crédit photo: Pierre Langlois
Tim Brady

Instruments of Happiness: Projet 100 guitares à l’Oratoire | Un spectacle impressionnant vu de l’intérieur

Pour clore la 12ème édition du Festival Montréal/Nouvelles Musiques, c’est à l’Oratoire Saint-Joseph qu’est offerte la création de La Grande Accélération, une symphonie un brin mégalomaniaque et qui a su impressionner positivement son auditoire par son audace et son originalité. Composée par le guitariste montréalais Tim Brady, elle fut interprétée par 205 musiciens dont une centaine de guitares électriques.

C’est une vue de l’intérieur que je vous propose à travers cet article en ayant eu le privilège d’être un des cent guitaristes présents. Habituellement, chez Sors-tu?, on ne parle pas de nos projets personnels mais devant l’ampleur du projet et n’étant qu’un petit maillon des 205 musiciens impliqués, il semblait pertinent d’offrir une présentation du projet et peut-être même vous donner le goût de prendre part à la prochaine édition d’Instruments of Happiness: Projet 100 guitares!

Instruments of Happiness: Projet 100 guitares, qu’est-ce que c’est?

C’est le projet dirigé par Tim Brady dédié à l’interprétation de la nouvelle musique pour guitares électriques. Il comprend un quatuor, un orchestre professionnel de vingt guitaristes et un ensemble communautaire de 100 membres de tous niveaux. L’ensemble s’est produit à travers le pays et a déjà joué au Complexe Desjardins et une fois à l’Oratoire Saint-Joseph en 2019. Cette année est le dixième anniversaire du projet créé en 2015. Les vidéos des précédents évènements sont disponibles sur youtube:

 

Le concepteur et compositeur derrière ce projet un peu fou est le guitariste montréalais Tim Brady. C’est un musicien d’envergure à la carrière impressionnante (plus de détails sur son site) et qui a déjà plusieurs gros projets à son actif. À la fois affable et jovial, c’est une personne d’approche facile qui sait partager sa passion.

205 musiciens présents

Pour la création de ce samedi, c’est la symphonie La Grande Accélération qui est jouée dans un Oratoire Saint-Joseph plein à craquer. En plus du public venu nombreux, il y a tout de même 205 musiciens qui sont répartis à divers endroits pour permettre une spatialisation de la musique, un des atouts de la soirée. On retrouve l’Orchestre symphonique des jeunes de la Montérégie et l’Orchestre symphonique des jeunes du West Island dont les cordes sont regroupées devant l’autel et les cuivres au fond de l’oratoire avec un percussionniste de l’ensemble Sixtrum. Quatre autres groupes sont disposés dans les bas-côtés et sont composés chacun de 25 guitaristes électriques avec un percussionniste et un guitariste soliste.

Autre atout qui ajoute à l’expérience, il y a les magnifiques projections vidéos créées par Sylvain Marotte qui s’affichent sur les murs de l’autel accompagné de quelques projecteurs du meilleur effet.

L’évènement commence par la présentation du festival et du concert par l’acteur et danseur Marc Béland, très impliqué dans les arts contemporains. Tim Grady vient ensuite sur scène pour présenter sa création en rappelant que La Grande Accélération fait référence aux bouleversements récents comme l’intelligence artificielle, la crise climatique ou l’instabilité politique avec l’avènement de Trump lors de ce funeste 20 janvier dernier.

La musique est résolument contemporaine mais cette œuvre est aussi une des plus abordables du projet 100 guitares de par son approche davantage mélodique avec l’apport des orchestres symphoniques. Les parties de guitares sont parfois bruitistes mais jouent principalement des accords et les différentes sections se répondent à travers l’immense espace de l’Oratoire pour un effet de toute beauté. Les solistes se répondent également souvent avec des mélodies répétées. Et l’accélération du morceau est notable jusqu’à un long solo de percussions qui aboutit à la partie finale rapide.

Si le style de musique peut sembler élitiste aux premiers abords, les échos que j’ai eus étaient particulièrement enthousiastes, même pour les novices du genre, avec un effet d’ensemble impressionnant et une spatialisation captivante, même si cela a parfois paru sombre et pessimiste aux oreilles de certains. Les projections ont pu aussi évoquer l’arrivée d’extra-terrestres. Point négatif, les déplacements incessants et dérangeants d’une partie du public dans l’Oratoire étaient gênants pour les autres. Le concert fut perçu comme une expérience sonore originale et qui méritait le déplacement, sans regret.

Pour en savoir plus sur ce projet et connaître tous les participants, cliquez ici.

 

Ma participation au projet

De par le passé, j’avais déjà vu les annonces pour participer aux projets 100 guitares et je m’y étais pris trop tard ou j’étais pris par d’autres tâches plus quotidiennes. Fin 2024, je me décide enfin à me présenter aux auditions, par envie de retrouver l’adrénaline du concert et aussi le goût de me frotter à un répertoire plus exploratoire que j’aime écouter et découvrir.

L’audition est sommaire et accessible à tous avec une connaissance de base de la guitare électrique. Il suffit ensuite de répondre à un courriel pour montrer son intérêt et valider sa participation suivant l’ordre de premier arrivé, premier servi.

Mon parcours musical est très ordinaire, typique d’un guitariste rock amateur d’envergure très local et j’ai joué au sein de quelques bands en concert devant des auditoires variant de deux à quelques centaines de personnes au tournant du millénaire. J’ai ensuite mis en berne mes activités musicales scéniques et j’ai pris des cours avec le regretté guitariste montréalais Tom Eliosoff pour ouvrir mon côté jazz. Après 18 ans d’arrêt, c’est donc l’opportunité de me retrouver sur scène à nouveau avec un répertoire original sur un projet enlevant!

La réception de la partition s’est faite à la fin novembre et a permis de se familiariser avec sa partie mais sans le contexte musical de l’ensemble. Mes quelques années de violon et de solfège m’ont permis de me débrouiller avec la partition. Encore une fois, il n’y a pas besoin d’une technique à la Allan Holdsworth, une connaissance de son manche et des accords barrées suffisent.

Les répétitions

Les répétitions commencent deux semaines avant le concert et se déroulent par groupe, constitué d’une bonne vingtaine de guitaristes. Le tout se déroule dans une ambiance bon enfant mais studieuse. On y retrouve une diversité de niveaux allant du débutant au professionnel expérimenté. Et si le niveau sonore est timide au début, le volume prend de l’ampleur avec l’assurance et les répétitions. On a pu entendre une ébauche numérique de l’ensemble pour montrer l’intégration des différents groupes dans le tout.

De mon côté, j’ai rencontré des difficultés avec les entrées dans le morceau : quand on a principalement joué avec un batteur pour tenir le rythme sans subtilité, ça demande un effort particulier et une attention soutenue au chef d’orchestre pour commencer sur le temps. Autre problème, jouer des nuances de volume. Un guitariste rock a généralement deux nuances : soit très fort, soit trop fort. Le pianissimo est comme une découverte et un défi à jouer!

La générale s’est déroulée la veille du concert avec tous les instrumentistes présents et j’ai pu découvrir la symphonie dans tout son ensemble, avec les réponses entre les groupes et les percussions. Très impressionnant, en plus du lieu immense et de son acoustique particulière.

Le grand jour

Le jour du concert, malgré mes expériences de concerts, j’avoue que j’étais tout de même fébrile. Et si ma contribution s’est bien déroulée, mes quelques erreurs ont su rester humbles parmi la multitude de l’ensemble. Mais j’ai trippé sur l’expérience de jouer dans un tel lieu avec autant de musiciens plus le plaisir de retrouver l’adrénaline du concert!

C’est sûr que coincé dans les côtés, au milieu de ma section de guitariste, j’ai peu vu les projections et peu entendu les cordes mais c’était le gros fun pareil! Une vidéo du concert sera disponible dans les prochains mois, le temps de faire l’ambitieux montage.

J’espère que ce compte-rendu aura su attiré l’attention de quelques guitaristes et donner le goût de s’impliquer sur le prochain projet parce que moi, c’est sûr que je reviens, j’ai eu trop de fun!

Cliquez sur ce lien pour être informer et participer aux futurs projets d’Instruments of Happiness: Projet 100 guitares

 

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