crédit photo: Pierre Langlois
Lucian Ban & Mat Maneri

Mat Maneri et Lucian Ban à la Casa | Un voyage au confluent du folklore transylvanien et du jazz contemporain

Avec une prémisse originale, à savoir l’exploration du répertoire folklorique de la Transylvanie tel que retranscrit par le compositeur Béla Bartók au début du XXème siècle, le duo Mat Maneri & Lucian Ban nous a proposé hier, le 15 avril 2025 à la Casa de Popolo dans le cadre d’une soirée Off Suoni, une relecture moderne de ce folklore avec un grand respect tout en en poussant les limites avec des accents jazz contemporain et des improvisations originales, le tout avec une complicité musicale apparente et réjouissante.

Lucian Ban est un pianiste et un improvisateur de renom. Originaire de Roumanie et basé à New York, il explore la musique classique européenne du XXe siècle en la croisant avec le jazz. Accompagné de Mat Maneri à l’alto dans cette revisite du folklore transylvanien, le duo nous offre une lecture originale avec une grande part d’improvisation. Le duo a déjà fait deux enregistrements sur ce concept que l’on peut retrouver chez le prestigieux label ECM.

Les deux musiciens impressionnent par la façon dont les lignes mélodiques et les interventions se mélangent d’une façon naturelle et instinctive, l’intrication des idées va au-delà d’un classique questions/réponses ou de simples relances et semble presque chamanique.

Il y a aussi le travail du son alors que Maneri attaque son instrument aussi bien en pizzicato qu’en mode percussif ou en ouvrant des horizons microtonaux tandis que Ban étouffe régulièrement les cordes de son piano ou se lève régulièrement emporté par le moment.

Si la trame folklorique est prétexte à des échanges enlevés entre les deux musiciens, elle reste tout de même très respectée et préservée, guidant le vocabulaire et l’interprétation des cinq long titres qui nous sont proposés ce soir. L’improvisation est le maître d’œuvre de la soirée mais toujours avec déférence et révérence envers cette culture musicale du peuple transylvanien. Les projections nous permettent de replacer le contexte avec des films et photographies du début du XXème siècle

L’altiste Mat Maneri et le pianiste Lucian Ban ont su nous charmer au cours de cette soirée à la fois fougueuse par le jeu et le tempérament des musiciens et une admiration certaine pour ce folklore. Le résultat est prenant et surprenant, la richesse du résultat est étonnante et donne une grande place aux deux musiciens de s’exprimer pleinement avec toute la profondeur de leur jeu.

 

Cabral Jacobs et Rosalie Chretien

En ouverture de la soirée, le duo Cabral Jacobs et Rosalie Chretien nous ont présenté le fruit de leur collaboration. Dans un style ouvertement expérimental et free jazz, le travail des deux musiciens m’a très agréablement surpris, tout en maîtrise et retenu, ils ont su instaurer un dialogue fluide plein de richesse et de surprises où un fructueux travail de préparation et de composition était tangible.

Rosalie Chretien est à la batterie et au chant et Cabral Jacobs joue du saxophone, chante et nous offre quelques ponctuations par le son d’un antique dictaphone à bande. Si l’absence d’instrument harmonique dans la formation pour jouer des accords aurait pu rendre le propos aride voir rebutant, les échanges entre les deux nous ont prouvé le contraire, tout en réussissant à sortir des ornières du genre et en évitant les envolés avec stridences énervées du saxophone et coups rageurs de cymbales. À la place, c’est tout un paysage sonore qui s’est installé avec un développement subtil et bien construit compléter d’une certaine sérénité.

C’est avec plaisir que l’on cherchera à revoir sur scène les échanges inspirés de Cabral Jacobs et Rosalie Chretien où la délicatesse de l’interprétation et la finesse du rendu ont su me charmer.

 

Photos en vrac de Mat Maneri et Lucian Ban

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