crédit photo: Nadia Davoli
Nick Cave

Exposition Stranger Than Kindness : Les atomes culturels de Nick Cave

Quelques jours après avoir conclu sa tournée avec Warren Ellis à Montréal, l’envoûtant storyteller rock Nick Cave présente Stranger Than Kindness, une fascinante exposition atypique explorant son passé et ses référents culturels, ouverte au public dès le vendredi 8 avril à la Galerie de la Maison du Festival à Montréal.

What are you doing in my office ?

Nick Cave lance cette boutade aux journalistes réunis, avec son flegme pince-sans-rire, en prenant place « à son bureau » embourbé de livres de toutes sortes, d’objets, de disques vinyles et d’une dactylo.

« À quelques détails près, c’est pratiquement identique au bureau où j’ai longtemps créé », admet-il en observant la réplique.

L’auteur et chanteur australien s’est livré mardi à une session de questions-réponses avec une dizaine de membres des médias afin de partager sa vision de cette exposition hors-norme montée par la Bibliothèque royale danoise avec sa collaboration.

Le visiteur y est invité à déambuler d’une pièce à l’autre parmi les quelques 300 objets créés ou collectionnés par Nick Cave. Stranger Than Kindness revisite autant son enfance à Wangaratta, en Australie, dans les années 1960, que ses débuts musicaux avec les groupes The Boys Next Door et The Birthday Party, ses époques à Berlin et Londres, et les années plus récentes, profondément marquées par le décès tragique de son fils Arthur en 2015.

Une pièce imite une chambre avec un espace lecture et des cadres affichant des illustrations religieuses.

Une autre incarne le chaos de ses années plus punk, son époque Berlin.

Il y a ensuite sa bibliothèque personnelle : un imposant mur rempli de livres variés, « beaucoup de fictions », qu’on a envie d’épier durant des heures.

Puis ce bureau, la pièce centrale de l’exposition, d’où il nous rencontrait pour l’occasion. Les objets culturels sont empilés pêle-mêle, amassés par un boulimique de musique et de littérature.

« Cette pièce en particulier est comme la fin de quelque chose. Je ne le réalisais pas avant d’y entrer il y a quelques instants, nous exprime Cave. Elle est représentative d’un égocentrisme artistique. Et ensuite, tu traverses cette porte et tout change… »

Sur la porte blanche en question, il est inscrit « I married my wife on the day of the eclipse ». Quand on y entre, la pièce suivante est paisible et épurée : on n’y voit qu’un portrait de sa femme Susie Bick et lui.

Si les premières pièces de l’exposition sont extrêmement chargées, on sent au fil de la visite des points de rupture entre les époques de sa vie. Et aussi, surtout, qu’à 64 ans, l’artiste se déleste des artifices, des influences, et du sacro-saint travail artistique transcendant pour se concentrer sur l’essentiel.

« J’ai compris à la dure qu’il y avait des choses plus importantes pour moi que l’expérience créative. Je crois que sur mon lit de mort, le fait que j’ai écrit The Mercy Seat ne sera probablement pas la chose la plus importante ! »

C’est ce qu’on comprend en franchissant cette fameuse porte blanche.

À la toute fin, on se trouve dans un « couloir de la gratitude », juste avant la sortie. C’est là qu’on y trouve quelques rares artefacts que Nick Cave juge plus importants que le reste : un buste d’Elvis Presley (que Cave considère comme étant « sa principale influence »), le fameux chewing gum de Nina Simone que Warren Ellis a conservé durant des années, un hologramme de son amie (et certaines rumeurs diront ex-petite amie) Kylie Minogue et lui (duo ayant donné lieu à la magnifique chanson Where The Wild Roses Grow) et un courriel de Leonard Cohen reçu quelques jours après le décès de son fils. On peut y lire, tout simplement, une phrase des plus apaisantes : « I am with you, brother. »

Cohen revient souvent d’ailleurs dans les référents exposés. Outre le fameux courriel imprimé sur une feuille blanche, on retrouve son nom sur des livres, ainsi qu’une pochette de Songs of Love and Hate, que Nick Cave a découvert adolescent, relativement tôt dans son développement artistique. « J’étais un enfant étrange qui a grandi dans un village de campagne australien, et j’avais l’impression de ne jamais m’intégrer, de ne jamais ressentir les mêmes choses que les gens autour de moi. Quand j’ai entendu Avalanche pour la première fois, j’ai eu l’impression d’être enfin compris. Cette voix est devenue la voix d’un ami. Le ton de sa voix, c’est comme écouter un copain plein de sagesse », s’exprime-t-il au sujet de la légende montréalaise de la chanson.

Que vous soyez adeptes ou pas de l’oeuvre et du personnage de Nick Cave, l’exposition Stranger Than Kindness est une fascinante façon de décortiquer les multiples éléments qui contribuent à ériger la culture et les valeurs d’un artiste durable et prolifique.

Si vous y mettez les pieds, à votre arrivée dans le bureau, imaginez Nick Cave qui entre dans la pièce et vous dit :

What are you doing in my office ?

Les billets sont présentement en vente par ici.

 

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