BEAK

Entrevue avec BEAK> | Pour une première (et dernière) fois à Montréal (avec Geoff)

Après 17 ans d’existence, le groupe de krautrock britannique BEAK> se lance dans une ultime tournée sous sa forme actuelle : une mini-virée d’à peine 10 dates en deux semaines, qui débutera à Montréal ce samedi avec un concert au modeste Théâtre Fairmount. Qui affiche complet, bien entendu. Parce que c’est la toute première fois que Geoff Barrow, Billy Fuller et Will Young performeront ensemble à Montréal. Et la dernière. Fallait en profiter pour non seulement y assister, mais aussi jaser avec eux en amont.

Juste en s’agglutinant autour d’un écran (de téléphone, on suppose), Geoff, Billy et Will démontrent sans le vouloir leur complicité typiquement britannique en essayant de tous entrer dans le cadre d’une conversation vidéo sur Zoom. On aurait dit les coulisses d’un tournage de Monty Python.

Ils sont en studio de répétition, arrivent 5 minutes en retard, s’en excusent avec charme, et ont l’air décontractés sans paraître au-dessus de leurs affaires.

Expect jokes, and some music.

Le genre de phrase qu’ils ont utilisé sans doute 1001 fois au cours de leur carrière pour décrire ce à quoi on doit s’attendre d’un de leurs shows. Comme si c’était une tournée comme les autres…

La fin pour Barrow au sein de BEAK>

Bientôt, BEAK> ne sera plus « le projet du batteur de Portishead », puisque Geoff Barrow quitte le groupe après cette tournée. C’est un dernier tour de piste pour le célèbre batteur (qui chante aussi au sein de BEAK>) : il accroche les baguettes, du moins en ce qui a trait aux tournées. Et il n’a pas l’air émotif outre mesure. La décision semble mûrie.

La raison? Officiellement, une fracture du pied en jouant au soccer. Billy a tout vu : « Il s’est blessé lui-même, sans provocation », lance-t-il en taquinerie. On vous épargne les détails du bête accident, même si les trois compères ont pris le temps de nous l’expliquer de façon exhaustive.

« J’ai travaillé très dur avec des kinésithérapeutes, explique Barrow. Pas pour que Beak puisse continuer… pour que je puisse rejouer au foot, un jour. »

Il poursuit sur un ton plus sérieux.

J’ai fait la tournée, notre dernière tournée, et je suis retombé malade. J’en suis à la fin. Nous savions depuis longtemps que cela ne durerait pas éternellement. Tout va bien. Mais je ne peux plus tourner.

En fait, si. Si on le raconte en français. Puisque « tourner » désigne également « faire des films », et c’est justement ce que Geoff Barrow compte faire désormais. Il estime avoir « ouvert une porte dans une autre direction, vers une différente forme d’excitation » avec le septième art.

Les partenaires Billy Fuller (de Sensational Space Shifters) et Will Young (également connu sous le nom de Moon Gangs) poursuivront l’aventure BEAK> sans lui. Et sans rancune, ni malaise. Un nouveau batteur se joindra au groupe en temps et lieu.

Première fois à Montréal

« On s’est fait offrir de jouer à Osheaga à quelques reprises », explique Billy au sujet de notre étonnement que ce soit leur premier rendez-vous à Montréal. « À ce moment-là, nous n’avions pas les visas pour le faire, et ça ne fonctionnait pas financièrement. … et bon, ça ne fonctionne pas plus en ce moment, mais on vient quand même! »

« En fait, ce qu’on aurait dû faire, c’est jouer à Just for Laughs », ajoute Will.

Après avoir joué principalement en mode festival (de musique, pas d’humour) depuis quelques années, BEAK> offrira cette fois-ci, en tournée dans des salles, un set davantage axé sur le quatrième album, >>>>, lancé en mai 2024 sans crier gare.

Si cette sortie surprise, il y a 10 mois, avait enchanté les fans, on ne peut pas en dire autant de l’industrie, ce qui ne semble pas déranger les gars de BEAK>.

« Nous avons décidé de ne pas lancer de single, ne pas attendre pour bien faire les choses, explique Barrow. Pourquoi devrions-nous jouer selon les mêmes règles stupides que nous impose l’industrie, comme si on était Selena Gomez ou n’importe quel autre acteur de la pop? Nous ne jouons pas pour la radio, ni les listes de lecture massives. Alors pourquoi respecter les règles de mise en marché? Je n’en profiterais jamais de toute façon. C’est une perte de temps totale. »

L’enregistrement de celui-ci s’est fait en 2023 dans un chalet dans le nord du Pays de Galles, en face d’où la série télé des années 1960 The Prisonner a été tournée. « Nous nous y sommes enfermés durant 7-8 jours, juste nous, avec un ingénieur de son et un pote qui préparait des burritos aux haricots noirs le matin. C’est un endroit sympa à la campagne avec d’énormes montagnes derrière nous. »

Un décor qui a d’ailleurs inspiré la très jolie pochette du quatrième album. Ce qu’on remarque toutefois de cette oeuvre, c’est davantage Alfie, le « chien du groupe », qui propulse tel un monstre géant des rayons laser sur Barrow, Fuller et Young à travers la rivière Avon de Bristol, berceau du trip-hop où les trois complices habitent toujours.

Les plus fins observateurs auront remarqué que ces rayons forment en fait un cœur lumineux autour du groupe. « Il était toujours là avec nous, c’était un wicked dog, raconte Billy au sujet du regretté chien. Il devait d’ailleurs apparaître au dos de la pochette, alors que sur la couverture, c’était censé être nous trois en train de se battre, parce que c’est ce qu’on fait quand Alfie n’est pas avec nous. Finalement, Alfie est sur le dessus, et nous trois, on se tape sur la gueule à l’arrière de la pochette. » (Voir l’image d’entête de cet article.)

Sur le plan musical, BEAK> a effectué un tournant plus accessible sur ce plus récent disque. « La musique a un peu changé. C’est juste ennuyeux de continuer à faire des bruits bizarres, à faire de l’art pour nous-mêmes. On s’amuse bien pendant un moment, mais finalement, on a écrit des chansons à la place. Cela nous a changé aussi. Écrire des paroles et des arrangements, c’est vraiment ce qu’aucun d’entre nous ne s’attendait à vouloir faire avec BEAK>. Ça nous a permis de continuer à se dépasser. »

Le concert à Montréal affiche complet. Le projet synth pop futuriste Litronix, signé sous le même label que BEAK>, Invada Records, assurera la première partie dès 21h. « C’est fucking weird et génial! C’est une histoire intéressante : c’est comme un robot prêcheur inventé par l’église côtière américaine en 1942. Il a été enterré à Las Vegas, mais a été déterré 80 ans et fonctionne toujours… » La très étrange description complète du concept se trouve ici.

Tournée nord-américaine de BEAK>

Mar 22 – Montreal, QC, Théâtre Fairmount
Mar 23 – Toronto, ON, The Great Hall
Mar 26 – Kingston, NY, Tubby’s
Mar 27 – Brooklyn, NY, Elsewhere
Mar 29 – Knoxville, TN, Big Ears Festival
Apr 1 – Los Angeles, CA, Zebulon
Apr 2 – Los Angeles, CA, Zebulon
Apr 4 – Seattle, WA, Neumos
Apr 5 – Portland, OR, Polaris Hall
Apr 7 – Vancouver, BC, Hollywood Theatre

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