Violent Femmes

Festival de Jazz de Montréal 2014 | Entrevue avec Gordon Dano de Violent Femmes

Le groupe punk folk Violent Femmes est de retour en selle, et s’arrêtera au Métropolis ce jeudi soir, dans le cadre du Festival de Jazz de Montréal. Sors-tu.ca s’est entretenu avec le très sympathique leader de la formation, Gordon Dano, qui a encore beaucoup de jasette et d’opinions sur la musique populaire et son propre passé.

Il y a maintenant plus de trente ans, trois jeunes musiciens méconnus de Milwaukee déposaient ce qui allait devenir un album culte tout à fait improbable : Violent Femmes. À contre-courant de la pop synthétique qui faisait suite à un mouvement punk particulièrement abrasif, Violent Femmes arrivait comme un vent de fraîcheur avec son attitude désinvolte et ses chansons de frustrations adolescentes, de sexe et de répulsion envers l’autorité, le tout arrangé de façon lo-fi à l’aide d’une guitare acoustique, d’une basse acoustique et d’une caisse claire fouettée aux balais.

Gordon Gano ne s’avoue pas nécessairement surpris de jouer ces chansons sur scène à 51 ans. « Je n’y ai jamais pensé, vraiment, mais je ne peux pas dire que ça me paraissait impossible, explique-t-il au bout du fil, en direct de son domicile de Denver. J’ai vu plein d’artistes rock’n’roll qui parvenaient à vieillir tout en restant pertinents, comme les Stones, par exemple. Je ne m’imaginais pas nécessairement durer 30 ans. En fait, on ne se projetait même pas 3 mois en avant, ni même 3 semaines. Notre seul plan de carrière, c’était de continuer à jouer de la musique, parce qu’il n’y a rien d’autre qui me semblait pertinent. Et c’est toujours le cas aujourd’hui. »

Violent Femmes n’a pas lancé de nouvelles chansons depuis Freak Magnet, en 2000, et Gordon Gano est bien conscient que les gens espèrent surtout entendre les vieux succès du groupe comme Blister In The Sun, Kiss Off,  Add It Up ou Gone Daddy Gone. Il ne s’en vexe pas, même que cette durabilité de certains titres à succès explique en grande partie l’existence du groupe en 2014. « Je dirais même qu’il y a quelque chose d’excitant là-dedans. Il y a beaucoup de gens qui ont adoré ces chansons pendant si longtemps, ou même qui les ont découvertes récemment, en pensant ne jamais les entendre live. Cette énergie nous permet de vivre chaque moment et de ne jamais s’en lasser, parce qu’on ne trouvera jamais la façon parfaite de jouer ces chansons. Il y a constamment de l’improvisation, des ajouts, des détours inattendus. Au fond, ça revient à l’idée du jazz : l’aspect improvisation du jazz est très présent dans notre musique, particulièrement live. C’est une facette de notre groupe qui n’a jamais obtenu l’attention qu’elle méritait dans les médias ou même auprès de nos fans. »

Et le fait que de nouveaux fans découvrent Violent Femmes en 2014, à une époque où la musique est carrément ailleurs ?  « Ça n’a aucun impact. Nous n’essayons pas du tout d’y incorporer des éléments en lien avec les modes actuelles, ce serait ridicule. Et je ne crois pas que les jeunes gens ressentent notre musique comme de la ‘vieille musique’. Les gens répondent à la musique en vivant le moment présent, sans s’arrêter pour se demander quelle place occupe ce genre musical dans l’histoire de la musique. »

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Réunion grâce à Coachella

On ne peut pas dire que le climat au sein de Violent Femmes était des plus sains au milieu des années 2000. Il y a eu cette « saga Wendy’s » : Gordon Gano, qui porte à lui seul la responsabilité d’auteur compositeur du groupe, a causé tout un émoi au sein du groupe en acceptant de vendre les droits de Blisters In The Sun à la chaîne de restaurants Wendy’s pour une publicité. Le bassiste Brian Ritchie n’a pas digéré cette décision, si bien qu’une poursuite a été intentée en 2007 à l’endroit de Gano, et le groupe a confirmé sa séparation en 2009.

Les choses se sont évidemment calmées depuis. Si Gordon Gano et son bassiste ont décidé d’enterrer la hache de guerre pour ramener Violent Femmes sur la route avec Brian Viglione comme batteur, c’est en grande partie grâce au festival Coachella. « C’est leur spécialité. À chaque année, ils convainquent des groupes de se réunir, comme Iggy et les Stooges… Je crois que c’est rendu un point d’honneur de tenter sa chance quand Coachella te tend la main. En tout cas, nous, c’est ce qu’on a fait : à la demande de Coachella, on a décidé d’essayer, et la réponse a été fantastique, si bien que plusieurs autres festivals nous ont demandé de joindre leur programmation. »

Mais qu’en est-il de la relation entre Brian et Gordon à ce moment-ci ? « Plutôt bonne. Peut-être pas aussi bien qu’à nos débuts, mais mieux que ça a été depuis des années. Je crois sincèrement que tout le monde y trouve son compte, et sur scène, nos différends n’affectent en rien notre intensité alors tout va bien. »

Assez pour voir naître de nouvelles chansons de Violent Femmes bientôt. « Il n’y a rien de prévu, mais on commence à y penser, je dirais ».

 

Souvenirs de Montréal : Gaétan Roussel et Salomé Leclerc 

Il y a une éternité que Violent Femmes n’était pas venu à Montréal. Gordon Gano, lui, se rappelle très bien avoir visité le Club Soda en compagnie de Gaétan Roussel, pour qui il avait fait tout un travail de production et de co-écriture sur l’album Ginger, en plus de chanter avec lui sur l’album. Il le suivait également en tournée, notamment aux Francofolies 2010.

Gano se rappelle principalement de deux faits en lien avec son dernier passage à Montréal. « Je me rappelle d’avoir été logé dans un très bel hôtel. Tu sais comment les oeuvres visuelles sont généralement moches dans les hôtels ?  Pour la première fois de ma vie, je me rappelle que ce n’était pas le cas, au contraire. C’était un superbe endroit et je ne me rappelle plus du nom… »

Il y a aussi un autre nom qui lui échappait, même s’il se rappelait de détails très précis. « Je me souviens avec précision d’une fille qui chantait tout juste avant Gaétan Roussel au Club Soda. Elle avait une voix rauque, et elle jouait de la guitare électrique, seule sur scène… »

La mémoire du journaliste, elle, ne faisait pas défaut : on l’informe qu’il s’agissait de Salomé Leclerc. Gano avait apparemment approché l’artiste, à l’époque, afin de produire son premier album, qui a finalement été confié à Émily Loizeau.

En ce qui a trait à la ville, Gano admet n’avoir jamais eu l’occasion de rester assez longtemps lors de ses passages à Montréal pour apprécier quoi que ce soit.

Et le Festival de Jazz ?  Ce contexte influencera la performance du groupe ?  “On en a discuté : il y aura peut-être une chanson jazz qu’on ne fait jamais en spectacle, mais ce serait l’occasion de la sortir. C’est un truc de Coltrane. Je ne sais pas encore si on aura le courage de la faire. Brian a longtemps joué du shakuhachi, une flûte japonaise. Il y a joué avec plusieurs combos jazz. C’est lui qui prendra la décision.”

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