Emovere

Critique théâtre: Emovere au Quat’Sous

Éric Jean, directeur général et artistique du Théâtre de Quat’Sous, à convié sept acteurs à se confier sur le legs, l’enfance et l’identité. Ces derniers forment le clan d’Emovere, dernier né du processus d’écriture vivante instigué par le metteur en scène.  Celui-ci a demandé aux acteurs et danseurs d’improviser sur les thèmes choisis, et sous la plume de Pascal Chevarie, auteur et dramaturge, le spectacle a pris vie. La pièce met en vedette Jasmine Bee Jee, Matthieu Girard, Simon-Xavier Lefebvre, Aude Rioland, Sasha Samar, Marie-Hélène Thibeault et Klervi Thienpont.

Émouvoir, se mettre en mouvement… c’est ce que signifie le mot latin emovere et voilà donc ce que les artisans du spectacle font, à travers leurs propres histoires, celles des autres, celles inventées qui semblent vraies.  Beaucoup de fluidité dans la mise en scène d’Éric Jean, de la lumière également.  On sent chaque personnage soutenu de part et d’autre, jamais seuls.  Il faut dire qu’il a su s’entourer d’une brochette de gens aux parcours divers et colorés. Quasiment impossible pour eux de manquer de justesse, puisque les comédiens nous livrent leur vécu, leurs angoisses face à leur progéniture, les angoisses léguées par leurs parents, toute chose pertinente les touchant directement.

Jasmine Bee Jee époustoufle de sincérité et de vulnérabilité quand sa voix puissante et nuancée s’élève pour saluer son père qu’elle n’a pas connu.  Les pétages de coches de Marie-Hélène Thibeault allègent en provoquant de bons rires francs, et Sasha Samar, dont certains ont connu l’histoire dans Moi, dans les ruines rouges du siècle, nous désarme une fois de plus en s’adressant à son fils.  La lumineuse Klervi Thienpont éclaire la scène avec une ode à sa grand-mère maternelle atteinte d’Alzheimer et chacun tire son épingle du jeu.  Dans une scène, on se croirait même invité à une soirée intime où le vin et les secrets coulent en parallèle.

 

Ému et renversé

Le décor de décombres rappelle le sinistre, en plus d’une allusion à la disparition de Pompéi, ville ensevelie par le Vésuve. Mais l’atmosphère est à l’ouverture, ce qui explique les murs éventrés et la transparence des pièces. Effets particulièrement réussis du scénographe Pierre-Étienne Locas, en plus d’un escalier qui donne sur un balcon/salle de bain/chambre.

Dès le départ, on a accès visuellement aux acteurs, aux coulisses, à la préparation, et tout ça entraîne le spectateur à se sentir concerné, impliqué.  Comme une télé-réalité poétisée mettant en vedette des candidats intelligents et émouvants.  Même les costumes étaient tellement bien choisis que les acteurs semblaient avoir magasiné dans leur garde-robe.  Chapeau à Cynthia St-Gelais!

Le public a chaudement accueilli le spectacle, personnel et chargé, et il pouvait s’y sentir chez lui, ému de voir que ça lui ressemble beaucoup. Et il pourra continuer de se sentir chez lui dans l’enceinte du Théâtre de Quat’Sous jusqu’au 19 mai.

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