crédit photo: Marie-Claire Denis
Dérives (Lucie Grégoire)

Dérives à l’Agora de la danse | Lucie Grégoire renoue avec la scène pour s’y abandonner

La chorégraphe et interprète de renom en danse contemporaine Lucie Grégoire n’a pas encore dit son dernier mot. C’est en approchant l’imposant thème de la « dérive », sous toutes ses formes éventuelles, que la danseuse rencontrera à nouveau la scène de l’Agora de la danse du 28 septembre au 1er octobre prochain.

La figure de la danse contemporaine au Québec le précise d’emblée à Sors-tu? : le solo de près d’une heure Dérives ne se résume pas sur un coin de table. « Ça dérive dans plusieurs sens », explique-t-elle. Avec comme trame sonore les mélodies « profondes et parfois sombres » de la violoncelliste islandaise Hildur Guðnadóttir, la pièce se pèle en plusieurs couches.

Certains et certaines, à l’écoute du mot dérive, verront la dérive des continents, la dérive de notre monde vers des phénomènes inquiétants… D’autres penseront plutôt à une dérive intime : un moment difficile ou encore un changement excitant. Il s’avère que toutes ces réponses sont bonnes. « Je pense toujours que le spectateur est unique », affirme Lucie Grégoire. À lui ou à elle donc de lire dans la gestuelle hors du commun de l’artiste, faite de rondeurs et de douceur, le poème de son choix.

Il ne faut pas pour autant assumer que la principale intéressée ne puise pas dans ses propres sources d’inspiration. Un séjour professionnel en Islande en 2016, par exemple, lui a laissé des images grandioses en tête. « J’ai eu les pieds sur des plaques tectoniques », se remémore-t-elle. Difficile de trouver plus concret en ce qui a trait aux phénomènes naturels plus grands que soi. L’artiste évoque aussi des dérives plus sociales, voire humanitaires, comme la pandémie de la Covid-19 ou les crises de réfugié(e)s.

Un moment de rencontre

L’artiste s’est arrêtée sur le choix de l’Espace bleu de l’édifice Wilder, la plus petite salle de l’Agora. Il va sans dire que celle qui a présenté son travail à l’international et fondé sa propre compagnie de danse, Lucie Grégoire Danse, aurait pu se permettre une salle à plus grande capacité. Pour l’interprète, c’est cependant un contact privilégié avec le public qui prime sur le reste. « La notion d’espace, de cette ouverture vers l’immensité, est importante [dans Dérives] », mentionne-t-elle. Des moments chargés ainsi qu’une certaine électricité ambiante sont à prévoir.

Fidèle à son habitude, la chorégraphe pige dans la littérature pour faire naître le mouvement. On assistera donc à Dérives comme on lit un roman. « J’aime beaucoup les mots, exprime-t-elle simplement. Je les traduis dans des gestes. » Même si le solo parle des « vraies choses », il ne revendique rien en particulier. Il est plutôt porteur d’une histoire, d’un voyage – si on s’y immerge complètement.

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La danse comme un feu

Lucie Grégoire a concocté Dérives avec déjà plus de 40 œuvres derrière la cravate. Sa dernière apparition sur scène remonte à 2018, alors qu’elle a interprété Territoires en quatuor avec les artistes Kim Henry, Isabelle Poirier, James Viveiros. Le solo est néanmoins catégorie à part pour Grégoire. « C’est un défi, mais c’est excitant. Retourner au solo, c’est retourner à la maison », illustre-t-elle. Elle compare la construction d’un numéro de danse à celle d’une sculpture : elle entame sa démarche avec une base, une idée générale. « Ensuite, je rentre dans la matière, détaille-t-elle. Je le fais une couche à la fois. »

La voix de la danseuse sexagénaire, habitée par la passion, pétille. On le sent à l’autre bout du fil.

Je sens que je pourrais danser toute ma vie. La flamme de la danse brûle encore en moi.

Voilà un des petits poèmes que nous livre Lucie Grégoire au cours de l’entretien et qui ouvrent une fenêtre sur sa vision de la danse : une occasion de donner vie aux mots lorsque le papier ne suffit plus.

Dérives sera présenté à l’Espace bleu de l’édifice Wilder du 28 septembre au 1er octobre. Les billets sont en vente sur le site Web de l’Agora de la danse.


* Cet article a été produit en collaboration avec L’Agora de la danse.

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