Thomas Enhco au Musée des Beaux-Arts | Génie à découvrir

Jeudi dernier, c’est le jeune et talentueux pianiste français Thomas Enhco qui officiait au « 5 À 7 EN MUSIQUE » organisé par La Fondation Arte Musica, à la Salle Bourgie du Musée des Beaux-Arts. Une occasion de découvrir le génie qui habite cet artiste au parcours peu commun, mais déjà bien rempli, à 27 ans à peine…

Il est 17h40 quand on prend possession de notre siège au balcon de la Salle Bourgie du Musée des Beaux-Arts de Montréal. C’est l’occasion d’admirer les vitraux somptueux, les voûtes, mais aussi le magnifique piano à queue Steinway and Sons, dans un rond de lumière au milieu de la scène. Une demi-heure plus tard, Thomas Enhco vient saluer dans un beau costume gris, avant de s’installer.

Le premier titre, Watching you Sleep, est un extrait de son dernier album Feathers. Thomas commence par des notes tenues dans l’aigu et le medium aigu, qui résonnent. Petit à petit, il instaure un véritable discours avec son instrument et se penche vers lui, comme il parlerait intimement à un être cher. Dès le début, on remarque son toucher divin.

Sans un mot, Thomas salue aux applaudissements qui se répandent dans la salle. Il fixe droit devant lui, se frotte les mains en cherchant son inspiration, avant de les lancer sur le piano et de nous offrir une belle version du standard de George Gershwin, It Ain’t Necessarily So. L’instrumentiste varie humblement son jeu, l’amplitude des notes, la vitesse du phrasé. Au fur et à mesure que l’interprétation avance, son corps s’anime, possédé, en même temps que le piano « crie ».

Force est de constater qu’en plus de jouer merveilleusement bien, Thomas a de l’humour. A la fin du deuxième morceau, il prend le micro et nous parle de la beauté de cette salle dont ses amis musiciens lui avaient fait part, et du fait qu’il voulait voir Montréal l’hiver, après l’avoir vue l’été pour le Festival de Jazz en 2013. Les mots « Et là non plus, on ne m’a pas menti » fusent de sa bouche, pour parler de l’hiver ici, en même temps que les rires éclatent dans la salle.

Il reprend possession de son instrument pour nous interpréter une autre composition, The Last Night of February, plus sombre. On sent la froideur de l’hiver qui le transperçait quand il l’a composée, tout comme l’histoire qu’il cherche à retranscrire à travers la façon de chercher les nuances du morceau.

Suit un thème de Robert Schumann revisité, interprété de façon exquise, nous donnant le sentiment d’une inversion de la domination instrumentiste/instrument tant son corps est pris dans une mouvance, une énergie qui l’aspire.

Un titre à l’esprit plus contemplatif, avec beaucoup de douceur et de mélancolie prend le relais. Cette fois, il s’agit à nouveau d’une composition de Thomas, You’re Just a Ghost. Les notes sont au début longues et espacées, puis on note une montée en puissance progressive, jusqu’à ce que le grave et la vitesse déferlent tels les fantômes qui reviennent. Et le calme reprend le dessus. Thomas joue à la façon d’un Question-Réponse avec les cordes du piano, qu’il va directement pincer avec ses doigts comme une guitare, puis frapper à l’aide des marteaux en appuyant sur les touches.

C’est ensuite le classique All the Things You Are qui est joué par Thomas, de façon gaie et enjouée, avec une humeur plus lumineuse.

 

Lettre d’amour et rencontre sauvage

Thomas nous introduit après la septième pièce de son concert, « Je voulais te dire » en nous expliquant qu’il cherchait à écrire une lettre d’amour quand il l’a composée… Les gens sont toute ouïe. Qui aurait pu prévoir, que la chute allait être… « Mais, je ne suis pas très bon à ça, et surtout, je n’avais personne à qui l’écrire ». Le public rit, se trouvant alors dans de bonnes dispositions pour accueillir un thème chaleureux, enveloppant. On imaginerait volontiers cette musique accompagner une balade idyllique d’un couple dans les rues de New-York, par exemple.

Et voilà déjà, à notre grand regret, le dernier morceau qui s’annonce. C’est une autre composition intitulée Looking for The Moose. Thomas nous explique l’histoire de ce titre : il est parti à l’aventure au Canada, rêvant de croiser cet animal, quand il est tombé nez à nez sur une famille d’élans en sortant de sa tente, et les a caressés. « Je ne savais pas que c’était dangereux, à ce moment-là », nous sort-il ingénument. Heureusement pour lui, pas de mésaventure! Il fait alors parler son piano à travers un jeu très rythmé, vigoureux dès l’entrée. Il retranscrit bien la « course », le suspense, espérant à tout moment tomber sur cet animal sauvage.

Thomas salue un public applaudissant fort, conquis et admiratif. Les gens attendent bien volontiers que l’artiste revienne, pour nous jouer une dernière pièce tout aussi inspirée avant que le spectacle ne se termine.

On sort de la salle le coeur léger comme une plume, peut-être une de celles que viennent de déposer les titres du dernier album de l’artiste.

Vos commentaires