Entrevue avec Charlotte Cardin | La longévité du Phoenix

C’est aujourd’hui que Charlotte Cardin dévoile son premier – et très attendu! – album, Phoenix. Faisant déjà grand bruit dans les médias et sur les réseaux sociaux, l’album est sans aucun doute du jamais vu dans le paysage musical québécois. Nous avons pu parler avec elle de l’album, mais aussi de La Voix, de créativité et de pandémie (eh oui!).

PATIENCE ET LONGUEUR DE TEMPS

C’est grâce à son interprétation de la chanson You Know I’m No Good d’Amy Winehouse que Charlotte Cardin-Goyer (à l’époque où elle exploitait son nom complet) a pu intégrer l’équipe de Marie-Mai lors de la première saison de la très célèbre émission La Voix en 2013. Épatant par sa présence exceptionnelle sur scène et sa voix déjà très mature et précise, Charlotte Cardin a eu peu de peine à se rendre en finale, où Valérie Carpentier (de l’équipe d’Ariane Moffatt) a remporté les grands honneurs.

Ayant pu bénéficier de la visibilité apportée par l’émission sans avoir à se soumettre à un contrat « décerné » en cas de victoire de la compétition, Charlotte Cardin voit sa défaite en finale comme un « cadeau du ciel », dédaignant visiblement un pacte « qui n’est vraiment pas avantageux pour les artistes ». « Ce n’est vraiment pas des contrats où les artistes ont l’upper-hand », précise l’artiste.

Charlotte Cardin maitrise aussi bien l’art de faire mariner que Ricardo : c’est huit ans après La Voix que Charlotte Cardin dévoile finalement Phoenix, un premier album intimiste qui dévoile de nouvelles sonorités pour la musicienne. La gestation de l’album aura été un processus de longue haleine, mais aura été fructueuse. Phoenix est un album varié, qui constitue un parfait bonbon doux-amer pour bien commencer l’été. On y retrouve des chansons déjà entendues en spectacle (comme la ballade Good Girl et l’excellent Passive Agressive) et des singles dévoilés au fil des derniers mois (comme l’intense Meaningless ou l’acclamé Daddy), mais aussi des nouvelles compositions qui brouillent le cadre dans lequel nous sommes habitués de voir l’artiste baigner.

Ceci est notamment le fruit d’amitiés développées à travers les années. C’est ainsi que l’on retrouve Marc-André Gilbert, Jason Brando et Connor Seidel au cœur de la production et de l’écriture de l’album, alors que le célèbre tiktokeur Lubalin est derrière l’écriture de la chanson éponyme. Mais alors, Charlotte Cardin aurait-elle filée des griffes de La Voix pour se retrouver dans un boys club? La principale intéressée se défend en précisant non seulement que ses collaborateurs musicaux sont ses amis, mais qu’elle est entourée par de nombreuses femmes, notamment au niveau de la direction artistique et de la gérance.

RUPTURES ET CONTINUITÉS

Après des semaines de promotion et d’entrevues Charlotte Cardin veut clairement faire ressortir quelque chose : Phoenix est l’incarnation d’un long processus de libération pour l’artiste à de nombreux égards, que ce soit au niveau personnel qu’au niveau de l’écriture (et son « aspect thérapeutique » lui ayant permis de « catalyser beaucoup de choses ») et de la direction artistique.

« J’avais envie d’explorer plus de couleurs, d’avoir plus de fun, essayer des nouvelles choses » mentionne la Montréalaise par rapport au développement d’une identité visuelle. Il est vrai que lorsqu’on compare aux EP Main Girl et Big Boy, Phoenix se présente comme quelque chose de moins minimaliste et sobre, autant au niveau visuel que musical. « Si les gens qui écoutent cet album-là sentent une petite partie de libération à un certain point dans l’album, et bien je sentirai qu’il aura accompli ses fonctions », précise-t-elle.

Charlotte Cardin garde toutefois certaines balises. Conservant des artistes comme Radiohead, les Spice Girls, Christina Aguilera et Nina Simone à titre d’inspirations, la chanteuse garde une incisivité dans sa voix et une certaine violence dans sa musique qui garde la tendance qu’elle établit depuis déjà quelques années, et qui rappelle parfois le style de certaines chansons de James Bond.

LE MULTIMÉDIA EN TEMPS PANDÉMIQUES

Entretenant déjà depuis quelques années une présence accrue sur les réseaux sociaux, Charlotte Cardin a privilégié davantage ceux-ci durant la pandémie. Les évènements de la dernière année ont contraint l’artiste à reporter la sortie de l’album. L’artiste est catégorique : elle n’avait aucunement envie de retoucher l’album durant la dernière année, de peur de vouloir le retravailler infiniment. La réalité a été légèrement différente par rapport aux ambitions visuelles et aux clips : « On a dû faire certains sacrifices, mais pas tant dans les concepts », précise ainsi l’artiste, qui reconnaît que l’ « on ne consomme pas seulement la musique avec les oreilles. »

 

Si Charlotte Cardin semblait excitée de parler de la sortie de son premier album, elle le semblait tout autant – voire davantage – à l’idée de présenter la semaine prochaine The Phoenix Experience, un spectacle virtuel sur lequel elle planche depuis déjà trois mois. Alternant entre des segments cinématographiques et des segments en direct (live), le spectacle exposera 15 tableaux distincts, le tout avec « une mise en scène qui retrace le parcours de l’artiste de ses débuts à aujourd’hui », provoquant « un récit grandiose, tout en restant encré [sic] dans l’intimité de l’artiste ».

Cette présentation a de quoi mettre l’eau à la bouche, surtout lorsque l’on sait que les festivals ne reprendront pas leur cours de sitôt. Osheaga est annulé, mais retrouverons-nous dans la formule hybride des Francos ou du Festival de Jazz? « Je n’ai pas encore de confirmation », répond-elle simplement. Elle confirme par ailleurs que le public n’aura pas à attendre huit autres années pour un nouvel album, et explique qu’elle travaille déjà sur le prochain.

En attendant, nous avons maintenant de quoi nous mettre sous la dent.

L’album Phoenix sort aujourd’hui. Le spectacle virtuel The Phoenix Experience sera offert le jeudi 29 avril à 20h. Des billets (pouvant inclure des offres promotionnelles ou une rencontre individuelle avec Charlotte Cardin) sont toujours disponibles.