
Festival d’été de Québec 2025 – Jour 4 | Wyclef Jean et Protoje enflamment Québec sous une pluie d’émotions
Il y a des soirs où la pluie n’éteint rien. Au contraire, elle amplifie. Elle lave les attentes, elle rend les corps libres, elle fait briller les sourires. Le 6 juillet, en Haute-Ville de Québec, elle est tombée sans relâche, comme pour tester la foi des festivaliers venus entendre deux artistes qui ont fait de la résistance douce leur arme de création: Protoje et Wyclef Jean. L’un a ouvert la soirée sur la scène SiriusXM, livrant une performance à la fois vibrante et introspective. L’autre, figure légendaire du hip-hop et du reggae fusion, a tout simplement transformé la scène Loto-Québec en terrain de fête, de mémoire et d’unité. Une soirée où l’on a dansé sous la pluie comme on danse dans sa chambre d’ado, les bras au ciel, sans souci du lendemain.
Wyclef Jean
Le spectacle de Wyclef Jean n’a pas tardé à s’imposer comme l’un des moments forts de cette édition 2025. Dès les premières secondes, l’ambiance s’est électrisée. Pas de fioriture, pas de mise en scène excessive: juste lui, son sourire immense, sa guitare, son énergie contagieuse, et des musiciens tout aussi investis. Rapidement, la foule, composée majoritairement d’adultes, ceux qui ont grandi avec The Score en fond de cassette ou de CD gravé, est entrée dans la danse. Chaque morceau était accueilli comme un vieux souvenir qu’on retrouve dans une boîte qu’on croyait perdue. On chantait en chœur, on levait les bras quand il le demandait, on sautait même quand le sol glissait. Il suffisait qu’il lève une main pour que des milliers suivent. Le genre de moment qui donne l’impression d’appartenir à quelque chose de plus grand que soi.
* Photo par Stéphane Bourgeois
Wyclef Jean n’est pas qu’un musicien. Il est une mémoire vivante de plusieurs générations. Né à Croix-des-Bouquets en Haïti, immigré à New York durant l’enfance, il a façonné son univers entre les sons du kompa, les battements de la rue, et les mélodies apprises à l’église. Il est devenu célèbre dans les années 1990 avec Lauryn Hill et Pras Michel au sein de The Fugees, groupe phare du hip-hop conscient. Ready or Not, Fu-Gee-La, Killing Me Softly With His Song: autant de titres devenus mythiques, souvent repris, jamais égalés. Mais Wyclef n’a pas cessé d’explorer après ça. En solo, il a tissé des liens entre les continents, mêlant reggae, soul, rap, et chanson haïtienne dans une oeuvre éclectique et profondément humaine.
Sur scène, cette richesse prend tout son sens. Il change d’instrument comme d’énergie, il parle plusieurs langues, il fait des blagues, il raconte, il s’amuse. À Québec, il a enchainé ses succès sans retenue, et après une trentaine de minutes de performance intense, c’est Killing Me Softly qui a émergé sous la pluie battante. Moment suspendu. Les capuchons, les gouttes sur le visage n’ont rien empêché: les voix se sont élevées d’un seul souffle. Le genre de silence bruyant qui ne peut se produire que quand tout le monde connaît la chanson par cœur. Plus tard, c’est No Woman No Cry qui a été reprise avec ferveur. L’artiste y a rajouté un « in Québec » qui a déclenché des cris d’émotion et un sentiment de fierté inattendu. Comme si, juste pour quelques minutes, la ville elle-même devenait un couplet.
Protoje
Mais avant ce grand feu de joie musical, Protoje avait ouvert la voie avec une toute autre énergie, moins flamboyante, mais tout aussi puissante. Représentant majeur du reggae jamaïcain, le chanteur originaire de St-Elizabeth a offert une prestation profonde, réfléchie, presque méditative. Porté par sa voix grave et enveloppante, il a enchainé les titres engagés et spirituels avec la sobriété élégante qui le caractérise. À ses côtés, ses musiciens formaient un tout cohérent, mais c’est surtout l’homme derrière la console qui attirait le regard: totalement habité par la musique, il dansait, mixait, fermait les yeux, comme s’il ne faisait qu’un avec chaque vibration qu’il propulsait. Il trippait sa vie, littéralement. Et cette joie brute, sincère, résonnait jusque dans nos entrailles.
* Photo par Stéphane Bourgeois
Protoje n’a pas besoin d’en faire trop. Son aura parle pour lui. Son message est clair: paix, introspection, révolte douce, amour lucide. Le public, calme mais captivé, s’est laissé porté par ses rythmes, ses racines, ses harmonies hypnotiques. Un parfait prélude à la tempête Wyclef.
* Photo par Stéphane Bourgeois
À la fin de cette soirée contrastée, il ne restait que des visages ravis, des corps trempés, des cœurs pleins. Des refrains qui continuent de tourner dans la tête et des souvenirs qui s’ancrent là où la musique laisse sa trace. La pluie n’a rien effacé. Elle a gravé. C’était une nuit d’été à Québec. Une nuit où la musique a été plus forte que Dame Nature. Une nuit où Wyclef Jean et Protoje ont prouvé, chacun à leur façon, que les véritables artistes n’ont pas besoin de beau temps pour briller.
- Artiste(s)
- Protoje, Wyclef Jean
- Ville(s)
- Québec
- Salle(s)
- Scène Loto-Québec, Scène SiriusXM
- Catégorie(s)
- Dancehall, Festival, Reggae, Reggaeton,
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