crédit photo: Pierre Langlois
FYEAR

FYEAR au Centre Phi | une performance coup de poing

FYEAR est un projet fort original et fort réussi créé par le saxophoniste et compositeur Jason Sharp et le poète et auteur Kaie Kellough. Avec un ensemble de huit musiciens accompagnés de projections visuelles remarquables, la musique navigue entre jazz moderne, drone et rock avec des textes poignants.

J’avais eu le privilège d’assister à une des rares prestations de l’ensemble en juin 2022 dans le cadre du festival Suoni Per Il Popolo, à la sortie de la crise de la Covid et tout le monde était encore masqué et méfiant du moindre bruit de gorge suspect de son voisin. J’en étais sorti avec une très grosse impression comme on en ressent peu souvent.

Un disque de cette proposition hors de l’ordinaire fut enregistré et est sorti le 5 avril 2024. Le spectacle de ce soir s’avère être le lancement et aussi l’unique concert canadien de la formation pour l’année. Un évènement qu’il ne fallait surtout pas manquer!

Pour jouer cette musique, c’est forcément un ensemble original avec Jason Sharp comme chef d’orchestre, compositeur, saxophone basse, électronique et il joue même sur une déclinaison d’ondes Martenot. Aux voix, il y a Kaie Kellough qui a écrit les textes et la poétesse Tawhida Tanya Evanson. Jesse Zubot et Joshua Zubot sont aux violons. Stefan Schneider et Tommy Crane sont aux batteries. Joe Grass est à la pedal steel guitar. Kevin Yuen Kit Lo s’occupe de la performance vidéo et conception visuelle.

FYEAR est un mot composé de fear, la peur et year en référence à l’année de marde covidienne qu’on avait affronté à l’époque. Les textes reprennent ces thèmes, entre urgence, crises, époque trouble, sur-stimulation. Le tout livré avec maestria par Kaie Kellough et Tawhida Tanya Evanson dans un enchevêtrement de voix à la fois impressionnant, touchant et dynamique.

Tawhida Tanya Evanson a une présence scénique rare et un talent évident: pour l’avoir vu, elle peut retourner une soirée particulièrement ennuyante de poésie adulescente en un événement réussi et rayonnant d’humanité après son passage. Ce soir encore, avec Kaie Kellough, la performance vocale est de très haut niveau, même si j’ai parfois trouvé les voix un peu éloignées dans le mix.

Et oui, deux violons! Ça nous change des sempiternelles guitares ou saxophones hurlants leurs trippes! Ça a le mérite d’être intrigant et original et permet de capter notre attention et de nous amener sur de nouveaux territoires sonores rares. Aux deux batteries, on retrouve Stefan Schneider et Tommy Crane que l’on a croisé souvent à l’Ursa, nous offrent un accompagnement complémentaire et puissant sans pour autant sombrer dans une escalade de roulements.

On saluera également la performance vidéo de Kevin Yuen Kit Lo avec des projections parfois chocs tendance épileptique mais qui savent aussi être plus ambiantes et mesurées, voir parfois éteintes pour laisser place à la musique. De la nuance visuelle et du bon goût que j’ai vraiment appréciée à une époque où la surabondance d’images nous rend souvent saturé et vide.

Joe Grass est dans un rôle plus effacé ce soir, au service de la partition et s’il sait rester en arrière-plan, ses parties de guitar steel participent efficacement à l’orchestration hors norme.

Étant au balcon, cette fois-ci, j’apprécie d’observer la chorégraphie de Jason Sharp, dirigeant l’ensemble et jouant des pédales et claviers tel un danseur moderne. Il nous livre également quelques percutantes lignes de saxophone basse dont il a le secret.

Le mélange des textes et des voix avec une orchestration fort originale frappe fort, autant l’imaginaire que les oreilles. Avec un riche mélange d’influences musicales, la musique du projet reste un événement hors-norme. À mon sens, c’est une performance musicale et textuelle majeure qui brille haut dans la musique canadienne de ce siècle et qui mériterait à être connu et reconnu davantage, pour sa richesse et son exécution.

On peut écouter l’album FYEAR sur bandcamp. Et on peut l’acheter directement sur le site de Constellation Records pour sauver le taux de change des dollars US.

 

Obsédé par la voix d’Erika Angell

Je me demandais qu’est-ce que j’allais pouvoir écrire de pertinent sur le concert d’Erika Angell de ce soir, après avoir assisté à de nombreuses prestations d’Angell au sein de différents projets… Et bien, la réponse est simple, je ne me tanne pas! C’est toujours un plaisir renouvelé de retrouver et d’écouter Erika Angell sur scène où elle est accompagné par la solide batteuse Milli Hong.

Il y a toujours une richesse de vocabulaire musicale et de nuances qui font que l’on ne s’ennuie pas, avec toujours une dose d’improvisation induite par des manipulations d’effets à la volée. Et il y a sa voix, toujours très bien placée, d’une justesse jamais prise en défaut. Cette voix est souvent traitée radicalement à travers différents effets mais par je ne sais quelle magie, le résultat est toujours musical et organique malgré tout.

Obsédé par sa voix ? Oui assurément! D’ailleurs c’est le titre de son album solo The Obsession With Her Voice disponible aussi chez Constellation Records

 

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FYEAR

 

Erika Angell

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