ZZ Top

ZZ Top à la Place Bell | Même après 56 ans, les barbus se portent bien

Il fallait s’y attendre : on est loin des belles années du légendaire trio blues rock texan. Est-ce que ça veut cependant dire que la performance d’hier, 25 juin 2025, à la Place Bell était inhéremment décevante? Absolument pas. Malgré le décès du bassiste Dusty Hill en 2021, Billy Gibbons et ses accompagnateurs ont livré une performance honnête et surtout le fun, pis c’est ça l’important.

The Wallflowers

Pour la présente tournée, le groupe s’est adjoint les services de The Wallflowers, projet du multi-instrumentiste californien Jakob Dylan. Si la performance était techniquement exemplaire, avec des arrangements fournis et des musiciens accompagnateurs solides, le ton est assez générique et peine réellement à susciter l’intérêt. Les chansons se suivent et se ressemblent, ponctuées de soli de guitares, excellents ceci dit, mais sans démontrer de profondeur qui aurait permis de rester accroché à la prestation. Le son assez faible n’aidait pas particulièrement disons-le, de même que le public qui se fait tardif.

Ce sont surtout les trois dernières pièces qui se révéleront intéressante et viendront chercher des applaudissements : un cover de Tom Petty, The Waiting, et deux titres de l’album de 1996 Bringing Down The Horse, One Headlight et The Difference, les deux plus grands succès du groupe. One Headlight sera certainement la meilleure du spectacle avec des claviers fluides et un intéressant jeu de l’un des accompagnateurs à la guitare qui utilisera son instrument sous sa forme acoustique comme un lapsteel pour un agréable résultat. Pas un mauvais choix de première partie, mais il manquait néanmoins un peu de bravado à l’ensemble.

ZZ Top

Disons-le d’emblée : le plus gros problème de la soirée, c’était le public. Les gens étaient au mieux tièdes. Ça a transparu avant même d’entrer dans la salle, pendant la performance de la première partie et tout au long du spectacle de ZZ Top alors que le pauvre duo Francis-Gibbons devra régulièrement aller se quêter des réactions en-dehors de celles venant avec les 4-5 gros hits habituels. Même l’entrée du groupe sur scène se fait dans une ambiance que l’on aurait espéré plus électrique.

Le son est aussi timide pendant la première chanson, avec un manque criant de basse dans le mix. Le groupe lance pourtant la soirée en force l’iconique Got Me Under Pressure, chanson sur laquelle Elwood Francis, roadie et guitar tech du groupe pendant des décennies et désormais remplaçant de Dusty Hill sur scène depuis 2022, joue de sa ridiculement énorme bass à 17 cordes, achetée à la blague lors de la dernière tournée. On y constate également que la voix de Billy Gibbons n’est plus ce qu’elle est, mais à quoi d’autre s’attendre sachant que le guitariste et chanteur fait désormais dans les 74 ans bien sonnés.

Et sauf pour ça, il est en forme pour un gars de 74 ans. Wood, 10 ans plus jeune, l’est tout autant. Les deux musiciens se permettent des éléments de chorégraphies ponctuels, aussi drôles qu’attendrissants de la part de vétérans comme eux. Ça accompagnera surtout les chansons plus pop du groupe; celles qui l’auront caractérisé pendant les années 80 quand ZZ Top troquera le southern blues qui aura fait sa renommée pour un alliage de rock et d’influences disco avec Eliminator. De cet album sortent les certains des titres qui viendront le plus faire réagir le public, sans surprise, avec Got Me Under Pressure, Gimme All Your Lovin’, Sharp Dressed Man et Legs qui seront tous joués à des moments stratégiques du spectacle, les deux dernières concluant d’ailleurs la performance avant le retour sur scène du groupe pour l’incontournable rappel.

Billy Gibbons est d’abord et avant tout un mélomane. Il aime la musique, aime jouer de la musique, et aime improviser sur de la musique. En guise d’exemple, on aura droit à deux covers durant la soirée : le premier de la chanson I Thank You du duo soul Sam & Dave, brillamment jouée avec un respect évident, l’autre de l’artiste country Merle Travis, qui viendra chercher un peu plus de réactions de la foule. Le groupe les réinterprète à sa sauce pour mieux nous les faire découvrir et apprécier, y ajoutant des soli allégrement. Soli d’abord un peu rouillés en début de spectacle, âge oblige, mais qui retrouveront de plus en plus leur éclat au fur et à mesure que la soirée avance, question de nous rappeler pourquoi Gibbons s’est rapidement établi comme l’un des grands guitaristes blues de sa génération malgré des compositions parfois simplistes.

Cet aspect blues, plus que southern rock, transparaît énormément dans la conception de la setlist d’ailleurs, avec des chansons comme Waitin’ For The Bus, Jesus Just Left Chicago, l’excellente My Head’s In Mississippi, mon interprétation préférée de la soirée, et Brown Sugar, qui mettront aussi bien de l’avant les performances vocales de Gibbons, avec une voix plus basse et moins puissante que jadis, mais généralement tout de même bien contrôlée.

Résultats donc. Est-ce que l’âge a rattrapé le groupe? Certainement. Est-ce que le lustre d’antan est toujours présent? Par moments. Est-ce que la scénographie excuse tout? C’est trop simpliste pour. Mais est-ce que c’était un bon spectacle? Oui. Pas de temps morts; plein de hits, avec La Grange pour conclusion la soirée; des bonnes performances musicales, même du plus discret Frank Beard, ironiquement seul membre du groupe à ne pas avoir de barbe, derrière ses tambours; un humour qui n’a rien perdu avec les années et surtout dans musiciens qui semblent avoir du plaisir et continuer à jouer pour les bonnes raisons, même après 56 ans (!!!) de carrière. Jamais on n’a l’impression de les voir sur scène pour faire une passe de cash et ça, ça fait chaud au cœur.

Événements à venir

Vos commentaires