En attendant le déconfinement #3 | Reconnecter avec les gens d’ici et d’ailleurs avec Myriam Achard du Centre Phi
Cette nouvelle série hebdomadaire vise à donner la parole à des acteurs du milieu culturel qui ont été durement touchés par la pandémie et vise à mettre en mots les actions concrètes qu’ont dû poser les intervenants pour s’adapter à la crise. On se penche sur ce qui les occupe, ce qu’ils font (souvent dans l’ombre) en attendant le déconfinement culturel et comment ils permettent à la culture de survivre et de continuer à exister. Cette semaine, on discute avec Myriam Achard du cas du Centre Phi, à Montréal.
* Photo en entête : courtoisie Myriam Achard
Du réel au virtuel
Pôle de diffusion artistique multidisciplinaire, le Centre Phi est habitué de jongler avec les différentes formes d’arts pour rejoindre son public. Lorsque le centre a fermé à la mi-mars, le comité de direction du Centre Phi s’est rencontré pour trouver de nouvelles façons d’aller à la rencontre des gens. « C’est comme ça qu’est né VR TO GO, notre premier projet issu du confinement », nous confie Myriam Achard, la directrice des relations publiques du Centre Phi. « C’était une façon d’introduire le Centre chez les gens. »
Disponible à Montréal et à Québec, VR TO GO est un service de location de casques de réalité virtuelle livrés à domicile proposant dix oeuvres, allant d’une réinvention d’Alegria du Cirque du Soleil à un voyage au sommet de l’Everest. Preuve que le modèle fonctionne, Myriam Achard est en discussion pour développer VR TO GO à l’international avec des partenaires de Paris, Londres, New York et même Tokyo.
Extrait de l’oeuvre Travelling While Black, nommé aux Emmy Awards – Programme Interactif Original Exceptionnel, disponible sur VR TO GO
Une des forces du Centre Phi, c’est cette capacité à créer du contenu sans restriction de format. Les expressions d’arts qui ne tentent pas d’imiter le réel, mais qui sont nés avec le virtuel, prennent tout leur sens en cette période de confinement. C’est le cas pour La fourchette et le micro, nouvelle initiative multisensorielle invitant les gens à se faire livrer un repas du Pikliz, du Virunga ou du Accomodation Dany qui sera accompagné d’une trame sonore où les chefs raconteront leurs histoires en plus de faire jouer une trame musicale choisie par ceux-ci.
Le rôle du diffuseur d’art
Pour le Centre Phi, la pandémie a été une période de questionnements quant à son rôle dans sa communauté. Depuis son ouverture en 2012, le Centre Phi joue un rôle primordial pour un grand nombre d’artistes toutes disciplines confondues.
Ainsi, les défis qui se présentaient à l’équipe étaient multiples. Offrir une visibilité aux artistes, offrir du contenu intéressant au public et continuer de faire entrer des revenus ne sont que quelque-uns des défis auxquels a fait face la direction. « Cette pandémie a fait en sorte que notre équipe, quoique distancée, s’est beaucoup rapprochée au fil de multiples sessions d’idéation. »
C’est ainsi que sont nés deux autres projets en pandémie: la série de spectacles de musique Sonication enregistrés sur le toit du centre et Lignes parallèles, une résidence artistique virtuelle offrant une bourse et une galerie virtuelle pour dix artistes de divers horizons. Cette deuxième initiative fut un succès: 250 artistes ont appliqué pour tenter de remporter la bourse de 2000$ et la résidence. Tout comme VR TO GO, Lignes parallèles est un autre projet né en temps de pandémie qui perdurera. Des annonces suivront dans les prochains mois concernant de nouvelles cohortes qui pourraient prendre place à l’hiver 2021.
* Lydia Képinski en spectacle sur le toit du Centre Phi. Photo par Daniele Tomelleri
Nous, l’équipe du Centre Phi, on a toujours su garder le cap grâce à une vision stratégique claire: avoir une offre variée et être présent là où les gens ne nous attendent pas.
Tout ça, en préparant une première réouverture dont la date était inconnue. Pour ce faire, l’équipe a travaillé sur l’exposition Émergences et convergence, une nouvelle exposition conçue pour remplacer l’exposition qui devait initialement avoir lieu. « La première expo contenait beaucoup de réalité virtuelle et on a décidé de changer, de ramener l’écologie, l’environnement et le réel au centre de l’oeuvre. Pour Émergences et convergence, on ne voulait pas mettre de flèches par terre pour indiquer les directions, car elles te rappellent la période que l’on traverse », affirme Myriam Achard. C’est ainsi qu’est née une exposition hautement immersive, ne se basant que très peu sur la réalité virtuelle et proposant un parcours naturel ne nécessitant pas de flèches au sol.
La démocratisation de l’oeuvre
Si Phi porte en son ADN le gène de la surprise, c’est son public qui allait le surprendre lors de leur réouverture. Habitué à voir un public mature et avisé mettre les pieds au Centre Phi, l’exposition Émergences et convergence attirait cette fois un large public adolescent. Curieuse, l’équipe du Centre a questionné les visiteurs, pour apprendre que c’est grâce à des vidéos virales sur TikTok, mettant en vedette l’exposition, que l’affluence d’adolescents s’est créée.
Au sujet de cet événement inattendu, la directrice des relations publiques lance: « Ce qu’on espère, c’est que ces jeunes-là prendront goût à l’art et qu’ils reviendront nous voir. Au final, le but c’est que les gens puissent consommer de l’art. Au Centre Phi ou à la maison, en mangeant avec La fourchette et le micro ou dans le salon avec VR TO GO. »
Continuant d’offrir une offre diversifiée, multidisciplinaire et multi-plateforme, l’équipe du Centre Phi sera prête à une réouverture, peu importe la date. En guise de conclusion, Myriam Achard souhaite qu’au moment d’une réouverture, le public se montre solidaire avec les lieux culturels. « Si les gens peuvent se le permettre, ce sera important plus que jamais de courir dans les salles de cinéma, les musées et les salles de spectacles pour prouver leur pertinence et leur importance. »
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