Ping Pong Go

Ping Pong Go sont « super prétentieux »

Ces mardi 26 et mercredi 27 avril, le duo Ping Pong Go, formé du pianiste Vincent Gagnon et du batteur P-E Beaudoin, lancera son tout premier album homonyme, à Québec, puis à Montréal. Le projet, ludique et léger, est ancré dans l’univers absurde des deux musiciens. Rien de trop beau pour eux, ils se sont même inventé un style de musique, le « gamer jazz ».

À travers la caméra de leur ordinateur, les gars me montrent le studio où ils pratiquent. C’est également là qu’ils ont composé leur album. Claviers, synthétiseurs, batterie et table de ping pong: voilà ce qui s’y trouvait alors qu’ils rentraient d’une tournée européenne de Lou-Adriane Cassidy. C’est lors d’une quarantaine de 14 jours, pandémie oblige, qu’ils s’y sont trouvés isolés tous les deux.

Entre tournois de tennis de table et « bonne bouffe szechuannaise », le délire musical a vu le jour. Ainsi naquirent les ébauches de l’album déjanté que nous offre le duo. En entrevue, ce qui se remarque, c’est le plaisir que les deux gars ont à travailler ensemble. Pendant l’entrevue, la musicienne Lysandre, qui sera de la partie lors des spectacles à Montréal et à Québec, se pratique, juste en dehors du champ de la caméra. Des blagues se lancent de partout: tous les trois semblent au même niveau musicalement et humoristiquement.

Le projet est vendu comme une partie de plaisir. À l’oreille, on comprend à quel point la quarantaine est importante dans l’univers de ce premier long jeu. On y reconnaît l’énergie délirante du monde absurde pouvant se créer lors des confinements. Toutefois, les musiciens n’hésitent pas à faire valoir l’importance de l’album Ping Pong Go. Malgré les blagues et le plaisir, cet album mérite d’être pris au sérieux. Pourquoi, demanderez-vous? « Parce que c’est fucking bon », affirme fièrement Vincent Gagnon.

 

Celui-ci n’écoute « pas vraiment » de musique instrumentale, mis à part le jazz. Habituellement, lorsqu’il écoute ce qu’il accomplit musicalement, il est difficilement satisfait et critique envers son travail. Cette fois, c’est différent: « je trouve [notre album] vraiment bon. C’est de la musique que j’écouterais. En fait c’est de la musique que j’écoute ».

Galvauder le genre

Le terme gamer jazz que le duo s’est inventé n’est pas uniquement lié aux sonorités rappelant les jeux vidéos qu’on retrouve dans l’album.

J’ai longtemps été un puriste de jazz et je trouvais que tout le monde s’appropriait le terme. Là je me suis dit que c’était à mon tour d’avoir du fun et de galvauder le genre.

Lui et P-E Beaudoin sont hilarent à l’idée de s’être inventé un genre musical: « c’est tellement prétentieux ».

 

Après s’être claqué de nombreuses session d’improvisations musicales, toujours entrecoupées de parties de ping pong, Ping Pong Go s’est retrouvé avec quelques chansons complétées et « pleins de petits bouts chansons qu’il ne nous restait qu’à assembler ». Au final, l’oeuvre sonne vaguement comme l’album (Mother Eart’s) Plantasia de Mort Grason, mais avec l’énergie de Don’t Think You Can Escape Your Purpose de Yoo Doo Right.

Ne vous y méprenez pas, tous les instruments figurant sur l’album sont de « vrais instruments »: « on ne voulait pas jouer avec des machines », explique le batteur. Bien que ces affirmations laissent place à de nombreux débats émotifs sur ce qui constitue de « vrais instruments » et des « machines », on comprend le principe: les deux musiciens ne nous livrent pas de la musique électronique.

Lors de l’enregistrement de l’album, P-E et Vincent voulaient reproduire « l’enregistrement sur ruban », raconte le premier. « Pas mal toutes nos pièces ont été enregistrées d’une shot, on a gardé plusieurs erreurs sur l’album ».

C’était un peu en réaction à la tendance actuelle d’être parfait musicalement, à ce que tout soit réglé au quart de tour.

Sur la pièce Ping Pong Go, par exemple, Vincent effectue un long solo au clavier. Même en le faisant, il n’en était pas satisfait, affirmait qu’il voulait le reprendre. À la sortie du studio, il tombe, se casse le bras. Tant pis pour la reprise du solo. En le réécoutant, le claviériste réalise que la prise est parfaite comme ça: « finalement c’était exactement ce que je voulais ».

 Se battre avec Jean-Michel Blais

L’album de Ping Pong Go est diffusé sous l’étiquette Popop, un nouveau label, lancé en novembre, spécialisé en musique instrumentale. Les deux musiciens, lorsqu’intérrogés au sujet de la scène de musique instrumentale actuelle au Québec, affirment ne pas en écouter outre mesure, mis à part le jazz.

« Les gens sont toujours surpris quand on leur dit qu’on fait de la musique instrumentale mais que ce n’est pas de l’ambiant », rigole P-E. À leurs yeux, la scène instrumentale « n’existe pas vraiment, à part pour le piano néo-classique à la Jean-Michel Blais et Alexandra Streliski. Sinon ça va être de la musique électro à la CRi ».

Leur album est « un peu en réaction à ça », souligne Vincent, avant de virer son affirmation au ridicule en riant: « on va s’arranger pour être invité à Tout le monde en parle avec eux pis on va faire une grosse fight en ondes! ».

Le duo fait partie des quatre premières formations signées sous Popop, avec Anachnid, Martin Lisotte et Toast Dawg. Le groupe sera en spectacle au Studio Telus du Grand Théâtre de Québec mardi à 18h, puis à la Sala Rossa à Montréal le lendemain, à 20h.

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