Entrevue avec Santigold | Une nouvelle tournée lourde de sens
C’est l’heure (douce-amère) pour Santigold de retourner sur la route. Après un quatrième excellent album studio, Spirituals, une tournée annulée qui a fait couler beaucoup d’encre et des restructurations professionnelles, l’autrice-compositrice-interprète américaine de renom a commencé il y a moins d’un mois une tournée de vingt spectacles. Sors-tu? a discuté avec elle quelques jours avant son arrêt à l’Olympia de Montréal ce mardi soir.
La feuille de route de Santigold, Santi White de son nom complet, est imposante. Quatre albums studio respectés, dont le plus récent sous sa propre étiquette Little Jerk Records, deux mixtapes, de multiples collaborations avec des artistes comme Diplo, Karen O des Yeah Yeah Yeahs et Vince Staples, et récemment, une mention bien spéciale dans Break My Soul (The Queens Remix) de Beyoncé et Madonna, qui rend hommage à de grandes chanteuses noires.
Santigold s’est taillée depuis le début des années 2000 une place indélogeable dans l’écosystème musical américain (et au-delà) grâce à des albums qui se suivent sans se ressembler. Pour tenter de définir sa signature sonore, il faudrait retenir le dub, la new wave, le punk rock, l’électronica, le hip-hop, le post-punk et le reggae. Chaque mois, près de deux millions de personnes l’écoutent sur Spotify.
Son unicité et son expérience ne sont cependant pas gage d’un parcours sans accroc. « Je ne pense pas que les gens comprennent comment l’industrie fonctionne et à quel point elle est brisée en ce moment », avance la chanteuse. En septembre 2022, pour des raisons personnelles et financières qui ont circulé dans de nombreux médias culturels américains, elle a annulé sa tournée Holified, en plus de prendre parole à plus d’une reprise sur les réseaux sociaux quant aux difficultés du métier.
On a une idée erronée de ce que c’est d’être une artiste, affirme l’autrice-compositrice-interprète. Tout le monde sait que la musique, c’est pratiquement gratuit. Mais qui se demande comment on s’est rendu là? Comment des gens travaillent et font paraître des produits gratuits?
Même si aujourd’hui, après notamment des changements dans son équipe, Santigold est en mesure de regoûter à la tournée, elle ne met pas sa lutte sur pause pour autant. La veille de notre entretien, l’artiste enregistrait un épisode de son balado Noble Champions sur les aléas de l’industrie musicale. « Les fans doivent comprendre les dilemmes auxquels font face leurs artistes préférés, pour qu’on se batte ensemble pour ce qui est juste pour la culture », détaille-t-elle.
Crédits photo : Frank Ockenfels.
Le goût du direct
Pour Santigold, qui est aussi mère de trois enfants, replonger dans un rythme à cinq spectacles par semaine crée du stress, mais aussi de l’excitation. « À San Francisco, pour le premier spectacle officiel de la tournée, on a joué pendant deux heures! », s’esclaffe-t-elle, encore surprise. Vieilles chansons et mixtapes, pièces de son ancien groupe punk Stiffed, reprises, et bien sûr, morceaux de Spirituals (les dynamiques Shake, My Horror, High Priestess) : tout y a passé. « Je vais sans doute raccourcir la setlist un peu. »
Les spectacles suivants ont passé de 24 chansons… à 22. La soirée à l’Olympia s’annonce donc longue, et festive. D’autant plus qu’une bonne partie de Spirituals a été enregistrée au pays, à Squamish, en Colombie-Britannique. Et qu’un des musiciens de son ancien groupe Stiffed, qui habite à Montréal, sera dans la salle mardi soir. « Je vais peut-être l’inviter à faire une de nos anciennes chansons sur scène », indique-t-elle. Le matériel de Stiffed avait tracé son chemin jusqu’à sa performance aux très populaires concerts Tiny Desk de NPR Music : « Ça m’a tellement excitée que j’ai eu envie d’en intégrer à la tournée. »
Avec ou sans chanson de son passé punk, on aurait pu parier sur un set et une scénographie éclatés de la part de Santigold. « Je fais de la musique depuis longtemps, ça me permet d’aller chercher du vieux matériel, et les ambiances varient beaucoup dans mes albums. Je n’aime pas que certaines personnes s’attendent constamment à du nouveau contenu. Moi, je ne vis pas comme ça », lâche-t-elle.
Santigold se produira, entre autres, à l’Olympia de Montréal le mardi 20 août et au Rebel de Toronto la veille, le lundi 19. Pour des billets, c’est par ici.
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