Voyage en bohême

Le festival de Lanaudière s’enflamme pour la Bohême

Le concert du vendredi 2 août était grandiose, alliant nature et musique, grandeur du cadre  et de l’Orchestre Symphonique de Montréal, souffle et virtuosité…
En cette fin de festival, l’amphithéâtre Lindsay accueillait l’O.S.M., sous le signe de l’amitié entre deux des plus grands compositeurs du 19e siècle, Brahms et Dvořák. Bien que le programme soit bien connu, la soirée réservait encore des surprises. En attendant le début du concert, des musiciens de l’orchestre symphonique de Joliette jouaient de courtes pièces pour divertir le public, créant une atmosphère enchantée. Plus tard, la violoniste Simone Lamsma, pour la première fois au festival, devenait la révélation de cette nuit d’été, en dévoilant son talent immense dans le concerto pour violon en ré majeur de Brahms. Réputé comme l’un des concertos pour violon les plus difficiles, il fut illuminé par sa cadenza, solo improvisé de plusieurs minutes.

Les danses hongroises

La soirée s’est ouverte avec trois des danses hongroises de Brahms (Danses 7,6 et 5), véritables hits de la musique classique. Pour ces danses, Brahms s’inspira de la musique tzigane traditionnelle, qu’Ede Remenyi, rencontré en 1850, lui fit connaître. Au départ au nombre de dix, elles furent proposées en 1869 à son éditeur sous la forme d’arrangements pour piano à 4 mains. En 1880, 11 nouvelles danses furent ajoutées et plus tard arrangées pour orchestre. L’arrangement joué hier soir était composé par Martin Schmeling (1864-1943).
Ces pièces rappellent également le lien existant entre Brahms et Dvořák, dont la rencontre a lieu en 1875. Ce dernier transforma, comme Brahms, le répertoire populaire en musique romantique. Sur la demande de l’éditeur de Brahms, Fritz Simrock, Dvořák composa des danses slaves, sur le modèle des danses hongroises de Brahms.
L’O.S.M. termine la reprise des danses hongroises par une interprétation haute en couleur de la danse n°5, tellement connue que seul un orchestre de sa trempe peut lui insuffler une vigueur et une force dramatique nouvelles.

La symphonie n°5 en fa majeur de Dvořák

Après cette entrée virevoltante, nous entrons dans le vif du sujet avec la symphonie de Dvořák (1841-1904). Ce compositeur tchèque fut reconnu mondialement, en particulier pour la qualité de ses mélodies et la simplicité de sa musique. Contrairement à Brahms, il subit l’influence directe de Liszt et Wagner.
Le premier mouvement de la symphonie n°5 s’ouvre sur un thème pastoral et bucolique, plein de calme et d’enchantement. Un choix judicieux compte tenu du cadre dans lequel nous nous trouvons : un amphithéâtre à ciel ouvert donnant sur le bois. A l’émerveillement succède un sentiment triomphal, avant l’ouverture du 2e mouvement, plus grave, lent et profond. L’enchaînement avec le 3e mouvement est fait rapidement – selon les indications ; la maîtrise de la symphonie se fait de plus en plus impressionnante et les instruments sonnent, précis, secs ou vibrants. Enfin, dans le dernier mouvement, on retourne au thème initial avec la même vigueur grandiose et une vitalité explosive. Le finale est un vrai chef d’œuvre de force et de précision. Si on tourne la tête vers les écrans, sur les côtés, quelques papillons de nuit et lucioles volent de ci, de là, nous rappelant sans cesse la magie de cet espace où la musique résonne en plein air.

Le concerto pour violon en ré majeur, op. 77 de Brahms

Aujourd’hui reconnu comme l’un des plus grands concertos pour violon, l’op. 77 a eu pendant longtemps mauvaise réputation : trop froid, trop complexe, il présente indéniablement une partition pour violon extrêmement exigeante et difficile. Pourtant, la violoniste néerlandaise Simone Lamsma, venue pour remplacer en dernière minute Veronika Eberle a su relever le défi brillamment. Habillée d’une magistrale robe de satin aux motifs symétriques jaunes et verts, Simone Lamsma maniait son violon avec génie devant l’ensemble de l’auditoire de l’amphithéâtre Fernand Lindsay. Dans le premier mouvement, elle nous dévoile un jeu intense, tout en expressivité et en précision, particulièrement dans la cadenza, solo virtuose improvisé de plusieurs minutes.
Dans le deuxième mouvement (l’adagio), le calme prend place et nous entrons dans un grand espace mélancolique, avant que la vigueur du premier mouvement ne reprenne dans le dernier mouvement (l’allegro giocoso). Le thème principal, proche des thèmes tziganes des danses hongroises est un hommage à deux amis de Brahms: Joseph Joachim et Ede Remenyi. Le thème vient également donner cohérence à la soirée, boucler la boucle, en se faisant l’écho des danses hongroises, qui avaient ouvert le concert.

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