Critique théâtre | Les Flâneurs célestes au Théâtre Prospero

Du 25 mars au 12 avril est présenté au Prospero, en première canadienne, Les Flâneurs célestes, un texte touchant et sincère de l’Américaine Annie Baker, mis en scène par Jean-Simon Traversy de LAB87.

Les Flâneurs célestes, c’est un des nombreux noms qui n’ont pas été choisis pour être celui du groupe de musique punk-rock formé par Jasper (Mathieu Quesnel) et Kevin (Éric Robidoux). Mais ce titre, ce n’est vraiment qu’eux, les deux acolytes un peu ratés et mélancoliques qui vivent mollement leur trentaine en marge de la société.

On apprend à les connaître en les regardant exister sur la terrasse pour employés d’un café où ils vont tous les jours.

Jasper est un grand silencieux qui fume des cigarettes électroniques, un écrivain-musicien, un génie incompris qui a lâché l’école au secondaire. Kevin, lui, est un éternel adolescent et malheureux buveur de thé au mush, qui a étudié la philosophie avant de tout plaquer. Les deux hommes ne se ressemblent pas tellement, si ce n’est par leur incompatibilité avec la société et un certain pathétisme qui les caractérise.

L’histoire est celle de la relation étrange qui s’installe entre la paire et un jeune garçon de café, l’adorablement coincé Evan (Laurent Pitre). Pour Kevin et Jasper, Evan devient le pupille de leur école de vie et les sort de leur quotidien rouillé avec sa gentillesse et la quasi-admiration qu’il leur porte. De son côté, le tandem décalé tire l’adolescent de son monde banal et probablement sans surprise par leur étrangeté ; ils le font rire.

On rit d’ailleurs beaucoup – de la folie de Kevin avec ses habitudes New Age que lui a transmises sa mère, des blagues du flegmatique Jasper, des maladresses d‘Evan, de l’absurdité de certaines circonstances.

Dans Les Flâneurs, les petits et les grands drames sont banalisés ou même tournés en dérision : c’est juste la vie.

La compagnie théâtrale LAB87, qui présente ce spectacle, se donne pour mission de « diffuser un théâtre contemporain innovateur et accessible », des objectifs qui son atteints par Les Flâneurs célestes. C’est en effet une pièce réaliste, très actuelle, et dont l’action pourrait se dérouler dans à peu près n’importe quelle ville du Canada ou du Nord des États-Unis. Ceci, entre autres, explique la familiarité qui se dégage de l’œuvre pour un public montréalais.

Aussi, on s’identifie vite aux protagonistes de l’histoire, autant pour leur langage franc que  pour leur histoire et leurs difficultés relativement «normales ». Ils sont en quelque sorte le reflet de notre quotidien.

Les trois acteurs ayant d’ailleurs été très bien choisis et les dialogues étant si près de ceux qu’on pourrait entendre au café ou au dépanneur du coin, on croit sans problème que de tels personnages puissent exister.

Les Flâneurs célestes n’est pas une pièce qui se veut moralisatrice, ou même réflexive ; elle ne fait que constater et rapporter la vie des gens ordinaires, avec ce qu’elle comporte de drôleries et de tristesse. C’est simplement l’anecdote  d’une amitié singulière entre trois hommes, interrompue éventuellement par un événement subit. Ce thème abordé en fin de programme est un des non-sens inévitables de l’existence, et probablement le plus grand, mais comme semblent le penser les personnages malgré tout est que la vie continue.

 

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