Les Misérables

Les Misérables (ou la fois où Broadway fut invité à Wilfrid-Pelletier)

Ces jours-ci à la Place des arts s’arrête la production Les Misérables, le spectacle musical inspiré du roman éponyme de Victor Hugo. C’est donc dans la langue de Shakespeare que se déroule cette production à grand déploiement dont la scénographie et les costumes valent à eux seuls le déplacement.

La pièce commence par le Prologue. Dès les premières notes, on constate que la direction de l’orchestre était impeccable. En bonne posture, celui-ci donnait un souffle incarné au balbutiement de l’acte un qui a débuté avec quelques enjeux techniques dans l’amplification des voix. Ensuite se sont enchaînés problèmes de micro enceintes en sourdine donnant un peu l’impression d’écouter un film tout bas et que l’action se passait très loin derrière.  Heureusement, c’est rentré dans l’ordre après quelques minutes un peu pénibles.

Dès le premier tableau, le personnage de Valjean interprété par Nick Cartell, qui en est à plus de 1200 représentations dans ce rôle, a saisi l’auditoire davantage par la puissance de sa voix que par son interprétation. Celui qui lui a vraiment volé la vedette dans le premier tableau est Randy Jeter qui incarne l’Évêque de Digne. Un timbre chaleureux et une théâtralité très crédible.

Dans le deuxième tableau pendant lequel on assiste à l’ostracisation et le déclin dans la misère de Fantine, les chœurs étaient à l’honneur. Que ce soit pour la pièce At the End of the Day où on entendait les chants des travailleurs et chômeurs ou dans celui de Lovely Ladies avec les dames et leurs clients; c’est dans cette troupe de formidables voix que se reflétait la signature Broadway de cette production. Justes et puissantes, ces voix unies dans ces mélodies uniques que l’on a tous déjà entendues quelque part justifient l’engouement pour ces représentations. Les spectateurs ont pu s’émouvoir non seulement des chœurs mais l’enchantement venait aussi de la façon dont ces interprètes habitent la scène.

Il serait étrange de ne pas parler du personnage de Fantine quand on vient de voir Les Misérables. La pauvre interprète de celle-ci m’a paru essoufflée pour une large portion du spectacle. En revanche, Mya Rena Hunter qui elle incarnait le personnage d’Éponine s’est définitivement illustrée dans tous ses solos. Le plus beau tableau dans l’interprétation de ces pièces se retrouvait à la fin du premier acte dans A Heart Full of Love, chanson dans laquelle on entend Cosette et Marius en duo avec Éponine qui fait le contre-chant. Ce fut un magnifique moment.

Après l’entracte, le spectacle musical nous entraîne dans la révolte des révolutionnaires avec barricades ostentatoires, coups de fusils, stroboscopes et fumée : de quoi en mettre plein la vue. Je tiens à souligner la présence sur scène et la voix formidablement puissante et juste de Devin Archer qui incarne avec brio le meneur des rebelles. Il fait un porte-drapeau très crédible et incarné.

Les rôles d’enfants, soit celui de la jeune Cosette et celui de Gavroche étaient bien personnifiés et ont ravi l’auditoire. La voix de Cosette plus âgée est surprenante. Elle a poussé des notes à faire rougir Mariah Carey!

Il se produit beaucoup de décès lors de la bataille dans l’acte deux mais l’action nous ramène à l’histoire d’amour entre Cosette et Marius qui se joint à la lutte révolutionnaire. Marius est un personnage très présent tout au long de l’acte deux la justesse de son jeu culmine dans la pièce Empty Chairs at Empty Tables dans laquelle il pleure la mort de ses compatriotes.

Les superbes costumes tourbillonnent par la suite dans le bal qui accompagne ses noces avec Cosette. Au fait, malgré le drame qui se joue dans Les Misérables, le couple de M. et Mme Thénardier est si savamment joué autant dans le jeu du corps que celui de la voix, ces personnages viennent détendre l’atmosphère un peu lourde du spectacle à quelques reprises grâce a l’aspect humoristique de leur jeu.

Les Misérables, c’est avant tout une fresque sociale que Victor Hugo a construite autour de certaines valeurs dont celle du pardon, de l’honnêteté et de l’amour.  Quand on a vu le policier Javert se jeter dans la Seine dans un subterfuge scénique bien fait, ce n’est pas le Paris Olympique qu’on voyait, mais celui qui un jour, abritait des luttes qui ne sont peut-être pas complètement terminées.

Au-delà des voix, des costumes et de la boucane, ce spectacle musical peut encore éveiller les esprits. Des représentations sont prévues jusqu’au 4 août. Détails et billets par ici.

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