crédit photo: Morgane Dambacher
Kim Petras

Kim Petras à L’Olympia | Nourrir la bête, mais ne pas la gaver non plus

Quelle année pour Kim Petras! Un premier Grammy Award pour sa collaboration avec Sam Smith, Unholy, une tournée de festivals, deux albums sortis à moins de trois mois d’intervalle… Et la revoici en tournée, à l’Olympia de Montréal, sur le Feed The Beast World Tour.

La star allemande, qui s’est fait connaître en 2018 grâce à sa chanson Heart To Break et son vidéoclip dans lequel figure Paris Hilton, était de retour à Montréal depuis son récent passage à Osheaga cet été. Je l’ai découverte alors qu’elle assurait la première partie de Troye Sivan à la Place Bell, il y a 5 ans, et son court acte m’avait littéralement laissé la bouche ouverte : sa présence sur scène, sa prestance vocale et son humilité m’ont donné ce sentiment d’en vouloir plus. J’ai eu la chance de renouer avec elle cet été, justement, à Osheaga et mes appréhensions étaient comblées, malgré la foule qui, disons, attendait davantage l’arrivée de Kendrick Lamar…

Après cette prestation estivale de 45 minutes qui rentrait parfaitement dans mes cordes, mes attentes étaient assez élevées pour le spectacle d’hier soir : opportunité d’ajouter plus de chansons nichées de son large répertoire, possibilités infinies d’accessoires et de visuels, foule qui se déplaçait spécialement pour elle.

À mon sens, le spectacle comportait des hauts et des bas et je cherche encore à comprendre pourquoi ce n’était pas un sans faute, bien que l’expérience globale ait été satisfaisante.

D’emblée, le DJ Alex Chapman est en support à l’artiste, lui qui a collaboré avec Kim sur le son à tout casser Horsey, en 2022. Il active sa table tournante dès 20h, mais ne semble pas trop savoir comment elle fonctionne. Les chansons méticuleusement sélectionnées mettent toute l’ambiance nécessaire afin de réchauffer la foule, mais les transitions laissent, du moins, à désirer. Somme toute, le public raffole des gay anthems qui sont tout à fait de circonstance avant d’accueillir la chanteuse.

Le spectacle de la tête d’affiche, pour sa part, est séparé en cinq actes et un rappel, plus différents les uns que les autres, sans pour autant qu’il n’y ait un fil conducteur.

Kim Petras arrive sur scène à l’intérieur d’un tombeau/vaisseau spatial ouvert par ses trois danseurs qui sont vêtus d’armures et d’une cape à la Like a Prayer, le tout afin d’introduire la chanson-titre de la tournée, Feed The Beast. On enchaîne rapidement avec trois chansons qui proviennent de trois de ses autres projets et Kim termine l’acte avec son couplet du succès commercial Unholy. L’enchaînement est apprécié, mais la chanteuse semble manquer d’énergie et le flux vocal provenant de son micro est assez faible dans les haut-parleurs de l’Olympia.

Ensuite, Kim reprend essentiellement le même combo qu’elle a utilisé tout l’été dans les festivals, tiré de son mini-album Slut Pop, en changeant les costumes et en y ajoutant des éléments théâtraux, tels qu’un microphone suspendu au plafond et des visuels d’arrière-plan très provocateurs. Tout au long de cet acte, la foule est en délire et ne manque pas de chanter les paroles aussi vulgaires que rassembleuses des chansons telles Treat Me Like A Slut, Throat Goat et They Wanna F*ck. Bien que la reprise de ce segment prenne une bonne partie du spectacle qui aurait pu être utilisée sur un nouveau concept, celui-ci est encore une formule gagnante auprès des fans.

Kim reprend de la vigueur lors du troisième acte, mais les chansons choisies et leur arrangement manquent de tonus, surtout à la suite d’une compilation si énergique. Cela dit, la chanson Hit It From the Back redonne de la vie à ce segment, alors que Kim et sa danseuse collaborent étroitement et avec énergie afin de nous montrer plusieurs façons de… «hit it from the back»! L’utilisation du lit rond au milieu de la scène est absolument fascinante.

Celle dont plusieurs proclament la « Reine d’Halloween » revient sur scène afin de nous présenter, en bloc, plusieurs chansons de son mixtape au thème glauque Turn Off The Light, paru en 2019. Plusieurs changements de costume étaient au rendez-vous et l’arrangement scénique était très bien pensé. Toutefois, bien que ce projet ait été un coup de cœur pour plusieurs, je peine à comprendre comment on peut passer sept chansons d’un spectacle de deux heures sur un mixtape sur lequel il est difficile de danser. À mon humble avis, cela a causé des longueurs non nécessaires à la trame du spectacle.

Cependant, la chose est tout autre lors du dernier acte, alors que la prima donna nous montre la raison pour laquelle plusieurs lui donnent le titre de vocaliste. Quatre titres purement pop qui sont très cohésifs et qui terminent bien ce périple à travers les nombreuses ères de Kim Petras. Elle enchaîne les hautes notes qui font vibrer le théâtre et bénissent les oreilles des fans, notamment sur le deuxième single de son premier album, Icy, qui ne manquent pas de nous rappeler tout le chemin qu’elle a parcouru depuis. Kim quitte la scène après avoir performé avec brio la chanson Castle In The Sky alors que de la neige artificielle tombe délicatement sur la scène – neige qui l’a également fait glisser au bas des marches de la scène, mais heureusement, plus de peur que de mal.

Lorsque tout tourne au noir et que les fans en réclament plus de la chanteuse, une énorme structure phallique disco (oui, vous avez bien lu) apparaît sur scène pour nous offrir un dernier rodéo. Kim et ses danseurs nous retrouvent afin de donner à la foule ce qu’elle réclame, en ajoutant Alone, Problématique et Heart To Break à la liste de succès présentés hier soir. Le théâtre a plus d’énergie que jamais et ce choix de chansons est absolument brillant pour un rappel.

En somme, il appert que la balance des albums/projets n’ait pas été une priorité pour l’équipe de la chanteuse. Clarity, Problématique et ses premiers singles sont extrêmement importants pour bien comprendre l’évolution de la carrière de la chanteuse et ces projets ont été délaissés au bénéfice de Slut Pop et Turn Off The Light sur lesquels on a trop mis l’accent. Évidemment, ceci est une décision artistique tout à l’honneur de Kim, mais celle-ci a moins raisonné de mon côté.

Bien que les arrangements et les éléments théâtraux m’ont rendu confu à quelques égards, on peut blâmer cela sur le dos du phénomène camp et tenter de mettre ses énergies ailleurs. La performance vocale est sans faille, plusieurs moments forts sont de la partie et on se doit de réaliser à quel point Kim entraîne un safe space partout où elle passe.

Kim et son équipe continuent la tournée mondiale Feed The Beast jusqu’au mois de mars prochain et se produiront ce soir à Toronto.

Photos en vrac

Kim Petras

Alex Chapman

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