crédit photo: Pierre Langlois
John Hollenbeck

George à la Sala Rossa | Grosse soirée jazz, tendance expérimental

Pour commencer 2023, on avait droit à une grosse soirée lundi avec le quartet George, mené par le batteur John Hollenbeck et accompagné de musiciennes de talent. Avec une musique jazz plutôt expérimentale et maîtrisée, il a conquis le public de la Sala Rossa, en format assis et pleine à craquer. Avec la première partie captivante de Sarah Pagé, c’est assurément un grand moment que l’on a partagé.

John Hollenbeck est un batteur à la carrière bien rempli. Il a travaillé avec Fred Hersch, The Village Vanguard Orchestra, Kenny Wheeler, Pablo Ziegler, Meredith Monk et récemment avec la pianiste Marianne Trudel sur son projet Time Poem en bonne compagnie du bassiste / contrebassiste Rémi-Jean Leblanc.

Il a également ses propres formations comme The Claudia Quintet et le John Hollenbeck Large Ensemble. Installé depuis quelques années à Montréal, Hollenbeck est également professeur à l’Université McGill depuis 2015.

George est donc la dernière formation de John Hollenbeck et le concert de lundi soir était le lancement de l’album Letters to George à sortir officiellement en format numérique le 27 janvier 2023. Les chanceux comme moi ont pu déjà se procurer l’album en CD.

Chaque titre se veut un hommage à un George, comme George Washington Carver, Georgia O’Keefe, George Saunders, George Clinton…

Hollenbeck est à la batterie, au piano et à la composition. Il est accompagné de musiciennes de grands talents, Aurora Nealand (de Nouvelle Orléans) au chant, clavier et aux saxophones alto et soprano, Anna Webber (de New-York) au saxophone ténor et à la flûte ainsi que Chiquita Magic (de Toronto) aux claviers et chant.

 

 

Le spectacle commence avec le chant d’Aurora Nealand qui explore sa voix d’une façon originale et décalée mais fort intéressante et qui rappelle en vrac, Björk, Mike Patton, voire même une Yoko Ono qui aurait enfin travaillé sérieusement son affaire et maîtrisée son concept.

Accompagnée du saxophone d’Anna Webber, toute aussi inventive et intense, tous les ingrédients sont là pour une entrée en matière qui surprend et accroche de suite.

S’ajoute la batterie d’Hollenbeck au jeu à la fois subtil et puissant.

Chiquita Magic est plus effacée derrière ses deux claviers disposés en angle droit : un pour les basses et un autre pour le reste. Cependant son jeu rigoureux assoit les compositions et laisse libre court aux deux solistes. Autre joie de la soirée, découvrir trois excellentes musiciennes dont on ne manquera pas d’explorer la discographie!

Une reprise du Bang Bang (My Baby Shot Me Down) de Sonny and Cher suit, très intéressante dans son décalage orienté plus free jazz que pop song. Le titre suivant est un hommage à George Clinton, le maître du funk mais paradoxalement, le morceau reste plutôt sage malgré ses accents funky marqués. Le dernier titre commence magnifiquement avec les saxophones à l’unisson d’Aurora Nealand et d’Anna Webber rejoints par le reste du groupe et l’apport de Sarah Pagé avec sa harpe travaillée à l’archet. Un court rappel termine délicieusement la soirée.

Pour mon plus grand bonheur, force est de constater qu’il y a un public pour du jazz qui sort des carcans avec ce show sold out un lundi. Définitivement mon meilleur show de 2023!

Blague à part, la barre est haute et cette soirée n’est pas sans me rappeler l’exceptionnel show de Fyear l’année dernière au même endroit et qui m’a définitivement tout autant marqué. Difficile d’accoter une telle réussite et pourtant. Un de ces shows dont on pourra dire : « j’y étais! »

La musique éthérée de Sarah Pagé

C’est Sarah Pagé qui ouvre la soirée.

Connue notamment pour son travail avec les Barr Brothers et Esmerine, elle était seule avec sa harpe et une multitude de pédales d’effet. Ainsi que quelques accessoires surprenants comme un slide de guitare, des archets et même un petit ventilateur portable pour frôler délicatement les cordes.

Mais bien au-delà de l’effet visuel et accrocheur, Sarah Pagé nous présente une musique éthérée, tout en ambiance, qui évoque son dernier album Code Versus sorti l’année dernière. Avec un gros travail du son et un jeu toujours précis, la musicienne, au visage fermé et très concentrée, nous accroche rapidement dans son univers, bien loin de ce que l’on pourrait s’attendre de la harpe, avec des mélodies envoûtantes, des nappes et des boucles et même, parfois, une sonorité qui rappelle l’orgue Fender Rhode. L’audience particulièrement attentive pendant cette demi-heure dense et envoûtante a visiblement apprécié. Une très belle ouverture pour une soirée d’exception.

À noter que la recette de ce concert a été versée à l’association Brique par Brique, un organisme à but non lucratif créé en 2016 par des organisateur.rice.s communautaires racisé.e.s afin de construire des logements abordables dans le quartier multiculturel de Parc-Extension, à travers une perspective de justice sociale transformatrice. Vous pouvez les aider en donnant directement sur leur site www.briqueparbrique.com

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