Rétrospective 2024 | 13 albums qui ont marqué notre équipe
2024 tire à sa fin, et c’est donc le moment de revenir sur l’année, souligner à grands traits nos coups de coeur et vous inciter à découvrir, si ce n’est déjà fait, certains des artistes qui ont marqué notre équipe au cours des douze derniers mois. Et puisque Sors-tu? se penche à longueur d’année sur les spectacles, nous avons donné la parole à nos collaborateurs afin qu’ils s’expriment, cette fois, sur les albums qui ont charmé leurs oreilles mélomanes.
Loin de nous l’idée de faire une liste exhaustive des albums incontournables, ou de classer les albums par ordre d’importance ou de pertinence.
Nous avons par ailleurs écarté les évidences : bien sûr que vous devriez écouter les albums récents de Charli XCX, Billie Eilish, Klô Pelgag, P’tit Belliveau, Avec pas d’casque, Tyler. The Creator, Nick Cave, St. Vincent, Kendrick Lamar, The Smile, Fontaines D.C., IDLES, Chat Pile et autres albums qui se retrouvent sur tous les tops de fin d’année. Nous sommes d’ailleurs tout à fait d’accord avec le Top 10 de nos amis du Canal Auditif.
Ah, dernière chose : voici une playlist avec une sélection de chansons de chacun des albums proposés ci-bas. Bonne écoute!
SPRINTS – Letter to Self
Post-punk
(par Geneviève Gauthier)
Letter to Self, le premier album du groupe irlandais SPRINTS, est l’album que j’attendais depuis des années, sans même le savoir.
Karla Chubb (voix et guitare), Sam McCann (basse et voix), Zac Stephenson (guitare) et Jack Callan (batterie) y mêlent habilement grunge et post-punk: les guitares sont brutes et nerveuses, la batterie est agressive et les lignes de basse ajoutent une touche dance-punk qui insuffle du mouvement à cet album aux sonorités anxiogènes.
Ce qui distingue le son de SPRINTS de la vague post-punk d’outre-mer (Fontaines D.C., Idles et autres), c’est le large registre vocal de Karla Chubb qui sert très bien l’album. Dès le premier titre Ticking, cela apparaît évident que Chubb peut nous manipuler émotivement. Elle nous entraîne avec ses spoken words dans un profond moment d’anxiété, fait monter la pression, et enfin ressent leur révolte alors que tout le band explose sous ses cris.
Bref, vous aurez compris que dans le genre, c’est le band que j’attends le plus impatiemment de voir à Montréal.
Fousheé – Pointy Heights
R&B/Soul
(par Victor St-Pierre)
De tous les albums qui m’ont marqué en 2024, Pointy Heights de l’artiste jamaïcaine Fousheé, m’a agréablement surpris. Dès la première pièce, on ressent qu’elle change complètement de registre, passant d’un album punk (softCORE,2022) à un album beaucoup plus fidèle à ses origines, offrant un projet riche et stylisé.
En seulement 28 minutes, l’artiste multiinstrumentiste explore une grande variété de styles, allant de cloches à vaches sur closer à une flûte de pan sur birds, bees, en passant par des influences de reggae et d’électro-pop.
Cet album qui est passé sous le radar, à mon avis, mériterait plus d’attention et de reconnaissance, que ce soit pour le côté dansant ou planant qu’il nous procure en l’écoutant.
The Pineapple Thief – It Lead To This
Prog rock
(par Martin Laverdière)
It Leads to This est le quinzième album studio du groupe de rock progressif britannique The Pineapple Thief paru en février 2024.
The Pineapple Thief a travaillé sur le disque pendant près de trois ans avant de le publier. Il en résulte un puissant album portant l’empreinte du chanteur-guitariste Bruce Soord et de l’incomparable batteur Gavin Harrison. Un album complexe qui, tel une œuvre d’art, se bonifie au fil des écoutes.
Ce fut une période créative des plus intenses pour le groupe qui a su repousser les limites de leur art.
BéLi – XUV
Pop alternative
(par Marc-André Mongrain)
On avait remarqué BéLi lors des Francouvertes en 2022. « Prometteuse pop, ce sera à suivre… », nous disions-nous.
Quelques années un peu discrètes plus tard, l’artiste a surgi un peu de nulle part avec un premier album d’une étonnante maîtrise, comme un bijou à tendance hyperpop à tendance R&B, hip-hop, drum & bass, avec des textes intrigants, parfois naïfs, mais toujours sentis, assumés, incarnés.
Coréalisé par l’artiste en collaboration avec Blaise Borboën-Léonard (Lydia Képinski) et Nader Abouzeid (alias Funkywhat), XUV contient 11 pièces hétéroclites mais étrangement conséquentes aux arrangements saturés et une savoureuse tendance pour les ruptures de tons.
À part Klô, on peine à trouver un album québ plus 2024 que celui-là…
Wallace Cleaver – Merci
Rap
(par Maylis Roumy)
Merci est le troisième album de Wallace Cleaver, un rappeur originaire de la campagne française, établi à Paris. Wallace, de son vrai nom Léo Gond, s’est notamment fait connaître lors du 57e freestyle de Grünt où il était solidement accompagné de Mairo, Kéroué ou encore M le Maudit.
Merci est une madeleine de Proust d’une demi-heure dans laquelle on croque à pleines dents dès le premier morceau intitulé sobrement, «…». Wallace évoque son enfance rurale entouré de ses proches dans le village de Saint-Laurent-Nouan où il nous invite à revivre des sensations passées sur fond de chants d’oiseaux (Marcel.). Avec une plume délicate, il installe une atmosphère lente et contemplative sur l’innocence du temps perdu entre bonheur simple et dureté de la vie. Le tout avec un regard à double niveau, celui de l’enfant et de l’adulte : « Énervée, ma famille parle en onomatopées, ils communiquent avec le cœur, n’aiment pas trop dialoguer » (pardon).
Les questions d’identité et de quête de soi sont aussi centrales. Wallace explore ses doutes — « j’me demande ce que c’est d’être moi » (être moi) — et ses illusions perdues — « la plus grosse connerie que j’ai cru à vingt ans, c’était d’penser qu’j’allais être heureux à vingt ans » (le bus).
L’amour perdu, fil conducteur du projet, teinte les morceaux d’une douce mélancolie. Mais c’est l’hommage à son grand-père Marcel qui touche en plein cœur. Dans les dernières secondes de l’album, la voix tremblante de ce dernier confie sa fierté pour son petit-fils, clôturant sur une note émouvante ce voyage introspectif.
Mykalle – Da pacem
Chanson expérimentale
(par Geneviève Gauthier)
Le premier opus de Mykalle Bielinski, Da pacem (donne-moi la paix), est un album qui propose un retour à la spiritualité et invite à la paix.
Cet album transcende l’universalité et l’intemporalité à travers ses chants liturgiques à la fois traditionnels et modernes. L’album marie habilement les techniques de chants traditionnels bulgares aux sonorités contemporaines des synthétiseurs, séquenceurs et échantillonneurs. L’intégration de la musique électronique est parfois discrète, parfois prédominante, mais toujours faite avec finesse.
On vous propose d’entrer dans cet univers par la porte des titres Ghost et Oneness, les plus accessibles de l’album. Ensuite, prenez une pause de la vie trépidante aujourd’hui et allez écouter intégralement Da pacem, en prenant une marche sous les flocons.
Beth Gibbons – Lives Outgrown
Indie
(par Marc-André Mongrain)
Nous aurions peut-être dû inclure cet album aux « évidences » citées en introduction de ce texte, aux côtés des Billie Eilish, Nick Cave et Charli XCX de ce monde tant le génie de ce premier album solo officiel de Gibbons (chanteuse de Portishead si vous ne le saviez pas) a été globalement souligné.
Mais l’a-t-il été à sa juste valeur ici, en Amérique? Au Québec?
Juste au cas, il fallait en parler. Parce que si les attentes envers la cantatrice du fameux groupe trip-hop derrière Dummy étaient immenses, elle a su les surpasser avec cet oeuvre touffu, inspiré, aux arrangements surprenants et luxuriants, aux rythmes parfois enivrants (Reaching Out) et aux textes hautement émotifs.
D’ailleurs, soulignons au passage à quel point les chanteuses de bands des années 1990 ont marqué 2024 avec des albums solo à tout casser, tant du côté de Gibbons que de Kim Gordon (Sonic Youth) ou Kim Deal (The Breeders, Pixies). Chapeau mesdames!
Sean Ono Lennon – Asterisms
Rock expérimental
(par Martin Laverdière)
Asterisms, un beau projet instrumental exploratoire de facture jazz de Sean Ono Lennon, fils de son illustre père Jon.
Située à mille lieux de l’univers des Beatles, la musique est intensément imaginative, mélangeant le rock, l’électronique, le jazz dans un paysage sonore musical inédit. Cet album qui aurait assurément plus à son père est sûr de surprendre les mélomanes avertis.
Twenty One Pilots – Clancy
Indie rock
(par Jessica Camil)
Twenty One Pilots a vu le jour en 2009 et façonnent depuis, malgré des changements de personnel, un son unique, difficile à catégoriser, mêlant plusieurs éléments de pop, rap ou de rock. Mais ce qui les distingue véritablement, c’est l’univers construit autour de leur musique – le lore.
Tout est centré autour de Dema, une ville dystopique contrôlée par neuf évêques. Ce lieu est une métaphore des batailles mentales de Tyler Joseph. Dans cet environnement oppressant, l’évasion semble impossible.
Le personnage Clancy, éponyme du dernier album du groupe sorti le 24 mai dernier, émerge de ce paysage. Depuis Blurryface (2015) jusqu’à Scaled and Icy (2021), le parcours de Clancy a incarné les défis de la lutte contre ses démons intérieurs, nous plongeant dans une quête de liberté.
Pour ce nouvel album, le morceau Overcompensate a été le premier à être révélé – marquant également l’ouverture de leur nouvelle tournée (passée par Montréal le 27 septembre au Centre Bell).
A travers leurs chansons, Clancy aborde des thèmes profonds et complexes. On y explore l’addiction avec Vignette, la détresse psychologique avec Next Semester ou encore l’angoisse nocturne avec Routines in the Night.
Le morceau Paladin Strait vient clôturer le bal. Il marque la fin de l’épopée de Clancy avec une mélancolie poignante. La chanson, tout comme l’album, se termine sur une l’interruption brutale, celle d’une voix martelant une phrase : « so few, so proud, so emotional ». C’est le message de la fin d’une ère, un point final à Dema, et la victoire (ou presque) de Clancy fasse à ses démons.
Tigran Hamasyan – The Bird Of A Thousand Voices
Jazz
(par Martin Laverdière)
Tigran Hamasyan est un pianiste et compositeur de jazz arménien.
En 2024, l’hétéroclite musicien présente son double album The Bird Of A Thousand Voices. Cet opus mélange les genres allant du prog au metal en passant par le jazz, tout en intégrant des mélodies traditionnelles arméniennes.
Il en résulte un album complètement déjanté, syncopé et inédit. The Bird Of A Thousand Voices est seulement pour un public averti.
Mise en garde: L’album peut créer une dépendance ou des crises d’anxiété.
Anaïs Constantin – À pied ou en char
Folk-pop
(par Jérôme Daviau)
À pied ou en char d’Anaïs Constantin a marqué mon année 2024, avec ses titres pop aux allures faussement simples et sa production tendance lo-fi. Moi qui suit hermétique aux verres d’oreille, la toune Mes années 2000 m’est longuement restée en tête même la nuit avec sa ritournelle entêtante et ses paroles à tiroir. Ce mini album de cinq titres avec un intermède dépasse de peu les 20 minutes mais est une oasis d’authenticité avec un brin de candeur. Cette petite pépite n’a pas été assez reconnue à sa juste valeur à mon sens et mérite au moins une autre écoute de votre part.
Willow – Empathogen
Empathogen est le sixième album studio de la chanteuse américaine Willow. Un album pour les fans de jazz fusion vocal et avant-gardiste. Aux limites du pop, Willow se distingue par sa voix distinctive et ses harmonies soul et rythm’n blues.
Un vent de fraîcheur dans l’univers musical souvent très compact et formalisé.
Son contrôle vocal et ses expérimentations vocales sont raffinés et passionnants. Les arrangements sont complexes à la fois rythmique et des plus harmoniques.
Angell & Crane – Angell & Crane
Expérimental
(par Jérôme Daviau)
Le duo d’improvisateurs et d’expérimentateurs avertis composés du guitariste Simon Angell et du batteur Tommy Crane a livré son premier album Angell & Crane cette année. Et autant j’apprécie ces musiciens sur scène, notamment dans la petite salle chaleureuse qu’était l’Ursa, autant ils réussissent à transcrire sur disque l’âme de leur musique. Avec un gros travail d’édition sur la quarantaine d’heures d’improvisation qu’ils avaient produit, ils ont abouti à un album qui tient très bien la route, même après plusieurs écoutes et qui sait rester surprenant dans toute sa complexité. Un fait rare dans cette catégorie qui a tendance à souvent perdre de sa fougue et de sa fraîcheur une fois que l’adrénaline des planches a pris le bord.
- Artiste(s)
- Anaïs Constantin, Angell and Crane, BéLi, Beth Gibbons, Fousheé, Mykalle, Sean Ono Lennon, SPRINTS, The Pineapple Thief, Tigran Hamasyan, Twenty One Pilots, Wallace Cleaver, WILLOW
- Catégorie(s)
- Contemporaine, Experimental, Folk, Garage rock, Indie, Indie Rock, Jazz, Pop, Progressif, R&B, Rap, Rock,
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