produite comme une vétérane sur la scène du grand théâtre de la rue Sainte-Catherine. La chanteuse, venant tout juste de compléter une soirée à guichet fermé au fameux Royal Albert Hall de Londres, débarque en sol canadien avec une seule idée en tête : se produire sur scène librement. 

Elle nous présente un album extrêmement cohésif, parfois engagé, soutenant des thèmes tels l’acceptation de soi, la crise environnementale, les traumas liés aux violences sexuelles, la toxicomanie, les troubles alimentaires… On plonge dans son univers et elle nous y accueille les bras ouverts. Une chose est sûre : la versatilité était au rendez-vous ce soir (les gens homosexuels verront un fin jeu de mots ici).

Elle est jointe par cinq musicien·nes, dont l’apport est très apprécié, vu le concept cabaret-diva qui nous est présenté d’entrée de jeu. J’ai adoré la prestance de la chanteuse, dont la voix est prête à affronter tous les genres, du folk au R&B en passant par le bubblegum pop. Elle est sur scène pieds nus et nous reçoit comme dans son salon – sauf que le salon a assez de divans pour 2300 personnes.

Après avoir débuté le spectacle avec l’hymne que je proclamerais d’anti-gaslighting-attention-messieurs, Oscar Winning Tears, l’autrice-compositrice-interprète met le ton en mentionnant que le thème de la soirée était « l’Honnêteté », en profitant pour nous révéler quelques secrets sur sa vie personnelle. « I want you to be happy, that’s why I don’t want you to date rappers », nous suggère-t-elle. Elle enchaine avec de nombreux morceaux tirés de son album qui lui permettent de tester ses habiletés vocales. La foule est très réceptive à son talent, même qu’elle doit prendre un moment dès les premières chansons afin de mentionner que Montréal est, d’ores et déjà, la meilleure foule de la tournée : « It doesn’t get much better than this, doesn’t it? », dit-elle à son band.

Plusieurs moments touchants se suivent, notamment lors de la chanson Ice Cream Man, où elle invite toutes les victimes de violences sexuelles à empêcher leur agresseur·euse de leur voler d’autres parties d’elles-mêmes dorénavant. Un autre message inspirant a été véhiculé lorsqu’elle a introduit la chanson Hard Out There, alors qu’elle témoigne des moments plus difficiles de sa vie lors desquels elle a toujours trouvé la façon de se relever, et ce, même lorsqu’elle ne voyait pas d’échappatoire.

À un moment lors du spectacle, ses acolytes lui laissent toute la place, avec un clavier et un banc situés au milieu de la scène. RAYE commence à prendre des suggestions du public et se met à chanter certains de ses singles moins connus tout en y ajoutant sa touche acoustique. Les gens mettent leur écran de cellulaire à la vue de l’artiste, en affichant les suggestions plus recherchées les unes que les autres. Même si elle avait de la difficulté à se rappeler de ses propres paroles, elle demandait l’aide du public, sans baisser les bras. Cette portion interactive du spectacle est du pur génie, rendant chaque prestation unique et spéciale pour les fans qui y assistent.

Puis, lorsqu’elle termine son moment acoustique, elle nous surprend avec deux chansons complètement dance pop, You Don’t Know Me et Secrets, transformant du même coup le MTELUS en un club dans lequel sauter est la norme.

Elle termine le spectacle avec son dernier single numéro 1 au Royaume-Uni que l’on connait toustes, Escapism. Elle revient sur scène pour ce rappel avec toute l’énergie du monde, montrant une fois de plus sa gratitude de pouvoir exercer ce métier de rêve avec ses propres règles, à sa façon.

RAYE est au beau milieu de sa tournée My 21st Century Blues World Tour et se produira à Toronto ce samedi.

 

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RAYE

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