Owen Pallett

Critique | Owen Pallett et Basia Bulat au Théâtre Corona

Le Théâtre Corona prenait des airs de party de famille jeudi soir, alors que trois des artistes de l’écurie Secret City s’y succédaient: Thus:Owls, Basia Bulat et Owen Pallett.

« Bonjour, je suis Basia Bulat et ceci est mon premier spectacle en tant que vraie Montréalaise », dit celle-ci dans un français enthousiaste.

La chanteuse folk-pop canadienne a effectivement emménagé dans la métropole cet été, se rapprochant ainsi du clan Secret City, son label d’adoption. Elle rejoint les Suuns, Plants & Animals et autres Patrick Watson de ce monde, tous des musiciens anglos qui ont fait de Montréal leur nouveau chez soi, et qui bricolent chacun leur création musicale sous le chapiteau Secret City. « C’est la meilleure famille », pour citer Bulat, visiblement reconnaissante.

Pour ce premier show en tant que vraie Montréalaise, donc, Basia Bulat aura fait tout un effet auprès d’un Corona déjà bien plein, qui semblait séduit d’avance. Son plus récent album, la très belle carte de visite Tall Tall Shadow, lui a permis de se faire connaître et apprécier, et s’est d’ailleurs retrouvé sur la courte liste du prix Polaris, un an après sa sortie (à l’automne 2013).

Il faut dire que la sincérité de Bulat est désarmante. C’est le cas sur disque, mais davantage sur scène. Elle y met tout son coeur dès le départ en interprétant It Can’t Be You, sans micro, en s’accompagnant au charango. Sa voix dorée est sans faille et véhicule tant d’émotion qu’on ne peut rester de glace face à ses chansons.

Photo par Marc-André Mongrain.

Photo par Marc-André Mongrain.

Elle n’est pas une vilaine musicienne non plus, alternant du charango à l’autoharpe, puis à la guitare (jolie Paris or Amsterdam, interprétée en solo) et finalement au clavier.

Seule, elle se fait touchante. Mais elle est aussi bien accompagnée, par un batteur, un bassiste et une choriste, ce qui donne du coffre à certaines chansons. Des titres comme Gold Rush et Five, Four s’en trouvent grandement bonifiés, avec un petit côté rock qui rehausse la prestation.

Très charmant. Assez, même, pour que la foule exige un rappel, alors qu’elle n’était même pas la tête d’affiche. Vu que c’est un party de famille, s’est dit la foule, on peut probablement faire fi des règles de bienséance non-écrites.

Tant mieux. Elle le méritait bien.

Owen Pallett

S’ensuivait Owen Pallett, qui revenait présenter le contenu de son disque le plus récent, In Conflict, trois mois et demi après le lancement à la Sala Rossa.

Comme prévu, le spectacle a déjà bien évolué depuis, et le matériel plus récent s’intègre parfaitement aux chansons de l’époque où on l’appelait Final Fantasy.

Dans la quasi-pénombre, Owen Pallett a donné le coup d’envoi avec trois vieux titres coup sur coup, seul au violon avec ses pédales de loop : That’s When The Audience DiedSong Song Song et This Lamb Sells Condos.

Photo par Marc-André Mongrain.

Photo par Marc-André Mongrain.

Sa dextérité au violon et sa gestion de la technologie lui permettant de monter des chansons en crescendo à partir de ses propres partitions superposées sont impressionnantes, mais les titres joués avec ses deux musiciens en jètent encore plus.

Des chansons plus complexes comme Tryst with Mephistopheles ou encore l’intense The Riverbed méritent la présence d’un bon batteur et du bassiste, ce qui n’empêche pas Pallett d’empiler les lignes mélodiques avec son engin à créer des boucles.

Les éclairages ont été travaillées soigneusement, tout comme la scénographie ; on peut constater, en permanence derrière l’artiste, une intrigante structure polygone (un placard allégorique?) aux surfaces miroir. Plusieurs jets de lumière s’y déposent, rebondissant dans une autre direction. On y reconnaît à la fois un clin d’oeil à la tournée Reflektor d’Arcade Fire – Pallett jouait sur cette tournée, tout comme les précédentes d’AF – et une métaphore qui va dans le sens d’In Conflict et de sa thématique queer.

Au terme d’une généreuse soixantaine de minutes,  l’artiste est revenu au rappel avec trois chansons interprétées seul, tout comme en intro : la majestueuse Better Than Worse, tirée du premier album Has A Good Home (paru en 2005), The CN Tower Belongs to the Dead (du même disque), puis l’incontournable extrait du nouveau disque Song For Five and Six.

Une valeur sûre, en pleine possession de ses moyens.

Avec un tel matériel, on serait curieux, toutefois, de le voir à l’oeuvre dans une salle dotée d’une meilleure acoustique…

Photo par Marc-André Mongrain.

Photo par Marc-André Mongrain.

Grille de chansons

That’s When The Audience Died
Song Song Song
This Lamb Sells Condos
The Passions
Keep The Dog Quiet
Soldiers Rock
Tryst with Mephistopheles
Scandal At the Parkade
The Secret Seven
The Great Elsewhere
Infernal Fantasy
This Is The Dream Of Win And Régine
The Riverbed
Lewis Takes Off His Shirt

Rappel

Better Than Worse
The CN Tower Belongs to the Dead
Song for Five and Six

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