Critique | Ventre à La Licorne

Sur fond de papier mâché et recraché, Steve Gagnon nous livre Ventre, un texte à l’image de son décor. Accompagné sur scène de Marie-Soleil Dion, Gagnon expulse un éditorial sur la vie de couple et l’amour en ce début de vingt-et-unième coriace et blasé, duo mis en scène par le sensible Denis Bernard. À voir pour le miroir de notre génération, qu’il nous plaise ou non. À la Petite Licorne, du 7 au 23 janvier.

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Elle l’a trompé, il est parti. C’est pas nouveau, accordé. Mais il y a beaucoup plus derrière ce couple déchiré. Il y a la guerre pour pas que la lumière s’éteigne, jamais. Pour que la dignité et l’intelligence humaine triomphe. C’est ce qui ressort du texte de Steve Gagnon.

Par contre, sur le coup, on ne s’en rend pas trop compte. On a devant nous un couple qu’on connait, qu’on a vécu cent fois, dans nos parents, puis dans nous-mêmes. Deux personnes qui se gueulent qu’ils s’aiment.

Puis vient le discours électoral très senti de la personne qui voudrait désespérément se faire réélire dans le cœur de l’autre. En l’occurrence ici la très nuancée Marie-Soleil Dion, qui nous fait rire tellement c’est de même que ça se passe en réalité. Tellement on est prêts à tout en temps de crise. Toutes les stratégies sont bonnes pour gagner des points.

La poésie est si criante dans Ventre qu’elle fait ressortir toutes les sphères en même temps, le politique, l’intime, le social, l’individu, le peuple, en restant extrêmement liées à nos préoccupations immédiates.

Mise en scène dichotomique

Sur le plan de la mise en scène, Denis Bernard aussi gagne en dichotomie, en
permettant aux personnages de faire physiquement le contraire de ce qu’ils disent,
utilisant ainsi leur synergologie plutôt que leur verbe. Et parfois, en leur faisant faire
exactement ce qu’ils disent, se mettant à nu devant l’autre, donc devant nous.

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Un tel évènement ne passe jamais inaperçu, on sent toujours la tension et les commentaires
monter de la salle. On l’a vécu tout de même en douceur, et cela allait de soi. Un couple de quatre ans d’âge ne resterait jamais en bobette dans un bain, allons.

On ignore si l’idée vient de la mise en scène ou de l’auteur ou du processus lui-même, mais des titres de tableaux apparaissaient, comme pour délimiter les scènes de cette longue joute verbale. Il était rafraichissant de voir apparaître « le Passion Flakie », « Les mains », « L’auberge du chien noir » ou encore « L’autre sang ».

Tant de titres inspirants, désarmants, intrigants qui ponctuaient le dialogue, lui redonnant ces conventions théâtrales. Car il aurait été facile de traité ce texte de façon cinématographique tant il est ancré dans la réalité, malgré son poétique instinct. « La promesse » finale recoud la déchirure tant bien que mal, nous laissant sur une note d’espoir salvatrice.

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