Critique | Orphelins au théâtre La Licorne
De retour au théâtre La Licorne pour une deuxième année consécutive, Orphelins de l’auteur britannique Dennis Kelly, bouleverse et frappe par sa dureté et par l’actualité du propos. Steve Laplante, Évelyne Rompré et Étienne Pilon déambulent dans ce récit où s’entremêlent violence et mensonge repoussant les limites de ce qu’il est permis de faire ou non. Jusqu’où doit-on aller pour défendre ceux que l’on aime ?
Liam débarque brusquement chez sa sœur Helen et son mari Dany qui se préparaient pour un souper en amoureux. Il chamboulera tout. Il a le chandail couvert de sang, l’air hagard et l’histoire incohérente. Plus il raconte et plus il s’emmêle. Il a voulu porter secours à un homme blessé dans la rue… Peut-être qu’il en est plus responsable qu’il ne veut l’admettre. Ses mensonges, eux, camouflent l’horreur du geste. Helen voudra prendre tous les moyens pour défendre son jeune frère.
Helen et Dany n’ont d’autres choix que de croire le récit de plus en plus invraisemblable de Liam. Débuteront les questionnements, ceux de la responsabilité que nous avons face à nos proches, aux inconnus, à la loi et surtout à nous-mêmes. Jusqu’où le poids d’une enfance brisée et les blessures qu’elle a causées, peuvent-ils excuser nos gestes? Jusqu’où incombe la responsabilité des actes d’une personne souffrant de problème de santé mentale. Des questions qui resteront sans réponse.
Les personnages sont bien définis, bien qu’ils renferment tous une part d’ombre qu’ils laisseront échapper par moment. Le texte est puissant et rythmé. Chacune des répliques, à la fois directes et saccadées, cogne comme un coup de poing. Difficile de rester indifférent. Rien de mieux pour porter ce drame tant social que personnel que trois acteurs de talents.
Omniprésente tension
Chacun des comédiens a offert une performance remarquable, habitant aussi bien les silences que les moments de colère ou de détresse. Si habile que le trio est capable de faire éclater de rire les spectateurs en plein milieu d’un instant de crise, aussi tragique soit-il. Le tout mené d’une main de maître par le metteur en scène Maxime Denommée dans une mise en scène sobre et dynamique, la tension est présente à chaque instant.
Mention spéciale à Steve Laplante, en conjoint attentionné et bouc-émissaire, troublant de vérité surtout dans la scène finale où il remettra toute son existence en question. Une performance franchement époustouflante. Étienne Pilon parvient à nous rendre son personnage d’écorché attachant et tout aussi détestable. Évelyne Rompré, elle, est des plus convaincantes en grande sœur protectrice qui ne peut abandonner son frère.
Des rires qui adoucissent l’atmosphère – petits instants de répit pour reprendre son souffle — et surtout une assistance muette, figée sur son siège, devant les mots de Dennis Kelly. Une fois les lumières éteintes, au son des applaudissements, la salle un peu ébranlée s’animera à nouveau.
- Artiste(s)
- Orphelins
- Ville(s)
- Montréal
- Salle(s)
- La Licorne
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