Critique | Testament au Théâtre de Quat’sous
Comment mettre en scène le roman d’une jeune femme disparue trop tôt à cause d’une tumeur au cerveau? Le metteur en scène Éric Jean – aussi directeur artistique du Quat’sous — a décidé de se lancer dans l’adaptation du livre de Vickie Gendreau, Testament, suite à sa lecture qui l’aura bouleversé. Alors voilà que se joue devant nous une véritable ode à la vie, un désir criant de vivre avec intensité.
Ici, on ne peut pas à proprement parler d’une pièce de théâtre, du moins d’une pièce de théâtre au sens traditionnel. Aucun dialogue, aucune interaction directe entre les personnages, seulement des extraits du livre, auquel se greffent de courts poèmes, laissant toute la place aux mots crus et puissants de Vickie Gendreau.
Sachant que la mort la frapperait bientôt, elle mit en scène son décès et légua à ses amis de petites parties d’elle-même qu’elle cachera dans des clefs USB. Résultat : une œuvre qui vous fera vivre une gamme complète d’émotions portée par une riche distribution de 8 comédiens à découvrir. La doyenne du groupe Dominique Pétin qui interprète la mère est bouleversante dans son jeu tout en retenue.
Des fennecs côtoieront une poupée gonflable, des histoires de prostitutions, de sexe et d’amour aussi. L’univers de Vickie Gendreau complètement dénudé de faux semblant et empli de fougue vibre sous nos yeux. Des soirées où l’alcool coule à flot jusque sur son lit d’hôpital criant de douleur, tout y est.
À tour de rôle, ses amis, son grand amour, un ancien amant et sa famille parleront d’elle, de leurs souvenirs et de leur rencontre, donnant lieu à des moments touchants et drôles, tous emplis d’une douce nostalgie. Nostalgique et parfois triste, mais surtout vivant et festif. La musique jouant un rôle prédominant dans le spectacle d’Éric Jean donne parfois l’impression d’assister à un « happening », les comédiens y démontreront leurs talents de musiciens et de chant.
Visuellement, une scène assez dénudée : tout autour des instruments de musique, des bouteilles d’alcool jonchent le sol, des vêtements sont éparpillés un peu partout et une barre de « pole dancing » vient compléter le tout. À l’arrière se trouve un grand écran sur lequel sont projetées des images – tels de petits poèmes desquels il est difficile de détacher le regard – de la jeune Jade-Măriuka Robitaille, celle qui interprète avec brio Vickie.
Jade-Măriuka Robitaille est magnifique sur scène, à la fois forte et fragile, son interprétation de la jeune femme viendra vous tirer les émotions jusqu’au fond du ventre. Impossible de passer à côté des autres acteurs : Marilyn Castonguay, Juliane Desrosiers-Lavoie, Simon Lacroix, Étienne Laforge, Hubert Lemire et Jean-Philippe Perras. Avec force et assurance et surtout avec beaucoup de sensibilité, ils s’emparent de l’imaginaire de l’auteure pour offrir un spectacle hors du commun.
Présentée du 10 au 30 mars au Théâtre du Quat’sous, Testament est chavirant et touchant. Vous serez happé par la puissance des mots de Vickie Gendreau, touché par la grande sensibilité de cet hommage. Une pièce à ne pas manquer.
- Artiste(s)
- Testament
- Ville(s)
- Montréal
- Salle(s)
- Théâtre de Quat'Sous
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