Men I Trust

Men I Trust au MTelus | Une intensité sans éclat 

Pour clore l’année, Men I Trust retrouve le MTELUS les 18 et 19 décembre. Emmanuelle Proulx (voix, guitare), Jessy Caron (basse, guitare) et Dragos Chiriac (claviers) présentent sur scène les titres d’Equus Caballus. Un concert en retenue, où rigueur musicale et atmosphère onirique l’emportent sur l’effet.

Une scénographie sobre et maîtrisée

À 21 h 10, le trio entre en scène dans une salle plongée dans le noir, éclairée par une brume légère et un blanc minimal. Le public, majoritairement composé de jeunes couples, se tait presque immédiatement. L’attention est totale, comme si chacun comprenait que le concert se jouerait dans la nuance.

La scène, traversée de faisceaux lumineux alternant entre chaud et froid, crée une atmosphère enveloppante sans ostentation. Les musiciens, installés en hauteur et légèrement en retrait, entourent Emmanuelle Proulx, placée au centre. Cette disposition met sa voix en avant tout en soulignant le caractère collectif du groupe. Dans la fosse, quelques personnes dansent doucement, tandis que la majorité reste concentrée sur l’écoute.

Au fil du set, l’atmosphère se précise. Les éclairages se réchauffent et accompagnent les chansons aux textures plus lumineuses. L’ensemble évoque un paysage mouvant, entre ciel et nuages. Les morceaux s’enchaînent sans rupture, et les nouvelles compositions s’intègrent naturellement au répertoire, affirmant le contrôle total du groupe sur son identité artistique.

La musique avant l’adresse

Le concert s’ouvre avec To Ease You, et l’esthétique sonore du groupe est immédiatement reconnaissable. Les premières chansons privilégient l’installation d’un climat plutôt que l’interaction immédiate. Les interventions verbales sont rares : un simple « Bonsoir Montréal » après Come Back Down, puis quelques mots plus tardifs, avec retenue. Il faudra plusieurs titres avant que le lien avec la salle se détende, la musique créant l’espace de proximité.

Cette distance n’est pas un retrait, mais une posture cohérente : Men I Trust privilégie l’indépendance et le mystère pour instaurer une proximité émotionnelle subtile.

Les instruments au premier plan

Les solos sont mis en valeur par l’éclairage, laissant respirer chaque musicien sans rompre l’harmonie. Sur Hard to Let Go et Seven, le solo de guitare déclenche les premiers applaudissements soutenus, un moment de relâchement dans un concert jusque-là dominé par la retenue.

Des titres comme The Better Half ou Where I Sit plongent la salle dans une écoute quasi hypnotique. Le medley central, composé de Oncle Jazz, Norton Commander (All We Need), Hard to Let Go, Numb, Lauren, Lifelong Song, Lucky Sue et Tree Among Shrubs, agit comme un point d’équilibre : chaque extrait conserve son identité, mais leur enchaînement crée une unité harmonieuse. La réaction du public est immédiate et chaleureuse.

Le versant pop et lumineux de l’album se manifeste dans les synthés 80s scintillants, la basse ronde et sautillante, les guitares modulées et les vocalises aériennes d’Emmanuelle Proulx. Cette immersion reflète les thèmes chers au groupe : amour, doute, dérives intérieures, nostalgie, calme et douceur. C’est un art du climat, de la nuance et de la suspension.

La virtuosité des musiciens sert l’ensemble et prépare naturellement la montée d’énergie finale. Men I Trust réussit un paradoxe rare : être atmosphérique sans être fade, minimaliste sans être monotone.

Un rappel plus énergique

Après un set dense et maîtrisé, la salle réclame le groupe à nouveau avec insistance. Le rappel s’ouvre sur Show Me How, suivi de Worn Down et de Billie Toppy, plus rock et énergique. Cette montée d’intensité conclut le concert sur une note puissante.

À 22 h 30, Men I Trust quitte la scène. Avec les premières incarnations scéniques d’Equus Caballus, le groupe confirme sa maturité et sa maîtrise artistique. Un concert à son image : discret, rigoureux et profondément habité.

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