crédit photo: Thomas Mazerolles
Deftones

Deftones (et IDLES) au Centre Bell | La vibrante renaissance des parrains suaves du nu metal

Après avoir fait bonne figure au Centre Vidéotron dimanche, on se doutait que Deftones se pointeraient au Centre Bell lundi soir dans une forme splendide, pour un concert frémissant d’énergie et de finesse sonore. Trente-deux ans après leurs débuts, le groupe originaire de Sacramento poursuit une trajectoire étonnante, portée par un nouvel album salué par la critique et le public, private music, et par une forme scénique renouvelée. Qui plus est, le public montréalais avait droit à une première partie de luxe : les géants du post-punk britannique, IDLES. Retour sur une soirée savoureusement tonitruante.

Pour un xennial, l’idée d’aller voir Deftones en show relève d’un exercice nostalgique. On se rappelle tendrement de l’époque où les chansons d’Around The Fur, Adrenaline ou White Pony connectaient parfaitement avec notre rage adolescente, tout en nous donnant l’impression d’écouter quelque chose d’un peu plus profond que du Limp Bizkit ou du Korn. On lit encore souvent que Deftones sont un peu « les Radiohead du nu metal », de par leur finesse, leur sensibilité et leur soin du détail.

Sauf que la bande californienne connaît peut-être le plus étonnant regain de popularité des derniers temps. Et ça se traduisait lundi soir par un Centre Bell bien bondé et bigarré : 12 000 spectateurs pour un amphithéâtre affichant complet, parmi lesquels se côtoyaient autant des quarantenaires nostalgiques et des goth girls qui pourraient être leur progéniture.

Certains spectateurs à peine majeurs se massaient près des barrières, des jeunes hommes enthousiastes et des jeunes femmes crowd-surfant pour la première fois. Du haut de la section 102, on pouvait voir aisément une nouvelle vague générationnelle dans le pit. Et cette fraîcheur dans l’assistance redonne une dynamique particulière au spectacle : une communion pieuse entre la scène et une jeunesse avide d’intensité et de mystère. Les générations se mêlaient, vétérans de la première heure et débutants du live, un phénomène rare.

Les fans de la première heure seront toutefois vite rassurés : Deftones lance coup sur coup Be Quiet and Drive (Far Away) et My Own Summer (Shove It), les bons vieux brûlots de notre adolescence. Tous les sens sont immédiatement conquis : ça bûche à souhait, les tympans en prennent pour leur rhume, les vibrations des enceintes frappent au thorax, la qualité du visuel sur scène séduit l’oeil…

Et que dire de Chino Moreno. Le chanteur qui ne fait plus ses 52 ans. Sa récente sobriété documentée semble l’avoir libéré. On le sent plus présent, plus limpide, et physiquement intense. Les envolées vocales, les nuances de Digital Bath ou la retenue vibrante de Sextape témoignent d’une maîtrise retrouvée. On dit souvent des chanteurs vieillissants qu’ils prennent un coup de vieux. Chino a pris un coup de jeune.

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Les titres du nouvel album s’intègrent par ailleurs très bien aux vieux classiques, comme my mind is a mountain ou infinite source, extraits de cet appréciable private music. Ce mélange a permis de raviver les souvenirs d’un public fidèle tout en le gardant sous tension. Diamond Eyes, Tempest, Digital Bath et Change (In the House of Flies) ont été revisitées aussi, ressuscitant la profondeur d’un répertoire intemporel, qui a renouvelé le bassin de jeunes fidèles, qui n’ont pas autant d’attachement aux albums et aux époques, mais consomment davantage des chansons à la pièce. Pour eux, Deftones, ce n’est pas « la période Adrenaline » ou « tout ce qui s’est fait avant Diamond Eyes ». C’est plutôt Cherry Waves, Sextape, Change (In the House of Flies), Entombed et Rosemary, dans l’ordre ou dans le désordre.

Techniquement, tout n’était pas parfait. Le son penchait souvent vers les guitares rythmiques et la batterie, au détriment des lignes vocales ou de la basse. Le mix sonore était pour le moins audacieux, assez agressif, surtout dans les trois derniers morceaux. Mais quand il est question de musique comme celle de Deftones, trop fort, c’est mieux que pas assez fort. Et le moshpit semblait d’accord avec ce constat.

En rappel, Deftones a livré une finale percutante avec Cherry Waves, Engine No. 9 et 7 Words — un clin d’œil à leurs racines névrosées, puis leur divergence vers une musique plus nuancée. Ce mélange entre brutalité et sensualité est la marque de fabrique du groupe, est toujours intacte après des décennies. Et visiblement, ça ne séduit pas que les nostalgiques. Ça trouve son public en 2025. On ne peut que s’en réjouir.

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IDLES : L’adrénaline punk avant la tempête métal

Juste avant Deftones, les Anglais d’IDLES ont donné un set intense de près de 45 minutes. La fureur brute de la bande a visiblement plu au public de Deftones, et ça se comprend : les fans d’IDLES savent à quel point des titres comme Colossus, Gift Horse, Mr. Motivator et Danny Nedelko peuvent charger l’atmosphère d’un irrésistible vent punk rageur et politique. On en avait ici un concentré, un échantillon qui a vite trouvé son erre d’aller sans jamais redescendre en intensité.

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Il est à noter que malgré leur notable popularité au Québec, IDLES a tendance à multiplier les présences plus modestes que nécessaires : on les avait vus à Osheaga en 2022… devant une poignée de fidèles parce qu’on les avait programmés en même temps que la tête d’affiche Dua Lipa. Puis, ils étaient revenus l’an dernier pour deux MTELUS, une salle trop petite pour leur popularité, et les voici finalement en première partie d’un show au Centre Bell.

Cela démontre sans doute une belle humilité, mais gageons que la prochaine fois, ce sera le format approprié : une Place Bell à eux seuls. Si c’est le cas, l’expérience du Centre Bell nous viendra à l’esprit : IDLES peut très bien mettre le feu aux poudres dans un amphithéâtre. Auuuucun problème.

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The Barbarians of California : découverte appréciable

Avant les deux mastodontes, dès 19h, on pouvait faire la découverte d’un groupe nommé The Barbarians of California, pourvoyeurs d’un métalcore émergent simple mais efficace, et non sans humour (on a quand même fait la vague dans un show métal!). « We are Barbarians of California… we are your new favorite band », s’exclame le chanteur. Peut-être pas. Mais c’était assurément une découverte intéressante, divertissante à souhait.

Le projet découle de la volonté d’Aaron Bruno, d’AWOLNATION, de collaborer avec l’ingénieur de son Eric Stenman, et ils ont visiblement pris grandement plaisir à se servir de ce véhicule pour s’éclater sur scène.

Programmez ça aux Foufs au plus sacrant!

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