Critique | Pique de Robert Lepage et Ex Machine à La Tohu

La Tohu fourmillait comme jamais, mardi soir, alors qu’on y présentait en première québécoise Pique, premier volet d’une tétralogie de Robert Lepage et Ex-Machina intitulée Jeux de Cartes. L’époustouflante scénographie circulaire de Jean Hazel et le brillant jeu d’acteur en ont mis plein la vue, camouflant du coup un récit un peu prévisible et plus ou moins accompli.

Entre Las Vegas et l’Irak de l’époque Bush-fils, il y a un monde de contrastes, mais tout de même bien des ficelles faciles à lier. C’est le point de départ de la pièce, qui se déroule sur deux heures et demie, sans entracte.

Photo par Pascal Leduc.

Photo par Pascal Leduc.

En dépit de la durée, on ne ressent pas de longueur, en grande partie en raison de la mise en scène et de l’ingéniosité de l’enrobage visuel. La scène circulaire, genre de pastille complètement entourée du public, prend des airs de station spatiale (comme aimait bien le dire Robert Lepage en conférence de presse) à l’intérieur de laquelle les acteurs disparaissent et réapparaissent sous d’autres traits. Sans coulisse, l’espace circulaire se transforme en chambre d’hôtel, en casino, en jacuzzi ou en décor désertique. La prouesse technique vole pratiquement la vedette.

Bien que la narration ne soit pas exactement linéaire, on suit assez facilement les récits entrecroisés d’un couple terre-à-terre du Québec venu se marier sous la bénédiction d’un faux Elvis, d’une fille de joie hispanique, d’un producteur de télé anglais et de sa maîtresse française, de deux militaires en entraînement dans une base secrète dans le désert du Nevada, ainsi que deux femmes de chambre sans-papier, tous dessinés à traits un peu gros.  Il y a aussi ce mystérieux cowboy, allégorie du chaos et du désir.

Photo par Pascal Leduc.

Photo par Pascal Leduc.

Les destins de chacun aboutiront pas mal exactement là où on les projetait dès le départ, ce qui rend la réflexion sur les vices et le désir (liée de façon assez molle avec la thématique de guerre en Irak) pas très surprenante. Le tout manque de cohésion, se la joue un peu onirique, compliquant inutilement des tracés de personnage somme toute assez direct.

Au moins, Lepage et Ex-Machina auront relevé le défi de pousser un peu plus loin encore les limites de la mise en scène avec un tour de force réussi, réalisé avec brio, sans bavure.

Étant donné les moyens techniques à la disposition du spectacle, Pique aurait pu être un grand chelem, mais on se rappellera davantage du contenant que du contenu.

Coeur, le deuxième volet de la tétralogie, sera aussi présenté à La Tohu, du 30 janvier au 9 février.

Photos en vrac
par Pascal Leduc

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