crédit photo: Ash KG
K!RA OJI

K!RA OJI au Ministère | Le premier chapitre d’un beau livre

K!RA OJI, rappeur franco-québécois, lançait son premier album en carrière jeudi au Ministère. La jeunesse de l’artiste se ressentait en concert pour le meilleur et pour le pire, tandis que l’ambition et les textes bien ficelés de K!RA OJI lui dessinent le début d’une carrière intéressante.

Le Ministère représente le parfait entre-deux pour accueillir le lancement d’un artiste, tant l’endroit s’avère intime sans être ridiculement petit.

On dénote une poignée de préadolescents dans le public, vivant probablement leur première expérience de concert à vie, comme des adultes et des personnes plus âgées.

 

Soutenu

Dès la fermeture des lumières de la salle, la foule scande des « Kira » à profusion, la température monte peu à peu. Antoine Poireau, de son vrai nom, monte sur les planches et se laisse acclamer encore par la centaine de personnes venues l’écouter.

* Photo par Ash KG.

Le rappeur débute son lancement avec Demain, ouverture de son album Chercheur de lumières paru la nuit même. Assis sur un canapé placé sur la modeste scène, K!RA OJI rappe d’abord un texte calmement, avant de se lever et de s’enflammer par la même occasion. On distingue une petite touche d’Orelsan dans le caractère posé du morceau, se concentrant avant tout sur les paroles et non sur l’ambiance.

La tendance se renverse dès le deuxième titre, au flow mordant, et encore une fois sur la troisième chanson, La La La, au refrain davantage populaire et entraînant. Comme K!RA OJI expliquait dans une entrevue engagée par Sors-tu? au milieu du mois, l’artiste aime piocher dans les différents genres et ne pas se limiter à une seule façon de concevoir, alliant autant les couplets découpés que les refrains mélodiques. Le propos est reflété sur les planches, témoignant d’une réelle palette tenue par le rappeur montréalais. Aucun mensonge à signaler.

* Photo par Ash KG.

Tout au long de la performance, l’influence de la famille, des amis et de la copine de K!RA OJI se ressent dans les interactions de l’artiste. Remerciant son entourage d’être venu à de nombreuses reprises, la joie et l’excitation de se retrouver sur une scène sont palpables, le musicien savourant chaque instant de son lancement comme un sommelier savourerait chaque gorgée d’un bon vin : « Je pense que c’est la meilleure journée de ma vie », répète plusieurs fois Antoine Poireau.

À rappeler à quel point il est capital de soutenir un proche décidant de se lancer dans une quelconque forme d’art. Si l’entourage ne suit pas dans les débuts, qui le fera?

 

Jeune et fougueux

Premier lancement oblige, on ressent d’emblée une forme de nervosité de la part de K!RA OJI, malgré que la pression s’évaporera visiblement plus les minutes s’écouleront. Certaines transitions donnent l’impression d’avoir été trop répétées, peut-être aurait-on apprécié davantage de naturel dans les discours. La décision apparaît en soi logique : par manque d’expérience en concert, vaut mieux s’en tenir à un plan défini que de risquer de déraper.

* Photo par Ash KG.

Malgré une carrière encore à son aurore, il demeure impressionnant de constater à quel point K!RA OJI ne se trompe jamais dans ses morceaux, respire l’assurance et ce sans autotune, alors que nombre de rappeurs frileux ne font que marmonner leurs textes sur du play-back en concert.

« Bientôt j’aurai plus besoin de chanter mes chansons my god », lance le jeune artiste pendant qu’une grande partie du Ministère entonne les paroles de Bouteille à la mer avec lui.

En écoutant les textes aux rimes souvent éclairées et ingénieuses, on retrouve un jeune homme torturé, introspectif, utopiste, mais surtout ambitieux. L’ego trip, toujours un grand oui dans le rap.

Durant l’interprétation de Car t’es une femme, K!RA OJI invite une autre artiste de son label, Avril Jensen, à performer sur la scène. Un passage qui aurait pu se révéler un peu plus fort, la chanteuse ne servant que de choriste sans réel couplet à se mettre sous la dent dans le titre. La brutalité du rap et la douceur de la pop font pourtant si bon ménage, regardez le diamant de Damso et Angèle nommé Démons.

Avouant sans gêne son passé psychologique plus sombre vers la fin du concert, K!RA OJI lance qu’il a « l’impression que le petit adolescent qu’il était hier a guéri », au plus haut de son excitation. Comme quoi, la musique peut faire des miracles.

Après être venu rapper au milieu du parterre sur J’représente tout, le rappeur montréalais clôture avec J’roule, puis Trouver la sortie, accompagné d’Avril Jensen et de David Campana, présent sur une poignée de titres durant la soirée.

Il est évident qu’il y a encore du travail à réaliser, le succès ne tombe pas du ciel, mais le talent est réellement présent, et le plafond semble très haut pour K!RA OJI.

D’un point de vue personnel, le rap québécois est devenu tellement peu intéressant ces dernières années qu’une place peut être prise là-haut.

Le petit prince saura-t-il la saisir?

* Photo par Ash KG.

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