Montréal Complètement Cirque 2014 | Retour sur Le Concierge au Théâtre de Quat’Sous

Vendredi soir, Sorstu.ca a assisté à la première de trois représentations du Concierge, le one man show du Canadien Anthony Venisse dans le cadre de la 5e édition de Montréal Complètement Cirque. Un moment agréable avec un clown attendrissant – malgré quelques longueurs.

Venisse ne déroge pas de l’artiste multidisciplinaire auquel le spectateur de cirque peut être habitué – ou s’attendre. Il y déroge en présentant une heure de péripéties tragicomiques mises en scène pour découvrir la diversité de ses talents – et acrobate n’en est qu’un seul. Formé en danse, en art clownesque, en trapèze et en piano, c’est un peu de tous ces univers qu’il nous présente au Quat’Sous, dans une salle sold-out avec cependant maints sièges vides, dans une présentation qu’on annonce familiale, mais dans un théâtre où les bambins ne se comptaient sur les doigts que d’une main…

Le concierge fait son apparition par une des portes des spectateurs, dans le noir le plus total, muni d’une lampe de poche. Il se dirige vers la scène, un peu claudiquant, bizoune en coulisses côté jardin, replace le piano, en nettoie les touches, tripote on ne sait quoi côté cour ; clac, les spots de scène s’allument.

Photo de courtoisie, par Stéphanie Lassalle

Photo de courtoisie, par Stéphanie Lassalle

On le découvre : grand, mince, rouquin, une tuque sur la tête, une chienne de travail bleue, des grosses bottes. Un temps. Il s’aperçoit de notre présence, surpris. Il triture une serviette hors de ses poches, fait mine de s’essuyer le front, la descend vers son nez : on lui découvre tout à coup un maquillage blanc, dans le haut du visage. Rires. Il continue son geste, descend la serviette sur son menton : il vient de s’appliquer autour de la bouche la même pâte blanche, en même temps qu’il s’est dessiné des doigts des traits noirs près des yeux. Rires. Il se bricole un nez rouge avec du tape sorti d’une autre poche. Rires. Voilà le concierge devenu clown.

Le concierge attrape un vinyle ; un air de piano se fait entendre ; il se dirige en coulisses à cour, fait descendre le rack à spots. Il marmonne. Tout le long du spectacle, il parle tout bas, pour lui-même, parfois pour nous, ses spectateurs imaginaires. Il s’exclame parfois. Tout le long du spectacle, il place et déplace les éléments de ce décor de décor, éléments de ce qu’on présume avoir été ceux d’une production dans l’établissement pour lequel il est chargé de faire le ménage. Mais s’y prête de façon ludique, exploratoire.

Il s’appropriera la table du magicien et ses accessoires, jouant du chapeau avec le lapin blanc, qu’il finira par faire disparaître à son grand désarroi. Maladroit, il se collera une main bien comme il faut au pied du micro, tentant de le rafistoler avec du gros tape, avant d’aller faire mine de la scier en coulisses, bruitage à l’appui.

Photo de courtoisie, par Stéphanie Lassalle

Photo de courtoisie, par Stéphanie Lassalle

Il essaiera ainsi tout ce qui se trouve sur son passage, se découvrant avec étonnement, frayeur, surprise ou enthousiasme des aptitudes pour le piano, le ballet, la direction d’orchestre ou le trapèze. Son corps s’y prêtant parfois volontiers, parfois avec réticence, comme lorsque son pied fou s’obstinera à ne pas vouloir retourner dans les cruels chaussons de pointes. Pourtant, un peu plus tôt, il nous avait gratifié de très gracieux ronds de jambe ! À un autre moment, il n’arrive plus à sortir du ventre du piano, dans lequel il est bien évidemment tombé, et ça donne lieu à quelques autres maladresses coiffées d’éclats de rires. Avec sa chienne de travail transformée en queue de pie, brandissant un long tournevis, il mimera le violon, jouera de la contrebasse avec une des cordes du piano, du cor avec son trapèze, des castagnettes, même.

Les rires ont fusé naturellement, et doucement. Ce pauvre clown a les mains pleines de pouces, malgré les aptitudes qu’il se découvre sur la scène en même temps que nous, dans l’absurde et la légèreté. C’est doux et tendre, et touchant. Le concierge d’Anthony Venisse est attendrissant.

On lui pardonne quelques longueurs dans certains numéros, une redondance dans la trame musicale, le manque de rythme à certains moments, notre déception de ne pas le voir se manifester dans un peu plus d’acrobaties. On lui pardonne d’autant plus qu’il est seul maître à bord : écriture, mise en scène, interprétation, musique originale… Et on lui pardonne d’autant plus quand on sait qu’il a aussi assuré la mise en scène des Minutes complètement cirque et de Babel_Remix. Pas mal pantoute, pour un concierge.

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