Amadeus en ciné-concert | (re)découvrir Mozart

Les 2 et 3 juin prochains, à la Place des Arts de Montréal, on pourra assister à un ciné-concert d’une envergure assez exceptionnelle : un grand orchestre et un chœur interpréteront en direct la musique du film culte Amadeus, de Milos Forman, qui raconte la vie de Wolfgang Amadeus Mozart entre réalité et fiction. Une performance qui nous a donné envie d’en savoir plus, à la fois sur l’immense compositeur Mozart, sur le film Amadeus, et sur le ciné-concert en lui-même. Rencontres avec trois experts en la matière.

Les trois intervenants s’accordent sur une chose essentielle : Amadeus est un grand film. « L’une des plus belles comédies dramatiques du cinéma », nous dit Guy Marchand, luthiste et musicologue de formation, chargé de cours en histoire de la musique à l’Université de Sherbrooke et conférencier aux Belles soirées de l’Université de Montréal et aux entretiens pré-concert de l’OSM. Le producteur délégué chargé de la musique du ciné-concert, Denis Chabot, exprime lui aussi sa satisfaction : « Pour moi, Amadeus, c’est clair que ça touche tous les musiciens que j’engage. Pour nous [N.D.L.R.: il est également contrebassiste dans l’orchestre qui jouera à la place des Arts], c’est le summum. C’est quand même un film super important ! » Alors qu’il dirige depuis plus de vingt ans des productions musicales de cette ampleur – il a été récemment producteur délégué pour les spectacles Game of Thrones, et Harry Potter à l’école des sorciers – la présentation d’Amadeus représente pour lui un accomplissement.

Pour chaque musicien classique, Mozart reste le compositeur avec lequel on a un grand plaisir. C’est tellement transparent cette musique, tellement parfait…

L’oeuvre cinématographique

Le film de Milos Forman raconte en effet W.A. Mozart, son génie musical et son inspiration créatrice. On suit tout au long du film la descente aux enfers du jeune compositeur, d’abord encensé par la cour mais qui subit une profonde rivalité avec le compositeur officiel de la cour de Joseph II, Antonio Salieri. Celui-ci, jaloux, décide de pousser Mozart vers la mort et raconte ses propres souvenirs à un prêtre dans une dernière confession. Le film de Forman est adapté d’une pièce de théâtre éponyme de son scénariste Peter Shaffer.

Marie-Hélène Benoit-Otis, professeure de musicologie à l’Université de Montréal, est un peu plus mesurée : « Ça reste un excellent film. C’est le festival national de l’invention, mais comme film, comme scénario, ça marche très bien. » La vie de Mozart présentée à l’écran est en effet très éloignée de ce qu’on connaît du compositeur. « On a eu longtemps cette image du génie qui avait déjà tout écrit dans son esprit ; on sait maintenant que c’est pas vrai du tout, que Mozart aussi raturait. L’image que l’on voit dans le film de Forman est très belle, mais elle n’est pas vraie », reprend Marie-Hélène Benoit-Otis.

Une opinion que Guy Marchand partage mais qu’il pousse plus loin : « Ce film n’est pas complètement gratuit, il est basé sur des documents historiques qui sont discutables. C’est ça qui est génial ! » Alors que l’histoire de Mozart présentée dans Amadeus semble inventée de toutes pièces, elle est en fait remplie de clins d’œil historiques : le personnage de Salieri a vraiment existé, il a même côtoyé Mozart ; la mort du génial compositeur reste emprunte de mystère ; le Requiem si célèbre a bel et bien été commandé de manière anonyme.

amadeus-live

Guy Marchand, qui rédige actuellement un livre sur Amadeus, reprend : « Quand on connaît la vraie histoire, on apprécie mieux le film, à condition de ne pas se méprendre sur les intentions du réalisateur et du scénariste, qui ont voulu jouer sur l’image du génie créatif. On voit la vraie histoire à travers des clins d’œil. »

Ces libertés artistiques prises par le réalisateur et le scénariste n’ont cependant pas nui au film, car Amadeus a reçu quelques 40 prix, dont huit Oscars et quatre Golden Globes. Finalement, plus que présenter la vie d’un compositeur, on peut considérer que Forman et Shaffer ont préféré montrer au public les exceptions qui ont fait de W.A. Mozart un des compositeurs les plus connus encore aujourd’hui.

Le film est Mozartien dans l’âme, à l’image des opéras du compositeur. On retrouve le même type d’ironie dans le film qu’on peut trouver dans les opéras de Mozart.

Marie-Hélène Benoit-Otis, qui effectue actuellement des recherches sur l’utilisation de Mozart par la propagande nazie, nous explique dans ce cadre que le compositeur « est beaucoup représenté comme le génie universel qui transcende les différences entre les peuples. Chacun l’utilise un peu comme il veut, à sa propre sauce. » Pour Guy Marchand, le film représente entièrement une idée qui vient à la base d’une petite pièce de théâtre écrite par Pouchkine, Mozart et Salieri (1830) : « C’est une réflexion sur le génie de la part de quelqu’un – Salieri – qui a juste assez de talent pour se rendre compte que lui-même n’a pas ce génie ». Les libertés historiques sont quant à elle acceptées par le musicologue : « Je pense que l’idée, c’était de resserrer l’action autour d’un triangle amoureux, entre deux hommes et la musique ». Il ajoute également que pour lui, « le film est Mozartien dans l’âme, à l’image des opéras du compositeur. On retrouve le même type d’ironie dans le film qu’on peut trouver dans les opéras de Mozart. » Marie-Hélène Benoit-Otis s’accorde sur cette idée : « C’est une belle façon de le voir, c’est un univers très imaginatif qui rappelle les opéras de Mozart et leur côté très vivant, foisonnant ».

Et cet aspect foisonnant sera définitivement repris pour le ciné-concert de la Place des Arts. Denis Chabot nous en dit plus sur ce qui se jouera les 2 et 3 juin prochains à Montréal : « C’est le film de A à Z, rien n’est enlevé sauf la musique. Un ingénieur dans la salle mixe les voix et les bruits du film, pour que ce soit balancé avec l’orchestre. L’orchestre n’est pas amplifié, on joue comme si c’était un concert, on est en parfaite synchronisation avec le film… On fait exactement ce qu’il y a sur le film, mais en vrai. »

Au programme, une bande sonore signée Mozart, évidemment, avec une pièce de Salieri. Si Guy Marchand regrette que Forman n’ait pas fait le choix d’instruments d’époque pour accompagner son film, Marie-Hélène Benoit-Otis trouve quant à elle que ce genre d’évènement « peut faire découvrir un nouveau répertoire. Un film avec orchestre, c’est particulier, l’élément visuel et l’élément de narration viennent apporter quelque chose de plus. »

Denis Chabot renchérit : « Ça, c’est de l’IMAX x3. L’influence de la musique est tellement grande, surtout dans ce genre de film ou la base du film, c’est la musique. » Pour lui, ce spectacle est également « une belle introduction à la musique d’orchestre. Les gens ne sont pas obligés de connaître la musique. C’est la musique de Mozart de toute façon, ça peut pas être meilleur que ça ! Ça peut aussi être une super expérience pour les enfants, pour leur faire découvrir la musique qu’ils ne connaissent pas. »

Nul doute que le ciné-concert qui se jouera les 2 et 3 juin prochains à la Place des Arts promet d’être au pire intéressant, pour le dispositif grandiose auquel le public sera confronté ; au mieux extraordinaire, nous embarquant le temps d’une soirée dans la vie trépidante de Mozart imaginée par Milos Forman, et les sublimes musiques du compositeur auxquelles personne n’a osé changer quoi que ce soit.


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* Cet article a été produit en collaboration avec La Place des Arts.

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