Festival de la chanson de Tadoussac 2025 – Jour 1 | Départ venteux sur les chapeaux de roues

C’est sous le signe du vent que s’est amorcé cette 41e édition du Festival de la chanson de Tadoussac. Pendant que plusieurs sont aux Francos, d’autres ont décidé d’aller se refroidir les idées, et le corps aussi, sur la Côte-Nord pour ce très beau festival qui débutait hier, le 12 juin 2025, et se poursuivra jusqu’à dimanche. Tranquille, cette première journée proposant tout de même quatre bonnes options pour commencer du bon pied.

Marie-Pierre Arthur

Difficile de ne pas aimer Marie-Pierre Arthur. Déjà vétérante du circuit des festivals, elle venait présenter à l’église de Tadoussac avec son band émérite son tout nouveau spectacle consacré à son Album bleu de l’an dernier. Un spectacle solide, varié et plein de beauté.

Son dernier opus marquait un tournant dans la carrière de l’artiste. Nettement moins rock, l’album ouvre la porte à des ambiances R&B et pop que l’on ne retrouvait pas dans son répertoire auparavant et ça se manifeste de façon marquée durant le spectacle. Le band en soi demeure classique dans sa forme rock que l’on connaît, avec le travail prépondérant de l’excellent Simon Pedneault, qui brille à la guitare, ou le jeu de claviers pesant de François Lafontaine. La qualité de l’ensemble ouvre la porte à l’exploration et à des segments où la basse de la chanteuse, par exemple, prend des airs de Thundercat au niveau des textures sonores.

* Photo par Jay Kearney

Le tout est cohérent, mais surtout plein de surprises. Les anciennes chansons sont réarrangées entièrement différemment, au point de parfois ne pas tout de suite les reconnaître si on ne tend pas l’oreille. Ça permet de mieux apprécier le travail du groupe, mais aussi de créer un ensemble qui se renouvelle bien d’un morceau à l’autre et qui garde le public intéressé et impliqué. Rien à faire en est un bon exemple, avec une énergie totalement différente de l’originale. Les chansons s’adjoignent donc facilement, avec les nouvelles qui sont régulièrement signalées par un éclairage bleu, concept peu subtil, mais hautement efficace. La finale toute en douceur, avec le groupe réuni autour d’un seul micro pour deux pièces acoustique nous laisse sur une belle note.

Au final, on ressort de cette expérience avec beaucoup de satisfaction, prouvant encore une fois le talent de cette musicienne incontournable. Un must pour les Francos, alors qu’elle performera sensiblement le même spectacle, quoi qu’en version écourtée, mercredi prochain.

Alice Bro

La musicienne et son trio se vantent de grivoiseries dans leur bio et ne mentent pas. Jumelant banjo, accordéon, violon et contrebasse, le groupe joue sur les codes du folk sale en réussissant à bien préparer la foule pour Québec Redneck Bluegrass Project, mais ne réussit pas vraiment à créer un produit réellement intéressant musicalement parlant. Les pièces sont variées, mais les thèmes redondants, les shooters trop présents, et une très longue intervention à propos de anulingus peineront à rejoindre une partie de la foule, du moins en ce qui concerne les journalistes et les pros présents. L’artiste n’est pas à tasser de côté non plus, offrant tout de même une performance honnête et attachante de par son assurance rieuse, mais mériterait probablement d’être vue dans une petite salle chaleureuse plus que sur une scène extérieure de ce type.

Québec Redneck Bluegrass Project

La tête d’affiche était en grande forme hier. Dans les débuts de sa tournée estivale, le quatuor en menait large sur la grande scène extérieure malgré une mise en scène diamétralement opposée. Sous la thématique « Maman, on a réduit le décor », comme nous la présentera avant le show Seb Collin, sorte de papa du groupe, la scénographie propose de redécouvrir les nombreuses chansons de la généreuse setlist en miniature, avec des projections live de marionnettes pilotées par Yanick Capuano dans de petits décors ou sur fond de green screen. Le résultat est aussi drôle que bien réfléchi et garde le public diverti, pour ceux qui ne l’étaient pas déjà avec la simple musique du groupe.

Difficile de ne pas l’avoir été d’ailleurs. Québec Redneck Bluegrass Project aborde chaque spectacle avec une fougue et une énergie fort louable et hier ne faisait pas exception. Dès les premières notes du spectacle, nouvelle chanson ou pas, le public scandera chacune des paroles de JP «Le Pad» Tremblay avec un plaisir contagieux. Le plus bon coup du groupe sera d’ailleurs les quelques medleys qui prendront place durant le spectacle, enchaînant quelques pièces sélectionnées par thèmes question d’offrir de longues plages sonores au public et de créer une rythmique dans les transitions particulièrement réussie.

* Photo par Chloé Gagné

Sans nécessairement être le plus grand fan du groupe à la base, je me suis retrouvé à passer un excellent moment, surtout en hurlant l’incontournable hymne Chu ben plus cool su’a brosse entouré d’amis, notamment la star côte-nordienne du moment Guillaume Hubermont, auteur du très bel ouvrage documentaro-artistique paru en avril dernier Côte Nord : une visite guidée sur la 138. Recommandation au passage.

oui merci

Pari risqué que de placer le groupe montréalais directement après Québec Redneck Bluegrass Project. Il faut dire que ce n’est pas tout le public qui suivra, mais le clash est tout de même présent. Plus cérébrale et texturée, la musique de oui merci offre une belle option pour finir la soirée, même si quelque chose avec un peu plus de mordant aurait permis de mieux continuer sur son erre d’aller.

Absolument pas la faute du quintet, qui parvient tout de même à bien garder la foule dans sa poche, pour ceux qui n’étaient pas trop sur ladite brosse, avec un parterre varié enclin à danser tout autant qu’à parler en fond de salle. Considérons tout de même le pari réussi, surtout vu la qualité des harmonies vocales Mathilde Joncas et Ludovic Leblond de même qu’au travail commendable de Gabriel Couture aux percussions.

* Photo par Chloé Gagné

Une première soirée variée, donc, mais qui commence très bien le weekend pour l’équipe du Festival de la chanson de Tadoussac. Ce soir, si la planète n’explose pas entre-temps, la fête se poursuit avec Les Deuxluxes, Ariane Moffatt, zouz, Grimskunk et Ariane Roy, notamment.