Billy (les jours de hurlement)

Critique théâtre | Billy (The Days of Howling) à La Chapelle

Une production du Talisman Theatre, Billy (The Days Of Howling) est présenté pour la première fois en anglais aux scènes contemporaines La Chapelle. Du 14 au 25 octobre, les excellents Davide Chiazzese, Susan Glover et Nadia Verrucci plongent leurs spectateurs au cœur de cette œuvre drôle, dérangeante et actuelle.

La pièce de Fabien Cloutier, qui s’est mérité le Prix Gratien Gélinas en 2011, est inspirée du malaise social et de la violence engendrés par l’accumulation de nos frustrations et de nos préjugés. Il est difficile de ne pas se reconnaître dans ces personnages aussi réalistes qu’exagérés, qui étourdissent avec leur venin d’insultes et d’idées préconçues – résultat de leur isolement qui les étouffe sans qu’ils s’en rendent compte.

Photo de courtoisie, par Maxime Côté.

Photo de courtoisie, par Maxime Côté.

Dans un décor épuré et étranger à l’action scénique, le père de Billy (Chiazzese), la mère d’Alice (Verrucci) et la fonctionnaire (Glover) parlent en monologues entrecroisés. Leurs discours semblent parfois se transformer en échanges, mais ce n’est généralement qu’une illusion, et les personnages continuent en fait à alimenter leurs jugements sur les autres en les gardant pour eux-mêmes. Ils font monter la tension entre eux en s’insultant à coup de « Go fuck yourself » et de « Crazy bitch », mais c’est parce qu’ils se sentent impuissants devant les bourbiers administratifs. Ils chiâlent, ils jugent, ils se fâchent et ils inventent des caractéristiques et des histoires aux gens qu’ils côtoient mais ne connaissent pas, des habitudes que même un drame auquel ils assistent tous n’arrive pas à ébranler.

La pièce tourne autour de l’esseulement et de la folie auxquels peut nous mener l’hiver québécois. La neige en toutous blancs est pelletée par les personnages à plusieurs reprises, dans des efforts répétés et inutiles puisqu’il en tombe toujours plus – métaphore de l’impuissance qu’on peut ressentir devant ce qui est plus grand que soi.

Photo de courtoisie, par Maxime Côté.

Photo de courtoisie, par Maxime Côté.

La force de Billy (The Days of Howling) réside dans la ressemblance saisissante de ses personnages avec les Montréalais de la classe moyenne, avec leurs jugements et leurs discours déconnectés et souvent erronés. Les personnages rendent mal à l’aise à force de crier contre les autres leurs préjugés classistes et racistes, et en se croyant meilleurs que les autres et en position de leur indiquer comment vivre.

L’incompréhension, la frustration, l’isolement et la violence verbale tissent, tantôt avec humour, tantôt avec gravité, les scènes du quotidien présentées dans Billy. Une réflexion pertinente sur la proportion démesurée que peuvent prendre nos irritations journalières, portée par une distribution sans défaut.

 

 

 

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